Il en résulte une situation très particulière dans laquelle il y a des choses que l’on peut faire et d’autres non ; mais distinguer l’embryon de la cellule est très difficile, puisqu’au départ, il est une cellule. On pourrait aussi se dire qu’on aurait pu choisir de donner un statut à l’embryon : entre la chosification de l’amas de cellules et la personne humaine. Personne ne l’a fait, car c’est impossible. Le devenir d’êtres humains n’est pas définissable à la manière d’un droit positif : c’est quelque chose qui se mesure à l’aune de l’avenir. Nous sommes donc obligés de débattre sur un sujet qui n’est ni une personne humaine, ni un amas de cellules.
Si nous nous trouvons dans cette situation, il faut que nous l’acceptions, conformément à notre droit positif selon lequel la vie humaine est protégée dès sa conception et conformément à l’éthique qui rappelle que, même sans statut juridiquement défini, il s’agit d’un être en devenir qui mérite une protection juridique. De plus, ce que vous proposez n’apporte rien à la recherche scientifique française. Pour regarder et écouter ceux qui sont intervenus dans ce sujet, je citerai deux personnes favorables à l’autorisation.
Tout d’abord, demandons-nous si des recherches ont été interdites en France à cause du dispositif alors en vigueur – un processus temporaire d’autorisation avec un moratoire. Sur soixante-quatre projets de recherche, le seul projet de recherche qui a été écarté demandait que des cellules embryonnaires puissent être utilisées à des fins de tests cosmétiques. Je suppose que personne ici n’envisage que cela soit possible. Les projets n’ont donc pas été rejetés. Cette orientation antérieure – l’interdiction avec dérogation – a bien fonctionné.
À ce propos, la loi sur l’avortement est-elle compatible avec le code civil ? Vous l’avez peut-être oublié, mais la loi sur l’avortement est une dérogation à une interdiction : pourtant vous considérez que l’avortement jouit d’une autorisation, parce que vous avez décidé que cette loi ne devait pas être changée, et personne – en tout cas pas moi – ne le souhaite. En réalité, on protège l’être humain dès sa conception, même si l’on intervient pour un avortement. Vous devez vous mettre cela dans l’esprit pour comprendre que l’idée de l’interdiction avec dérogation est un principe de notre droit français qui lui permet une certaine stabilité.