Comme vous le dites, mon cher collègue, on réenchante le rêve…
Permettez-moi également de rappeler l’engagement 35 du candidat François Hollande : « Pour dissuader les licenciements boursiers, nous renchérirons le coût des licenciements collectifs pour les entreprises qui versent des dividendes ou rachètent leurs actions »…Que de belles promesses restées sans effet !
Mais revenons à cette proposition de loi qui pose un certain nombre de questions – nous aurons l’occasion d’y revenir plus en détail dans l’examen des articles.
L’article 1er définit l’obligation de rechercher un repreneur en cas de projet de fermeture d’un établissement. Comment définissez-vous la rentabilité d’un site, indépendamment de celle du groupe auquel il appartient ? Par ce texte, vous voulez nous faire croire que vous empêcherez tout plan social dans notre pays.
Au lieu d’encourager les dirigeants d’entreprises et les investisseurs à créer de l’activité, et donc de l’emploi, vous parviendrez seulement à les décourager, au détriment du développement économique de notre pays.
Le niveau des sanctions prévu pour les chefs d’entreprise qui ne respecteraient pas la procédure de recherche de repreneur – jusqu’à vingt fois le montant du SMIC par emploi supprimé – dénote un véritable climat de défiance à l’encontre des chefs d’entreprise.
L’article 8 prévoit la suppression du principe de neutralité des organes de direction lors d’une OPA. Alors que l’Union européenne a mis plus de dix ans avant d’accoucher des principes contenus dans la directive européenne de l’OPA du 21 avril 2004 – la France ayant choisi le régime d’opt-in depuis 2006 –, je m’étonne de voir surgir, au détour d’un amendement, un tel revirement sans concertation avec les professionnels de la place.
En revanche, sur l’article 4, qui prévoit de réduire le seuil de déclenchement d’une OPA, de 30 à 25 %, vous faites machine arrière, et c’est très bien. Mais pourquoi n’allez-vous pas au bout de votre démarche ? Si vous écoutez les professionnels pour l’article 4, écoutez-les pour le reste du texte et revenez aussi sur les autres articles !
Pour terminer, j’ajoute que ce texte pose de vraies questions constitutionnelles. Il porte atteinte au droit de propriété garanti par la Constitution et la Déclaration des droits de l’homme et, dépossédant de fait l’entrepreneur, collectivise l’outil de travail. Au travers de cette loi, l’État se trouve à la limite de l’économie administrée, et risque de remettre en cause les principes de la liberté d’entreprendre. Sans oublier que le droit de propriété, strictement encadré et protégé par la Constitution, est ici remis en cause.
Ce texte concourt clairement à dessaisir l’entrepreneur de son outil de travail. Il va même au-delà : il s’agit de céder non seulement une usine, mais aussi une technologie, un savoir-faire. Votre recette – instabilité juridique, méfiance vis-à-vis des chefs d’entreprise, contraintes administratives supplémentaires, économie administrée, pénalités exorbitantes – n’est pas la bonne pour redresser l’économie dans notre pays.
En commission des affaires économiques, madame la rapporteure, vous évoquiez la portée symbolique de cette proposition de loi. Ce texte en a une, en effet : aller contre les intérêts de l’entreprise et donc ne pas favoriser l’emploi. Le texte que vous proposez aujourd’hui à la représentation nationale sera pour vous l’occasion de tourner définitivement la page Florange. C’est pourquoi nous ne saurions y souscrire.
Permettez-moi toutefois de conclure sur une note positive qui fera plaisir à mes collègues alsaciens, un peu moins à M. le président de la commission des affaires économiques : si ce texte est voté, c’est la centrale nucléaire de Fessenheim qui sera sauvée, un site rentable dont la fermeture menacerait de nombreux emplois. Cette rentabilité me rend d’ailleurs confiante dans la possibilité de trouver un repreneur ; j’espère donc que vous allez rapidement commencer à chercher.