Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la rapporteure, chers collègues, « nous sommes prêts du but » : c’est ce que le Président de la République a annoncé ce dimanche, à propos de l’inversion de la courbe du chômage. Mais il n’a pas convaincu les Français, et sa crédibilité sur ce qui reste leur préoccupation numéro un est durablement remise en cause. Le Gouvernement serait mobilisé pour lutter contre le chômage, certes, mais à très court terme, à grand renfort de contrats aidés et sans véritable politique de soutien à la compétitivité des entreprises.
Tenir ses promesses électorales et tenter de ramener à lui les électeurs qui ont le sentiment, à raison, d’avoir été trompés : voilà toute l’obsession du Président Hollande et du Gouvernement, qu’illustre la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui. Une proposition de loi que l’on pourrait qualifier d’affichage ou de circonstance, qui traduit l’engagement numéro 35 du candidat Hollande : en pleine campagne électorale, à Florange, il promettait de dissuader les licenciements boursiers « en renchérissant le coût des licenciements collectifs pour les entreprises qui versent des dividendes ». D’abord associée au vocable : « Cession obligatoire des sites rentables », cette proposition de loi a été opportunément rebaptisée : « Proposition de loi visant à donner des perspectives à l’économie réelle et à l’emploi industriel ».
Continuer à entretenir l’illusion que l’État peut empêcher les licenciements dans une économie ouverte est une faute, monsieur le ministre : relisez Schumpeter et sa théorie de la destruction créatrice. Les Français ne sont pas dupes, ils sont même colère !
Je veux formuler trois remarques à propos du texte que nous examinons et contre lequel nous voterons.
Vous nous présentez cette proposition de loi comme un puissant levier du redressement productif. Or elle ne s’adresse qu’aux entreprises de plus de mille salariés, et la majorité des entreprises françaises qui connaissent des difficultés sont bien souvent au-dessous de ce seuil ; rien ne serait donc fait pour ces entreprises de 100, 200 ou 300 salariés, qui sont les premières victimes des redressements et des liquidations judiciaires ? Elles sont pourtant en nombre croissant : depuis le début de l’année – notre collègue Anne Grommerch l’a rappelé : pas moins de cent quatre-vingt-dix usines ont fermé. Quel changement ! Et c’est la députée d’une circonscription où est annoncée la fermeture d’une unité de production de saumon frais de plus de cent salariés qui peut en témoigner. Il s’agit d’une entreprise qui fait des bénéfices et qui a choisi de fermer deux sites, pour mieux en conforter deux autres en France. Que faire ? Les ministres de votre Gouvernement ont défilé, impuissants. C’est difficile à vivre pour les salariés : nous leur devons – c’est bien le moins – un accompagnement personnalisé afin qu’ils puissent «rebondir dans les meilleures conditions possible. Les services de l’emploi sont mobilisés, en partenariat avec les responsables de l’entreprise et les élus locaux. Il faut en effet aller de l’avant, réindustrialiser le site et s’assurer de la réinsertion professionnelle durable des salariés.
Par cette proposition de loi, vous adressez un très mauvais signal aux investisseurs nationaux et internationaux, en faisant peser sur eux des obligations de nature à les dissuader d’investir dans la création d’entreprises et leur développement dans notre pays. Si nous trouvons parfaitement fondée la nécessité, pour un chef d’entreprise, d’expliquer les raisons de la décision de fermer un site de production, nous notons aussi que l’obligation de rechercher un repreneur est déjà contenue dans la loi qui transpose l’accord national interprofessionnel sur la flexisécurité, qui vient d’être votée.