Les règles constitutionnelles s’acharnent contre vos arrangements politiciens.
Votre premier texte était d’une audace singulière : le 4e arrondissement, aujourd’hui acquis à la gauche, perdait 17,6 % de sa population, et conservait pourtant ses trois sièges, tandis que le 17e arrondissement, qui ne perdait que 0,62 % de sa population et qui s’attend à une forte augmentation avec le quartier des Batignolles, perdait un siège ! Tout était bon pour s’accrocher à la majorité au conseil de Paris, au point d’oublier un principe démocratique fondateur garanti par la Constitution : le principe d’égalité devant le suffrage. Le commentaire de la décision de censure du Conseil constitutionnel est limpide, je vous le relis, mes chers collègues : « Les écarts par rapport à la moyenne sont manifestement disproportionnés et ne permettent pas de respecter le principe d’égalité devant le suffrage. »
Il y a donc eu un second texte. Nous l’avons étudié il y a seulement quinze jours, et il ne résolvait rien, ne servant qu’à vous préserver d’une censure du Conseil constitutionnel par une répartition certes subtile, mais ne répondant absolument pas à l’impératif démocratique. Cette fois, c’est votre amateurisme qui a été sanctionné. En ne déclarant pas l’urgence et en faisant discuter le texte moins d’un mois après son dépôt, vous avez ignoré l’article 42 de notre Constitution qui impose un délai minimal de six semaines entre le dépôt d’un texte et sa discussion en séance. Bref, vous vous dirigiez donc vers une deuxième censure du Conseil constitutionnel, jusqu’à ce que vous vous rendiez compte, mais après le vote, de votre erreur.
Vient donc maintenant le temps de la précipitation. La proposition de loi de notre collègue Jean-Pierre Sueur déposée et discutée en urgence au Sénat est ainsi, comme l’a noté à l’instant Bernard Debré, le dernier texte en discussion de la session extraordinaire de notre assemblée.
Ces méthodes, Bernard Debré, François Fillon, Claude Goasguen, Philippe Goujon, Jean-François Lamour, Pierre Lellouche, Guy Geoffroy et moi-même, nous les contestons, nous les rejetons fermement. Non seulement parce qu’elles sont une perte de temps pour le Parlement, mais parce qu’elles considèrent avec légèreté et bien peu de rigueur les conditions d’exercice du suffrage des Parisiens.
L’enjeu est en effet bien plus important que la seule question de l’écart par rapport à la moyenne et des délais d’étude de textes. Il s’agit pour la représentation nationale de décider si elle souhaite offrir un nouveau souffle démocratique au scrutin parisien.
Notre proposition est simple et portée par Bernard Debré : offrir aux Parisiens la liberté de choisir par eux-mêmes la majorité qu’ils souhaitent au conseil de Paris et par extension de dessiner le visage de leur maire. Nous proposons qu’ils puissent voter séparément pour une liste d’arrondissement et pour une liste au conseil de Paris. Il ne s’agit nullement de réduire le pouvoir des maires d’arrondissement, comme vous tentez de le faire croire alors que c’est vous qui réduisez leurs marges de manoeuvre, et aujourd’hui davantage encore avec votre projet de loi sur la métropole du Grand Paris. Au contraire, en dissociant les deux listes, nous renforçons la légitimité du maire de Paris, mais aussi celle des équipes locales parce que leur l’élection sera considérée comme un scrutin à part entière et non pas seulement comme une simple étape pour composer le conseil de Paris. Ce sera bon pour le maire de Paris, pour les maires d’arrondissement, pour la démocratie et pour les Parisiens. Nous ne comprenons vraiment pas votre obstination à refuser cette proposition, de même que la défiance du Gouvernement et de nos collègues socialistes vis-à-vis du choix direct des Parisiens, comme s’ils en avaient peur.
Notre proposition est plus transparente, moins partisane et plus démocratique. Je vous appelle à faire confiance aux Parisiens et à leur offrir un scrutin lisible pour la désignation de leur maire.