Lorsque je dis que le modèle est satisfaisant, je pense surtout au modèle économique, autrement dit à la façon dont se trouve assuré le financement du coût du transport. Le modèle ferroviaire – que je connais bien – est très complexe. Pour ce qui est du transport de l'électricité, le modèle actuel est simple et clair : c'est le consommateur qui paye.
Venons-en au modèle institutionnel français. La loi est très claire : le transport de l'électricité est confié à une entreprise publique. Nous revendiquons – et je revendique personnellement – cette appartenance au service public. La loi dispose également que seuls des acteurs publics – EDF, l'Etat ou un organisme public – peuvent être actionnaires de RTE. Une évolution de notre capital est donc possible : il suffit qu'un acteur public se substitue en tout ou partie à EDF. Cela pourrait être utile, dans la mesure où notre dépendance à 100% d'EDF – qui n'est pas appréciée de tous nos partenaires européens – conduit à une limitation de notre capacité à sortir de nos frontières en Europe. Il existe en effet dans le « troisième paquet » une clause interdisant aux opérateurs intégrés comme RTE et EDF de prendre une participation dans une entreprise de transport ayant fait l'objet d'une séparation juridique. Si une opportunité de devenir actionnaire – même minoritaire – d'un opérateur de réseaux se présente – et il y en a eu quelques-unes –, nous ne pouvons donc pas nous mettre sur les rangs. Cela ne pose pas de problème à court terme : nous restons le premier opérateur de transport d'électricité en Europe et remplissons déjà une lourde mission. Je fais cependant le pronostic – même si j'ignore à quelle échéance – que le paysage est appelé à évoluer, à l'instar de ce qui s'est passé pour le transport aérien, où les compagnies nationales publiques ont fait place à des regroupements autour de trois pôles. Si nous voulons que RTE puisse prendre part à cette mutation, nous devons sortir du modèle d'opérateur intégré, qui lui interdit, en l'état actuel des directives européennes, de devenir actionnaire d'un autre réseau de transport à l'extérieur de nos frontières. Cette situation ne nous empêche pas d'avoir une politique européenne : nous développons activement les coopérations autres que patrimoniales avec nos voisins et nous pouvons encore aller plus loin. À terme, il faudra néanmoins réfléchir à la question. Nous n'avons pour l'instant manqué aucune occasion exceptionnelle, mais tôt ou tard, des opportunités se présenteront. La taille des réseaux de transport est aujourd'hui très variable : elle va du réseau français, le plus grand en Europe, aux réseaux luxembourgeois, qui sont au nombre de deux. On voit bien qu'un optimum pourra être atteint, et qu'il y aura des pressions en ce sens.