Intervention de Fanélie Carrey-Conte

Séance en hémicycle du 22 octobre 2013 à 21h30
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFanélie Carrey-Conte :

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, je souhaiterais centrer mon propos sur la problématique de l’accès aux soins à travers la question précise de l’accès aux complémentaires santé.

Ce débat est à mettre en perspective avec des discussions que nous avons déjà eues ensemble à plusieurs reprises dans cet hémicycle : lors de l’examen de la proposition de loi sur les réseaux de soins ou lors des débats sur l’ANI. À chaque fois se posait en arrière-plan la question de la généralisation de la complémentaire santé conformément aux engagements du Président de la République, et donc plus globalement des liens entre assurance maladie obligatoire et assurance maladie complémentaire.

Aujourd’hui, la mise en oeuvre de la stratégie nationale de santé, dont ce PLFSS constitue l’an I, a donné une nouvelle impulsion à tout cela en fixant de nouvelles étapes mais surtout en réaffirmant le cadre de nos orientations politiques. Car oui, la question de la répartition des rôles entre assurance maladie obligatoire et assurance maladie complémentaire s’inscrit bien dans le cadre d’une vision politique de la sécurité sociale et doit à ce titre donner lieu à une discussion démocratique, comme un appel public nous y invitait récemment et comme vous vous y êtes engagée, madame la ministre.

Cette vision politique, nous l’assumons pleinement : renforcement de l’assurance maladie obligatoire – à rebours du mouvement de désengagement mis en oeuvre ces dernières années –, ambition de procéder à une reconquête sélective en articulation avec des complémentaires santé. En tant qu’élément nécessaire dans l’accès aux soins, nous considérons que celles-ci doivent être accessibles à tous, et surtout être régulées et encadrées par la puissance publique.

En ce sens, ce PLFSS marque plusieurs étapes importantes.

Rappelons d’abord le relèvement, le 1er juillet dernier, des plafonds permettant de bénéficier de la CMU complémentaire et de l’aide à l’acquisition de la complémentaire santé, l’ACS, qui a permis à 750 000 nouvelles personnes de bénéficier de ces aides et dispositifs.

Soulignons ensuite dans ce PLFSS les exigences qui entoureront les contrats complémentaires destinés aux personnes bénéficiant de l’ACS. Une mise en concurrence des organismes complémentaires sera mise en place qui ne s’apparentera ni à un appel d’offres, ni à la mise en oeuvre de contrats collectifs. Cette procédure permettra de faire pression sur le secteur afin d’augmenter les exigences de qualité dans les contenus de ces contrats. Cela constituera donc un élément supplémentaire en matière de régulation.

J’en profite pour attirer votre attention, madame la ministre, sur le fait qu’il faudra prévoir un accompagnement pour les personnes aujourd’hui bénéficiaires de l’ACS dont le contrat n’aurait pas été retenu dans le cadre de la mise en concurrence et qui devront changer d’opérateur et de garantie pour continuer à percevoir l’aide. Il faudra veiller à ce qu’il n’y ait pas de rupture dans l’accès aux droits.

J’en viens, enfin, à la refonte des contrats solidaires et responsables. Il s’agit là d’un point majeur. Rappelons les enjeux qui y sont attachés : ils sont un outil de régulation – oui, on revient toujours à cette question –, qui porte autant sur le contenu des contrats que sur les tarifs. Cet outil est assorti d’un moyen : une fiscalité qui doit permettre de différencier véritablement les contrats solidaires et responsables de ceux qui ne le seront pas.

S’agissant du contenu de ces contrats, la séance devra confirmer ce que nous avons voulu préciser en commission à travers un amendement du rapporteur : que le panier de soins proposé devra comprendre des prestations liées à la prévention ainsi que les frais d’optique. Ce sont là deux éléments importants.

Autre élément concernant le contenu : la mise en place d’une régulation des tarifs afin d’en finir avec la solvabilisation des dépassements d’honoraires. Il est fondamental que dans le contrat solidaire et responsable, la prise en charge de ces dépassements soit plafonnée. Nous aurons à débattre de ce sujet. Si l’on souhaite mettre en oeuvre une véritable politique de limitation des dépassements – qui nécessitera évidemment d’autres outils au-delà des indispensables contrats solidaires et responsables –, et être en cohérence avec le contrat d’accès aux soins, alors se posera la question d’aller en-dessous des 150 % de limitation que nous avons votés en commission.

Au-delà de ces points, des questions se posent et des étapes restent à franchir.

Il s’agit d’abord de la généralisation de la complémentaire santé. L’ANI a été une étape pour les salariés et nous nous occupons avec ce PLFSS des bénéficiaires de l’ACS, mais la question de l’accès aux complémentaires des jeunes, des chômeurs, des non salariés, des personnes âgées dont les revenus se situent au-dessus du plafond de ressources de l’ACS reste posée. Il faudra pour toutes ces personnes prévoir d’autres étapes, ce qui pose la question des moyens à mettre en oeuvre pour rendre cette généralisation effective.

Ceci m’amène à mon deuxième point : la nécessaire poursuite de la réflexion sur la remise à plat des aides fiscales et sociales accordées aux aides à la complémentaire santé. Certaines mesures ont été prises dans le projet de loi de finances mais tout n’a pas été dit et fait s’agissant du caractère anti-redistributif des exonérations de cotisations employeurs pour les contrats collectifs. De même, s’agissant de la fiscalité des contrats, une étape a été franchie avec la modulation de la TSCA, mais il y a d’autres leviers qui pourraient être utilisés. Peut-être pourrait-on aller plus loin avec une différenciation de la fiscalité en fonction de critères comme la solidarité intergénérationnelle ou la fixation des cotisations en fonction des niveaux de revenus.

Nous poursuivons toujours le double objectif de favoriser des contrats de qualité et de dégager des marges de manoeuvre financières pour aller au bout du processus de généralisation de la complémentaire santé. Lors du débat sur la transposition de l’ANI, nous avions fait adopter un amendement demandant un rapport en ce sens : il faudra être attentifs à ses conclusions pour prendre des décisions en conséquence.

Voici quelques questions pour la suite, une fois franchies les nouvelles étapes importantes inscrites dans ce PLFSS dans le sens d’un meilleur accès aux soins pour toutes et tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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