Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 23 octobre 2013 à 16h20
Commission élargie : finances - défense nationale

Jean-Yves le Drian, ministre de la défense :

Sur le long terme, j'observe également, en France comme ailleurs, la tendance dénoncée par M. Cornut-Gentille. Mais elle prend des formes plus graves à l'étranger, en particulier dans certains pays européens. Le choix du Président de la République a en effet été de sanctuariser le budget de la défense en lui consacrant 190 milliards d'euros courants entre 2014 et 2019, et de maintenir les crédits annuels au niveau – 31,4 milliards d'euros – qu'ils avaient en 2013 et en 2012. L'effort consenti par la défense à la politique de redressement des comptes publics – dont la maîtrise est aussi un élément de notre souveraineté – équivaut donc à la hauteur de l'inflation.

Il est vrai, cependant, que cela revient à consacrer à ce budget 1,5 % du produit intérieur brut, un niveau dont je ne me contente pas. Au cours de l'examen, par le Sénat, du projet de loi de programmation militaire, un amendement a ainsi été adopté avec le soutien du Gouvernement afin d'inscrire dans la loi elle-même l'objectif d'atteindre, à terme, les 2 %.

Plus généralement, l'évocation du concept de « déclassement stratégique » me semble relever de la polémique. N'oublions pas que nous aurons, en 2019, la première armée européenne ! En effet, la défense emploiera, à cette date, 187 000 militaires et 55 000 civils. Si l'on s'en tient aux seuls militaires, leur nombre sera donc nettement supérieur à celui des soldats allemands ou britanniques. Les réductions d'effectifs mises en oeuvre dans ces pays sont en effet bien plus drastiques qu'en France. Peut-on vraiment dire de la première armée d'Europe, une armée qui comptera, au terme du processus actuel, 225 avions de chasse, 16 frégates de premier rang, 4 sous-marins nucléaires lanceurs d'engin, 6 sous-marins nucléaires d'attaque et une force opérationnelle projetable composée de 66 000 soldats, qu'elle est en voie de déclassement stratégique ? Ce n'est en tout cas pas du tout l'avis de nos voisins ou alliés, y compris au sein de l'Alliance atlantique. Certains propos relèvent donc de l'excès oratoire et ne correspondent pas à la réalité des faits.

Par ailleurs, monsieur Cornut-Gentille, je n'ai pas d'inquiétude s'agissant des ressources exceptionnelles en 2014. Or c'est bien du budget pour 2014 dont nous discutons. S'agissant des 6,1 milliards de ressources exceptionnelles prévues par le projet de loi de programmation militaire, nous discuterons de leur affectation lors de l'examen du texte, à la fin du mois de novembre. Par rapport à la loi de programmation précédente, j'ai l'avantage de pouvoir disposer d'une description précise des ressources auxquelles il sera possible de recourir, incluse dans le texte même de la loi, et non plus dans l'annexe. En outre, une réévaluation de la situation aura lieu à la fin de 2015. La difficulté sera donc de s'assurer au bon moment de la mobilisation effective de ces ressources. Je l'ai obtenue en 2013 et en 2014, mais il convient d'être vigilant pour la suite.

Contrairement à M. Cornut-Gentille et à M. Launay, je ne vois pas comme un inconvénient le fait de faire passer le montant des crédits consacrés aux OPEX de 630 millions d'euros en 2013 à une moyenne de 450 millions d'euros annuelle dans la loi de programmation, applicable dès 2014 – au contraire.

Ce chiffre, tout d'abord, tient compte de la réduction de notre présence en Afghanistan et au Mali, même si, dans ce dernier pays, nous resterons sans doute un peu plus longtemps qu'il n'était prévu au moment de la rédaction du projet de loi, le Président de la République ayant souhaité maintenir un niveau significatif de forces jusqu'aux élections législatives. Au bout du compte, l'enveloppe globale, pour l'opération malienne, sera en 2013 de 600 à 650 millions d'euros. En tout état de cause, elle est en diminution.

Ensuite, comme je l'ai dit hier devant la commission de la défense, nous allons réorganiser nos forces en Afrique, non pas nécessairement pour en réduire l'ampleur, mais pour modifier la répartition entre OPEX et prépositionnement, de façon à nous doter d'une meilleure réactivité et d'une meilleure capacité d'intervention.

Cela étant, dans le monde instable que nous connaissons, de nouvelles interventions ne peuvent être exclues – en République centrafricaine, par exemple. Dans cette hypothèse, le coût supplémentaire serait partagé. Or ce coût serait calculé non à partir de 630 millions d'euros, mais de 450 millions. La baisse des crédits programmés pour les OPEX me paraît donc constituer plutôt une avancée qu'un recul – même si je comprends que l'on puisse voir les choses autrement.

Si les surcoûts sont entièrement supportés par le ministère de la défense, cela oblige à amputer une fois encore les crédits d'équipement. Je suis désolé, ou plutôt ravi, de vous dire que cette année, les surcoûts des OPEX feront l'objet d'un financement interministériel.

Messieurs Launay et Cornut-Gentille, je partage vos interrogations sur la fin de gestion. J'ai demandé la levée intégrale des crédits mis en réserve ainsi qu'un abondement à hauteur de l'intégralité du surcoût des OPEX. L'arbitrage du Premier ministre doit intervenir prochainement. À ce stade, je ne peux pas vous dire davantage que ma détermination à ce que la programmation commence sur les bases les plus saines.

Le report de charges est un sérieux motif de préoccupation. Il était de trois milliards d'euros en 2012. Le report de charges n'est pas en lui-même un péché dans l'un des rares ministères doté d'une forte capacité d'investissement mais nous avons dépassé le montant acceptable. J'entends résorber au cours de la LPM ce report de charges que j'ai trouvé à mon arrivée et qui est le résultat de multiples reports successifs. Je suis confiant quant à la prise en charge interministérielle du surcoût des OPEX. Pour le reste, le soutien et la détermination de l'ensemble des acteurs, singulièrement des membres des commissions parlementaires concernées, seront nécessaires.

S'agissant des études amont, je suis déterminé à sanctuariser les crédits qui y sont consacrés entre 730 et 750 millions d'euros. Ma détermination est la seule garantie que j'aie à vous offrir pour le moment. Vous en avez eu une première preuve puisque j'ai obtenu que le montant des crédits passe de moins de 700 millions en 2012 à 730 millions en 2013. C'est une facilité à laquelle je ne veux pas céder que d'amputer les crédits consacrés à des études dont les résultats ne seront connus que dans dix ans. Si nous ne sommes pas très vigilants sur ce point, nous courons à la catastrophe.

Il y a deux sujets sur lesquels je suis inflexible – les autres questions sont évidemment importantes mais elles viennent en second rang : les études amont et la préparation opérationnelle. Sans elles, nous prenons le risque, d'une part, de ne pas préparer l'avenir et, d'autre part, d'envoyer en opérations des militaires qui ne sont pas aguerris aux matériels de haute technologie.

Je me refuse à faire de ces deux lignes budgétaires une variable d'ajustement, comme cela est pourtant la pratique, malgré les inconvénients qui s'y attachent.

Pour ce qui est de l'agenda des dissolutions d'unités évoqué par plusieurs intervenants, je vais peut-être vous décevoir mais je n'annoncerai les déflations d'effectifs et leurs conséquences qu'année après année. Pour quelles raisons ? D'une part, parce que pour la précédente LPM, une méthode différente avait été retenue mais elle n'a pas fait ses preuves. D'autre part, parce que je souhaite voir les principes suivants respecter : premièrement, limiter à un tiers au plus des effectifs les déflations affectant les unités opérationnelles ; deuxièmement, éviter au maximum les dissolutions – c'est d'ailleurs le cas dans mes annonces récentes ; troisièmement, prendre en considération l'aménagement du territoire – l'armée n'a certes pas vocation à aménager le territoire mais il est préférable de prendre en compte ce paramètre quand cela est possible ; en quatrième lieu, s'assurer de la cohérence des choix avec l'organisation des forces, y compris sur le territoire national – en matière aérienne, la décision récente de transférer les Alpha jet de Dijon à Cazaux accentue la cohérence de notre dispositif ; cinquièmement, examiner les aspects financiers et économiques, y compris en matière capacitaire – s'agissant des aménagements, nous savons par exemple que l'accueil de nouveaux matériels a des conséquences sur les infrastructures.

Parallèlement, il nous faut tenir compte de l'analyse fonctionnelle qui doit identifier dans l'administration générale de la Défense les possibilités d'améliorer la productivité. Il nous faut mener à bien ce travail difficile.

Les décisions que j'ai prises pour 2014 en la matière ne sont pas celles qui m'étaient proposées en juin. J'ai examiné attentivement chaque situation en cherchant à limiter les conséquences négatives et à appliquer les cinq principes que je viens d'évoquer. Je souhaite procéder ainsi sur l'ensemble de la période de programmation militaire.

Monsieur Launay, vous avez évoqué le taux d'encadrement. Il est vrai que celui-ci est passé de 15,5 au début de la LPM précédente à 16,75 % aujourd'hui, alors que dans le même temps le nombre de militaires a diminué significativement. Ce problème a été souligné par la Cour des comptes. Notre objectif est de ramener ce taux à 16 %. À ceux qui souhaiteraient un effort plus important, j'indique que ce chiffre correspond à une moyenne. Un nombre croissant de fonctions ne peuvent être assumées que par des militaires d'un certain niveau en raison de la technicité grandissante de certains outils de défense et de l'importance prise par la cyberdéfense. La réalisation de cet objectif doit respecter les spécificités propres de chaque armée, de la DGA ou du service de santé des armées, ce qui n'empêchera pas les recrutements.

Concernant la marine, monsieur Launay, malgré l'insatisfaction que vous avez manifestée, les frégates de surveillance ont toujours été au nombre de six. Elles ont un peu vieilli, j'en conviens. Nous devons donc envisager de nous doter rapidement des moyens nécessaires pour assurer notre souveraineté maritime.

Sur le maintien d'une forte présence en mer, monsieur le Bris, je vous confirme que deux patrouilleurs seront commandés en 2014 et que trois bâtiments multi-missions « B2M » le seront avant la fin de l'année. Enfin, pour les bâtiments de soutien et d'assistance hauturiers, une discussion est en cours. Le principe de cette flotte de remorqueurs en haute mer n'est pas remis en cause ni la nécessité d'acquérir huit navires. En revanche, l'interrogation porte sur la méthode d'acquisition de cette capacité. Un partenariat public privé est à l'étude. Je m'interroge sur l'opportunité économique de cette option. Je suis décidé à commander les bâtiments mais la réflexion sur le plan financier n'est pas aboutie. Si le PPP ne présente pas un avantage financier pour la défense, nous devrons opter pour une autre méthode.

L'arrêt technique majeur du porte-avions Charles de Gaulle se déroulera, comme prévu, de septembre 2016 à février 2018 pour un coût de 1,3 milliard d'euros.

S'agissant de la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense (SIMMAD) et du service de soutien de la flotte, nous examinons la meilleure manière d'assurer le soutien des forces. Ces deux outils font l'objet d'une discussion interne importante qui n'a pas abouti pour l'instant. Nous travaillons sur plusieurs hypothèses. Cette question devrait être tranchée dans quelques semaines, probablement pas avant l'examen de la LPM, dans le sens d'une meilleure efficacité, d'une rapidité accrue et d'une meilleure économie générale. Il s'agit de dépenser mieux et donc de rendre les outils de soutien existants, dans le domaine de l'aviation et de la flotte, les plus performants possible.

La réflexion sur le soutien des forces ne remet en aucun cas en cause l'existence du service industriel de l'aéronautique (SIAé). Quel que soit le donneur d'ordre, l'outil industriel doit demeurer.

Quant aux effectifs de la marine, monsieur Le Bris, vos observations sur les « micropopulations » – vous auriez pu citer également les sous-mariniers – sont justes. Cependant, je précise – car une interprétation différente a été donnée par le passé – que la déflation n'est pas proportionnelle. La déflation est le résultat d'une analyse fonctionnelle et de l'ajustement aux compétences dont les armées ont besoin.

Monsieur Pueyo, je vous confirme que la loi de programmation militaire prévoit le recrutement de 1 000 personnes supplémentaires dans les forces spéciales car l'analyse des risques et des capacités d'intervention fait apparaître le caractère essentiel de celles-ci. Les forces spéciales, comme la cyberdéfense et le renseignement, constituent des éléments centraux de notre action et de notre autonomie stratégique qui justifient d'augmenter les recrutements.

Nous n'avons pas achevé l'analyse détaillée des besoins pour les forces spéciales. Nous allons sûrement renforcer la chaîne de commandement des opérations spéciales, regrouper le parc des hélicoptères et augmenter les personnels selon une méthode qui reste à définir.

Le programme Scorpion est quasiment lancé. Alors qu'il a été par le passé très menacé, il m'a semblé essentiel de le maintenir. Il sera mis oeuvre dès 2014 afin de permettre à l'armée de terre d'être équipée.

Vous dites que certains équipements sont vieux. Il est vrai que la vétusté des P4 pose des problèmes dans la vie quotidienne même si elle n'affecte pas les capacités les plus essentielles. J'en ai conscience et j'y serai attentif à l'avenir.

Mais – et c'est là l'essentiel – l'armée de terre va bénéficier de la fin des livraisons des VBCI, du lancement de Scorpion, de l'arrivée, au cours de la LPM, des premiers VBMR et des premiers EBRC ainsi que du renforcement de la capacité en hélicoptère, aussi bien des NH90 – je viens de commander une deuxième série de 34 hélicoptères – que des Tigre qui ont fait la preuve de leur efficacité au Mali et en Afghanistan. Tous ces équipements permettront de renforcer l'ensemble des capacités de l'armée de terre. Il faut ajouter le remplacement du Milan par le MMP et la mise en service du lance-roquettes unitaire dès 2014. Cela témoigne de notre volonté de faire en sorte que les 66 000 hommes de l'armée de terre soient en 2019 des personnels équipés et entraînés.

Plusieurs d'entre vous ont évoqué Louvois, un sujet majeur, difficile et douloureux. Avant la fin de l'année, je serai amené à prendre une décision pour remédier à cette catastrophe, ce désastre, cette aberration indigne de notre pays. Il est impensable que les militaires qui mettent leur vie en danger pour la France ne perçoivent pas leur solde en temps et en heure.

Un dispositif transitoire a été mis en place dès que j'ai découvert l'ampleur du désastre, à l'occasion d'une visite à Vars dans la brigade alpine en septembre 2012. Depuis, à chacune de mes visites aux unités – et je sais qu'il en va de même pour vous – on découvre de nouvelles vicissitudes qui s'expliquent par plusieurs raisons sur lesquelles je ne reviens pas.

Nous devons trouver les moyens de mettre fin à ces dysfonctionnements, d'une part, en maintenant le régime transitoire et d'autre part, en faisant un choix entre la réparation du système existant et la mise en place d'un nouveau système. J'annoncerai ma décision, qui n'est pas simple et demande du temps, lors d'une prochaine visite aux militaires de Vars qui m'avaient, à raison, interpellé sur ce sujet. Dans la période de transition, nous devons gérer au mieux les inconvénients de la situation, y compris le problème des trop-perçus dont on parle peu mais qui a aussi des répercussions fiscales. C'est épouvantable…

Monsieur Marty, à propos du système Source, nous essayons d'éviter de reproduire les mêmes erreurs. C'est la raison pour laquelle j'ai mis en place un pilotage renforcé du projet. Des expérimentations vont également être menées avant d'abandonner le système existant.

Il est indispensable de mettre de la cohérence dans le système d'information en matière de ressources humaines de nos armées afin d'éviter certains désagréments qui ont été relevés par la Cour des comptes. Cette dernière a ainsi constaté que la déflation des effectifs au ministère de la défense s'est accompagnée d'une hausse de la masse salariale. Cette incongruité rend ma position difficile dans les discussions avec mon collègue de Bercy.

Une gestion cohérente des ressources humaines, au demeurant souhaitable, exige des systèmes d'information cohérents. Mais nous devons faire preuve d'une extrême prudence, y compris sur les retraites, pour être sûrs d'éviter les problèmes. Je préfère multiplier les expérimentations car une catastrophe suffit !

Monsieur Pueyo, l'information sur les réformes en cours – et cela vaut pour l'armée de terre mais aussi pour toutes les armées – est diffusée, peut-être insuffisamment. Elle l'a été à l'occasion du Livre blanc, par moi-même mais aussi par les chefs d'état-major et les commandants d'unités. J'ai réuni à plusieurs reprises les chefs de corps de l'armée de terre et les grands commandeurs pour l'ensemble des armées françaises pour expliquer les réformes. Peut-être la pédagogie n'est-elle pas assez faite auprès des personnels sur le terrain ? J'y veillerai, en mettant à contribution le service de la communication. En revanche, pour l'information sur les dispositifs d'accompagnement en cas de déflation d'effectifs, nous sommes handicapés tant que la loi de programmation militaire n'a pas été votée par l'Assemblée nationale et le Sénat. Il me semble prématuré d'annoncer des dispositifs importants, très incitatifs qui représentent près d'un milliard d'euros sur l'ensemble de la programmation. Vous pourriez à juste titre protester. En outre, vous souhaiterez peut-être amender le texte. Nous devons nous accommoder au mieux de cette période intermédiaire.

Monsieur Marty, les crédits consacrés aux infrastructures sont trop souvent considérés comme une variable d'ajustement. Ce n'est pas le cas dans le PLF pour 2014, et l'on assiste même à une inversion de tendance : les crédits d'engagement progressent de 1,3 milliard d'euros, et les crédits de paiement de 950 millions d'euros. Je souhaite que cette évolution encore insuffisante se poursuive car les conditions de vie et de logement offertes aux militaires – en particulier aux jeunes recrues – ont une influence considérable sur le moral des armées. Le plan Vivien sera achevé avant la fin de la programmation.

Je ne suis pas certain que la création des bases de défense ait donné des résultats particulièrement performants, mais je n'ai pas l'intention de remettre ces dernières en cause. Le dispositif doit néanmoins être adapté pour devenir plus simple, plus cohérent, plus rapide et plus décentralisé. Les mêmes règles ne doivent plus s'adapter indifféremment à tous les types d'unités quel que soit l'endroit où elles se trouvent sur le territoire. Il est de plus nécessaire de mieux doter financièrement ces bases de défense. Avec les problèmes de Louvois et le maintien en capacité opérationnelle des soldats, les conditions de logement et de vie courante sont l'une des trois questions susceptibles de perturber le moral des militaires, qui me préoccupent au premier chef.

Monsieur Le Déaut, les deux drones MALE dits Reaper, achetés sur étagères aux États-Unis ont coûté 150 millions d'euros. Ils seront mis en activité au Sahel avant la fin de l'année et permettront à la France de bénéficier d'une autonomie stratégique totale – alors qu'au début de l'opération Serval nous avions dû faire appel à des drones américains basés à Niamey. La LPM prévoit l'achat de dix drones de nouvelle génération supplémentaires qui devront être « francisés » ou « européanisés » avant d'opérer dans le ciel européen. Les discussions sont en cours avec les États-Unis qui déboucheront sur des partenariats industriels.

De notre côté, nous ne renonçons pas au drone MALE européen de nouvelle génération. Au dernier salon du Bourget, Dassault, EADS et l'italien Finmeccanica se sont déclarés prêts à relever le défi du drone d'observation européen pour 2022-2023, qui aura une vocation duale. Nous souhaitons qu'en décembre prochain une déclaration de principe sur le sujet du Conseil européen de défense lance l'Europe dans une nouvelle aventure industrielle.

Depuis la précédente LPM, la cyberdéfense est devenue un enjeu majeur. Pour la première fois, une part significative du texte actuellement en débat est donc consacrée au sujet. Une place importante est faite à la sécurité informatique – vous avez évoqué l'ANSSI. Les entreprises et les grands opérateurs devront respecter un certain nombre de règles sous peine de sanctions. De façon inédite dans notre droit, les services français seront autorisés à mener des actions de défense active en cas d'attaque informatique, allant jusqu'à la neutralisation des sites attaquants. Les moyens humains consacrés à la cyberdéfense seront renforcés, tant pour l'ANSSI que pour la DGSE, la DGA et l'état-major des armées. Des programmes de formation seront aussi mis en place. Une chaîne de commandement unique sera créée au sein du centre de planification et de conduite des opérations (CPCO). L'acquisition de nouveaux équipements est également prévue. L'ensemble des acteurs, civils compris, collaborera autour de la DGA, Maîtrise de l'information, basé à Bruz, près de Rennes. Notre pays à la capacité d'être en pointe dans une discipline indispensable à son autonomie stratégique. La loi de programmation lui en donne les moyens.

Monsieur Terrot, pour remplir le contrat opérationnel, l'aviation de chasse doit compter deux cent vingt-cinq appareils parmi lesquels on trouvera des Rafale et des Mirage 2000D rénovés. Nous devrons disposer de vingt-six Rafale supplémentaires d'ici à 2016. J'ajoute qu'il y aura une suite au Mirage 2000D : même si la France cesse ses commandes en 2016, il y aura bien, après cette date, une cinquième tranche de Rafale. Il faut évidemment que les chaînes de Dassault continuent de tourner, sachant que les choix capacitaires ne concordent pas toujours avec les choix industriels. Le ministère de la défense est optimiste sur la capacité de Dassault Aviation à conclure des contrats permettant la continuité de son plan de charge dans cette perspective. Les toutes récentes déclarations du PDG du groupe, M. Éric Trappier, nous confortent dans cette analyse. J'ajoute que 1,1 milliard est mobilisé pour porter le Rafale au standard F-3R, et que le groupe est impliqué dans la définition du projet du drone de combat pour l'horizon 2030. Tout cela participe d'une dynamique positive.

C'est bien moi qui commande les MRTT. Je me garde toujours de critiquer mes prédécesseurs mais, en la matière, nous avons pris du retard. Les avions ravitailleurs en service sont beaucoup trop vieux ; j'en ai donc commandé deux. Il faut aller vite parce que cela concerne tant les opérations extérieures, comme le Mali, que la dissuasion. Monsieur Grouard, ces appareils pourront également servir au ravitaillement des A400M. Nous verrons ultérieurement, avec leur montée en puissance, s'il faut prévoir un ravitaillement en vol spécifique. J'ai pris en compte votre observation sur l'ANRU.

Le projet « Cognac 2016 » constitue à mon sens un plan globalement cohérent élaboré par le chef d'état-major de l'armée de l'air. Je veux le mettre en oeuvre afin que nous disposions d'une armée de l'air aux compétences renforcées, toujours prête à remplir les missions qui lui sont confiées.

Pour certaines missions, des matériels anciens peuvent avoir leur utilité ; pour d'autres, des outils de pointe faisant appel à des technologies très sophistiquées sont indispensables. La surveillance aérienne du territoire peut ainsi être assurée par le Mirage 2000 renouvelé ; le Rafale est en revanche nécessaire pour les opérations extérieures. De même, les missions de souveraineté peuvent être assurées par de vieilles frégates robustes ; seize frégates de premier rang sont en revanche nécessaires pour participer à la mission européenne anti-piraterie Atalante au niveau de la Corne de l'Afrique. Cette différenciation est opératoire et économe.

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