Intervention de Gérard Cornilleau

Réunion du 17 octobre 2013 à 9h00
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Gérard Cornilleau, directeur adjoint au département des études de l'Observatoire français des conjonctures économiques, OFCE, membre du Haut Conseil du financement de la protection sociale :

Le problème est que ce raisonnement peut être tenu sur de multiples sujets : les entreprises profitent non seulement de la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle, mais aussi de la santé de leurs salariés, des systèmes de transport, etc. On ne peut, sur ce motif, faire financer par les entreprises l'ensemble des dépenses sociales et des équipements publics ! In fine, rappelons-le, les entreprises ne font que transférer la charge soit sur leurs actionnaires, soit sur leurs salariés – sous forme de réduction du salaire net –, soit sur leurs clients. Croire qu'elles paient est une grande illusion. Comme je l'ai dit dans une formule qui m'a été reprochée, l'entreprise est un ectoplasme. Certes, elle crée de la richesse en combinant du travail et du capital, mais on ne peut l'utiliser pour des financements durables.

En revanche, les prélèvements sur les entreprises sont justifiés dès lors qu'ils visent à infléchir leurs comportements. On peut, par exemple, moduler les cotisations « chômage » de manière à encourager les bonnes pratiques. De même, la fiscalité écologique doit être à la charge des entreprises puisqu'il leur est possible d'y échapper si elles adoptent de meilleurs comportements.

En matière familiale, on est loin de ce schéma : il s'agit plutôt, comme l'a dit Henri Sterdyniak, de transferts entre les ménages. Or, du fait de son histoire, le système est complexe et traîne des anomalies que l'on pourrait corriger. Pendant longtemps, par exemple, les pensions de retraites n'ont pas été soumises à cotisations, ce qui permettait, en retour, d'avoir des taux de cotisations « retraite » plus faibles. Si l'on souhaite tout neutraliser, il faudrait annoncer le jour où l'on transfère les cotisations familiales employeur vers la CSG que l'on augmente aussi le montant des retraites, donc les cotisations retraite, et que l'on abaisse les cotisations maladie dont on aura, par le fait, élargi l'assiette.

Je suis conscient qu'une telle remise à plat est très difficile à réaliser. On a maintenu bien d'autres incongruités, comme l'abattement de 10 % pour frais professionnels sur les montants des retraites ! Mais j'espère que le Haut Conseil essaiera de mener ce travail de fond en dépit des réticences.

Pour en revenir à la branche « famille », c'est la sécurisation des prestations, et non celle des ressources, qui a toujours été le sujet principal. Du fait d'une indexation défaillante, cette branche génère structurellement des excédents. Mais cela ne nous exonère pas de trouver le moyen de sécuriser les ressources !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion