Votre raisonnement semble implacable si l'on s'en tient à la seule branche « famille ». Mais si l'on considère l'ensemble du financement de la protection sociale, la question de l'assiette des prélèvements sur les entreprises reste ouverte – sans parler du financement des collectivités locales par la cotisation sur la valeur ajoutée. Indépendamment de la question de l'affectation des ressources, comment établir une assiette aussi large et efficace que possible en matière de prélèvements sur les entreprises ?
Par ailleurs, je ne crois pas que les prélèvements soient trop progressifs en France. Les entreprises bénéficient toujours de « niches » fiscales. L'idée qu'elles représentent les intérêts conjoints des salariés et des actionnaires est démentie par les vingt dernières années, durant lesquelles les actionnaires et les très hauts salaires ont capturé 99 % de la valeur ajoutée. L'alternative entre la taxation des entreprises et la taxation des ménages est illusoire. En réalité, soit on taxe les actionnaires et les hauts dirigeants, soit on taxe les ménages, le problème étant plus celui du coût du capital que celui du coût du travail.
J'ai donc un autre scénario en tête : créer une assiette patronale large – valeur ajoutée nette ou addition de la masse salariale et de l'impôt sur les sociétés –, cibler le CICE sur l'industrie et rendre la CSG progressive. On peut bien, comme M. Sterdyniak le préconise, utiliser le financement du CICE pour supprimer la cotisation « famille » patronale, mais il n'est pas possible d'étendre ce modèle à l'ensemble du financement de la protection sociale.