Intervention de Nicole Ameline

Séance en hémicycle du 29 octobre 2013 à 21h30
Loi de finances pour 2014 — Débat sur les enjeux budgétaires européens

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicole Ameline :

En effet, le couple franco-allemand a frôlé la rupture ce qui, probablement aurait été un signe de régression absolument historique et très préjudiciable à nos propres intérêts. Cet isolement de la France est préjudiciable, même s’il ne l’empêche en rien d’agir dans d’autres domaines – je veux notamment parler de l’opération conduite au Mali avec courage et clairvoyance par la France, mais là aussi sous le signe de l’isolement. La difficulté de la France à retrouver le chemin de la croissance ne conforte pas notre rôle et notre présence en Europe. Mais je veux croire, monsieur le ministre, à la volonté de votre gouvernement et du Président de la République à redonner à la France toute sa place et tout son rôle.

Je reviendrai rapidement sur les deux ou trois sujets qui font partie des priorités évoquées au sein de l’Europe. Tout d’abord, la question de la PAC. Je partage ce qui vient d’être dit sur le fait que trop souvent, nous examinons l’efficacité européenne à la lumière des retours sur investissement. La politique agricole n’y échappe pas et si l’on peut se féliciter du compromis obtenu à cet égard, force est de constater qu’elle apparaît trop souvent comme une concession politique faite à la France alors qu’elle est un élément stratégique de notre indépendance européenne, de notre souveraineté énergétique, si je puis dire, avec l’alimentation comme matière première, et, surtout, une force de notre économie agricole dans le monde, totalement sous-estimée au regard de l’explosion démographique.

J’évoquerai également la question de la défense. Je sais que cette question intéresse d’abord et avant tout la responsabilité des États, mais la Commission européenne a pris acte de l’insuffisance des avancées technologiques et de la politique industrielle en ce domaine. Il est tout à fait clair que nous avons là un déficit majeur, un déficit politique, un déficit de solidarité tout à fait préoccupant à un moment clé de notre histoire. L’on voit nettement que l’enjeu de la sécurité collective n’est pas pris au niveau et avec l’ampleur qu’il mérite par nos partenaires européens. Nous soutenons l’action du Gouvernement de la France dans sa démarche de mobilisation de nos alliés européens, de l’ensemble des pays européens, en faveur de l’enjeu de sécurité collective, lequel prend une acuité particulière du fait du pivot américain tourné vers l’Asie et de la montée en puissance des groupes extrémistes non étatiques.

À elle seule, la France ne peut, pas même avec son allié britannique, assumer la défense de l’Europe. À cet égard, il faudra revenir aux fondamentaux qui ont porté la construction de l’Europe à son tout début, c’est-à-dire la recherche de la sécurité collective et de la paix, qui reste quoi qu’on en pense un objectif majeur.

Je souhaite revenir sur les investissements de croissance. Nous sommes là au coeur de la responsabilité européenne. Il est tout à fait essentiel qu’à travers les fonds de cohésion, les fonds structurels, les objectifs concernant la jeunesse, la formation, l’éducation, les programmes Erasmus, nous puissions poursuivre dans la consolidation de la culture européenne et de l’apprentissage européen.

Vous avez, monsieur le ministre, parlé cet après-midi de l’économie numérique. Cette activité encore embryonnaire en Europe mériterait d’être immédiatement partagée, si je puis dire. Elle représente un objectif de croissance, un potentiel d’emplois, une capacité industrielle exceptionnels. Dans le domaine de la cybersécurité, par exemple, s’ouvre un champ nouveau qu’il faut absolument investir. J’ai bien noté les intentions du dernier Conseil, mais nous voyons les Conseils se succéder, avec malheureusement trop peu de résultats. Or il faut impérativement que la France prenne toute sa place dans la promotion d’une nouvelle frontière en termes d’emplois, mais aussi de sécurité collective.

Dernier exemple que je souhaite évoquer : celui de la gestion des flux migratoires et de l’asile. Nous sommes aujourd’hui confrontés à des défis nouveaux, d’une ampleur exceptionnelle, qui imposent une réactivité européenne forte. L’Europe doit être au coeur de l’enjeu de renforcement de l’État de droit, de nos règles communes, mais aussi d’ouverture et d’humanité et de respect des valeurs qui font aussi sa force dans le monde. Cette question doit être rapidement traduite par des engagements et une véritable réflexion. On ne peut pas laisser la situation de Lampedusa telle qu’elle est aujourd’hui. Nous savons que l’Europe intervient beaucoup, et j’en suis heureuse, en faveur des camps de réfugiés, des victimes de conflits, mais insuffisamment pour ce qui concerne la clarté dans la gestion des flux migratoires et ce qu’ils sous-tendent en termes de trafic d’êtres humains.

Je terminerai sur les aspects strictement budgétaires du prélèvement sur recettes.

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