Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 29 octobre 2013 à 17h10
Commission élargie : outre-mer

Victorin Lurel, ministre des outre-mer :

Ce serait exceptionnel. Reste que les délais doivent être améliorés et que nous demeurons très vigilants.

Il a ensuite été avancé que l'administration ne disposait pas de moyens de contrôle en matière de défiscalisation de plein droit. Il faudra très rapidement faire appliquer les mesures qui viennent d'être prises. Il s'agit de ne pas donner l'impression, à travers le contrôle, de revenir sur le principe du plein droit. Il convient donc de préserver un équilibre entre le dynamisme économique et le nécessaire contrôle de l'argent public.

L'opposition soupçonne le Gouvernement de vouloir supprimer, à terme, la défiscalisation. Vous voulez réserver le crédit d'impôt aux entreprises réalisant un chiffre d'affaires de plus de 20 millions d'euros. Compte tenu de l'attractivité de ce crédit d'impôt, nous pensons laisser les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur en profiter. Après évaluation en 2016, nous aviserons.

Monsieur Ollier, vous voterez contre l'article 70 du projet de loi de finances mais vous vous trompez sur son impact. Comment peut-on, contrairement à tous les secteurs du territoire national, ne demander aucun effort aux outre-mer pour le redressement des finances publiques du pays au prétexte qu'elles viennent de plus loin – en termes non géographiques mais économiques ? L'équité commande le partage de l'effort. Ce que nous demandons aux outre-mer l'est en stricte conformité avec l'article de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen selon lequel chacun doit donner en fonction de ses facultés contributives.

En outre, comment peut-on soutenir que ce sont les exonérations qui déclenchent le recrutement d'un cadre pour un salaire allant de 4 200 à 6 400 euros ? Ce qui doit déterminer le recrutement est la capacité à remplir la fonction confiée. Quant aux entreprises qui ne bénéficient pas du CICE, très rares, ce sont celles auxquelles ne s'applique pas le régime réel normal ou simplifié – les agriculteurs, les artisans, les associations…, qui ne sont pas concernées par le recentrage.

Monsieur Letchimy, la loi relative à la régulation économique outre-mer a en effet permis de ralentir la hausse des prix, voir de faire baisser ceux des produits alimentaires et de première nécessité, mais ce n'est pas suffisant. Je tiens à ce que l'on s'empare de la loi : ce n'est pas depuis Paris que l'on fera baisser les prix ; on doit pouvoir compter sur une implication de tous et en particulier de la société civile. Que les entreprises s'en emparent, les élus également – un président de région a le même pouvoir que le ministre de l'économie et des finances à Paris. Le président du département pouvait auparavant confier un EPAD à un monopole ; aujourd'hui, le président de région peut demander à l'ADLC une analyse et des recommandations. Il faut également que les organisations de consommateurs se développent dans les outre-mer car elles n'y forment pas un contre-pouvoir – or le pouvoir du consommateur est un vrai pouvoir démocratique. Je n'oublie pas les collectivités. À la Réunion, on a commencé de travailler sur les exclusivités d'importation, sur la manière de fluidifier l'économie, la rendre plus concurrentielle.

Pour ce qui est de la proportion minimale que doit représenter la subvention publique dans le financement des logements sociaux, le seuil de 5 % résulte d'un bon arbitrage – certains ministères demandaient 10 voire 20 %. Et les simulations prévoyant une baisse consécutive des investissements de moitié ne sont pas fondées. Il ne faut pas se montrer trop rigide et le seuil de 5 % me paraît parfaitement compatible avec le nécessaire dynamisme de la construction du logement social.

Il faut tout faire pour respecter l'objectif de 50 % d'énergies renouvelables produites dans les régions ultramarines. Comme ministre, je n'ai pas compris le retournement soudain d'EDF, malgré le poids de l'État dans son capital, et après cinq ou six années d'études cofinancées par les régions de Guadeloupe et de Martinique, l'État et l'Europe, au motif qu'un seuil de rentabilité de plus de 13 % n'était pas atteint – un taux qui, je l'ai dit à M. Proglio, évoque le rendement de fonds de pension et ne paraît pas recevable dans la filière industrielle. Le Gouvernement a pris d'autres engagements, avec d'autres groupes, et étudie la manière dont ce projet, que nous n'entendons pas abandonner, pourrait être repris.

S'agissant de la stabilité fiscale, j'ai répondu qu'elle état assurée jusqu'en 2017.

En ce qui concerne le stockage, je reviens de Mayotte où une expérience mondiale est conduite en vue de résoudre le problème du stockage de l'énergie intermittente. Pour la mener à son terme, il manque toutefois le décret consécutif à l'amendement de Marc Goua visant à rendre les opérateurs gestionnaires de réseau éligibles au financement par la CSPE. Ce type d'action pourrait donner de très beaux résultats dans tous les outre-mer, du moins dans le domaine de l'énergie solaire photovoltaïque.

J'ai personnellement pris part aux ateliers organisés dans le cadre de la conférence sur la transition énergétique ainsi qu'aux débats régionaux, conclus en mon ministère, avec Philippe Martin et en association avec les élus de Corse. Le projet de loi en préparation, qui sera discuté à la fin du second semestre 2014, tiendra compte des propositions formulées, non dans un seul article, mais dans un volet entier consacré à l'outre-mer. Celui-ci fera également l'objet d'un volet – qui pourra prendre la forme d'un chapitre – de la loi agricole ; je suis un peu surpris d'entendre parler d'un seul article. Il est vrai que toutes les dispositions n'y figureront pas, celles relatives aux retraites étant renvoyées à la loi portée par Marisol Touraine. Mais toutes les idées qui ont été proposées et étudiées se retrouveront soit dans la loi agricole, soit dans la loi sur les retraites.

Monsieur Marie-Jeanne, la garde des sceaux a annoncé la création d'un groupe de travail sur les problématiques carcérales outre-mer auquel participent onze parlementaires ultramarins et dans lequel les services de mon ministère sont très impliqués. Les moyens de la justice seront accrus afin de rénover des établissements pénitentiaires. En Nouvelle-Calédonie, la rénovation a déjà commencé au Camp-Est ; en ce qui concerne l'antenne de Koné, une mission de préfiguration doit partir le 6 décembre. J'en ai discuté sur place avec les autorités. Il est également prévu de construire à Koné un centre de courtes peines. À Mayotte, la maison d'arrêt de Majicavo, en reconstruction, doit être livrée fin 2015. En Polynésie française, un nouvel établissement doit être construit fin 2016. En Martinique, l'extension de 160 places du centre de détention est prévue pour fin 2014 et la construction du centre de semi-liberté pour 2015.

Je partage votre constat s'agissant de l'insalubrité et de l'offre de soins aux détenus. Attendons les conclusions de la Cour des comptes, qui prépare un rapport sur le sujet. Quant à l'accès au droit, dont votre rapport ne parle pas mais que vous évoquiez l'année dernière, j'ai accordé à l'Observatoire international des prisons une subvention pour lui permettre de diffuser largement dans les prisons ultramarines son Guide du prisonnier, riche en conseils pratiques très utiles.

En ce qui concerne les mesures alternatives à l'incarcération, nous développons aussi outre-mer le placement sous surveillance électronique. En 2013, 9,6 % des condamnés, soit 545 détenus, ont bénéficié d'un régime de semi-liberté en milieu ouvert. La Guadeloupe ne dispose d'aucun quartier pour les mineurs, ce qui pose un véritable problème. Une proposition a été formulée, que le Gouvernement examine, en vue de créer un centre éducatif fermé et de transformer le CEF de Port-Louis en quartier pour mineurs, ce qui nécessite quelques moyens supplémentaires.

Afin de remédier au peu d'intimité dont souffrent les détenus lorsqu'ils rencontrent leur famille, les établissements en construction – en Polynésie comme dans l'établissement de Majicavo, à Mayotte – seront dotés d'unités de vie familiale etou de parloirs pour les familles, selon tous les plans qui ont été présentés jusqu'ici. Par ailleurs, dans le cadre du triennal 2014-2016, des crédits seront prévus pour les établissements suivants : Baie-Mahault, Le Port, Rémire-Montjoly, Nouméa, Ducos, Faa'a et Saint-Denis.

Monsieur Dosière, les crédits augmentent en effet de 2 % pour la Nouvelle-Calédonie. Nous avons étudié vos rapports de près et nous en tenons compte.

Vous estimez qu'en Polynésie les comptes ne seraient pas sincères…

M. René Dosière, rapporteur pour avis. C'est la chambre territoriale des comptes qui le dit depuis 2006, monsieur le ministre !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion