Intervention de Victorin Lurel

Réunion du 29 octobre 2013 à 17h10
Commission élargie : outre-mer

Victorin Lurel, ministre des outre-mer :

Aujourd'hui, nous moralisons et nous encadrons le système. Deux dispositifs expérimentaux de crédits d'impôt sont également mis en place en faveur des entreprises.

En matière fiscale, une concertation approfondie et inédite a bien eu lieu. La mesure relative aux seuils d'exonérations de charges est bonne ; le reste, c'est une tempête dans un verre d'eau.

Monsieur Aboubacar, vous dites que Mayotte est un département « paradoxal » : c'est une expression séduisante, même si je ne la reprends pas à mon compte…

Quelques doutes planent effectivement sur la capacité de Mayotte à consommer les crédits. Mais nous voulons qu'ils soient utilisés. Nous souhaitons que la clause de revoyure évoquée par Didier Quentin soit l'occasion pour l'Europe de revaloriser les crédits, et de se rapprocher, sur la base de critères objectifs, des 400 millions, voire 450 millions, que nous attendions. Mais n'oublions pas qu'aux 224 millions que vous évoquez, 117 autres millions de diverses origines viennent s'ajouter. Il n'y a donc aucune inquiétude à avoir.

S'agissant du foncier, le dispositif FRAFU, vous avez raison, est applicable en théorie à Mayotte depuis 2009 : nous avons bon espoir de publier avant la fin de l'année le texte qui le mettra réellement en place. Le texte consacré à l'établissement public foncier d'État (EPFE) devrait lui aussi être publié avant la fin de l'année. Enfin, le Parlement vient d'adopter un texte qui modifie la procédure de titrement et instaure un groupement d'intérêt public (GIP) par territoire – la LODEOM avait prévu un seul GIP pour l'ensemble des outre-mer, mais cela ne fonctionnait pas. Je n'ai pas ici les détails concernant Mayotte : l'EPFE peut s'emparer de la question et demander à mener cette mission de titrement, pour faire cesser le fléau de l'indivision.

Enfin, s'agissant de la fonction publique, le décret sur l'indexation a bien été pris. Quant à l'indemnité d'éloignement, on peut comprendre les demandes sur les impôts payés en 2014 sur les revenus de 2013, mais à partir des revenus de 2014, il faudra payer… J'espère que ces précisions seront de nature à calmer les inquiétudes qui se manifestent dans votre département.

Madame Descamps-Crosnier, j'ai déjà répondu sur la ZEE : c'est effectivement un enjeu stratégique considérable, et nous nous donnerons les moyens de préserver notre souveraineté.

En matière de biodiversité, les ressources des outre-mer sont considérables – 85 à 90 % de la biodiversité française. La chimie verte ne nous effraie pas, c'est même l'un des axes de développement privilégié par le Gouvernement.

S'agissant des limites territoriales, c'est un vrai sujet, sur lequel nous avons effectivement pris du retard. M. Gérard Grignon, aujourd'hui membre du Conseil économique, social et environnemental a rendu un très bon rapport sur ces questions. Il faut faire vite. Nous avons en particulier de petits différends avec l'Australie et le Vanuatu, dont j'espère qu'ils seront réglés.

Enfin, le FEI doit permettre de rattraper le retard ultramarin en matière d'équipements structurants – assainissement, eau potable, traitement des déchets… En 2013, nous avons financé 44 projets pour environ 48 millions d'euros. Le Président de la République s'est engagé sur 500 millions d'euros pour rattraper le retard pris aux cours de la dernière décennie ; l'effort pourra être amplifié si la croissance revient. Mais les sommes que nous avons obtenues sont déjà remarquables.

Madame Bareigts, j'entends vos propositions. Sur les exonérations de charges patronales pour les secteurs renforcés, il ne m'appartient pas de m'engager ; en revanche, les zones franches d'activités arrivent à échéance en 2017 : nous réfléchissons donc aux meilleurs moyens de continuer à aider ces territoires. C'est une partie difficile que nous jouons ; des réunions interministérielles sont en cours.

Enfin, je veux préciser que le CICE représente 320 millions donnés aux outre-mer. Ce n'est pas une faveur ! Et je tiens à dire que le CICE n'est pas financé par une augmentation de la TVA.

Monsieur Gibbes, merci de vos propos. J'ai reçu hier une mission, conduite par M. Marc-René Bayle, qui se rend chez vous et dans les îles du nord, pour travailler sur les problèmes de déséquilibres structurels créés par la convention fiscale en vigueur ; s'il le faut, nous modifierons la loi organique. Aujourd'hui, en effet, Saint-Martin a du mal à faire face à ses charges. Quant à Saint-Barthélemy, très riche pour certains, elle a l'impression d'acheter son autonomie en payant chaque année 6 millions d'euros à l'État. La parité économique avec la partie néerlandaise de l'île de Saint-Martin pose en particulier problème.

L'environnement économique des Caraïbes est en effet complexe ; la concurrence y est très forte. Dans la partie néerlandaise de Saint-Martin, il y a quinze casinos, mais aucun dans la partie française… Lorsque nous avons libéralisé les jeux en ligne, j'avais fait remarquer qu'Antigua comptait un millier de casinos en ligne ! Les États-Unis ont d'ailleurs porté plainte devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Dans une république à organisation décentralisée comme la nôtre, ne pourrait-on pas – je sais que cette proposition va choquer – faciliter l'implantation de casinos ? Bien sûr, il faut lutter contre l'argent sale, contre les trafics. Mais ces casinos si proches et si nombreux mettent en danger notre attractivité.

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