Intervention de Danielle Auroi

Réunion du 22 octobre 2013 à 17h15
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanielle Auroi, présidente :

Au moment où l'Assemblée nationale s'apprête à débattre du projet de loi de ratification de l'accord franco-italien sur le tunnel Lyon-Turin, il m'est apparu nécessaire d'organiser une table ronde, dans le cadre de notre commission des affaires européennes, pour éclairer notre assemblée sur les aspects européens de cette question, en mettant en lumière les forces et les faiblesses du projet et les interrogations qui demeurent.

La liaison Lyon-Turin figure parmi les neuf corridors transeuropéens récemment annoncés, et précisés le 17 octobre par le commissaire Siim Kallas. Il est prévu de créer 15 000 kilomètres de voies ferrées à grande vitesse destinées à relier les principaux centres économiques de l'Union européenne, et de développer 35 projets d'infrastructures transfrontalières, dont celui qui nous occupe aujourd'hui.

Les besoins globaux de financement pour la période 2014-2020 s'élèvent à quelque 250 milliards d'euros, qui intègrent un financement de 26 milliards d'euros prévu dans le budget européen ; c'est un effort important dans le cadre du prochain cadre financier pluriannuel. Notre commission a d'ailleurs défendu à ce propos, sur le rapport de notre collègue Gilles Savary le projet initial de la Commission européenne, plus ambitieux puisqu'il prévoyait 31,5 milliards d'euros au lieu des 26 milliards retenus. Le compromis trouvé au Conseil, entre États, n'a malheureusement pas permis de retenir la proposition initiale de la Commission. On saluera néanmoins le fait que le financement prévu pour la période 2014-2020 soit triplé par rapport à la programmation pluriannuelle en cours.

La seule liaison Lyon-Turin implique un budget de 8,5 milliards d'euros pour percer et aménager le tunnel, long de 57 kilomètres. L'Union européenne apportera 3,4 milliards d'euros, la France 2,2 milliards et l'Italie 2,9 milliards. Le grand chantier devrait débuter en 2015 et durer une dizaine d'années.

Mme Anne Houtman, qui dirige la représentation de la Commission européenne en France, précisera la contribution européenne en la situant dans la perspective de la politique structurante essentielle que constitue le réseau transeuropéen de transport, sur lequel notre collègue Gilles Savary nous a présenté son rapport en février dernier. Elle indiquera les priorités que les décisions prises impliquent, s'agissant notamment de la préoccupation du développement durable.

Je suis, cela va de soi, extrêmement favorable à une politique de report modal du trafic routier au profit du ferroviaire. Néanmoins, les ressources financières de l'Union européenne et des États sont particulièrement contraintes ; nous devons veiller à ce qu'elles soient employées au mieux pour développer des modes de transport qui soient le moins polluant possible et rationnels sur le plan économique. Dans ce contexte, ce projet suscite des inquiétudes et des interrogations, exprimées dans un référé adressé par la Cour des comptes au Premier ministre, le 1er août 2012. M. Christian Descheemaeker, qui a été président de la 7eme chambre de la Cour des comptes, a eu à débattre de ce référé qui pose des questions essentielles à mes yeux. Je cite la Cour : « Il apparaît que d'autres solution techniques alternatives moins coûteuses ont été écartées sans avoir toutes été complètement explorées de façon approfondie. (…) Pour la Cour, le pilotage de cette opération ne répond pas aux exigences de rigueur nécessaires dans la conduite d'un projet d'infrastructures de cette ampleur et de cette complexité. (…) L'estimation du coût global du projet, y compris les accès, est passée en euros courants de 12 milliards d'euros en 2002 à (…) 26,1 milliards d'euros. (…) La valeur actualisée nette économique est négative dans tous les scénarios envisagés. » En conclusion, la Cour des Comptes recommandait « de ne pas fermer trop rapidement l'alternative consistant à améliorer la ligne existante et, si le projet doit être poursuivi, d'étudier les mesures éventuellement contraignantes de report du trafic transalpin de la route vers la voie ferrée. »

Outre Mme Anne Houtman et M. Christian Descheemaeker, interviendront M. Hubert du Mesnil, président du conseil d'administration de Lyon-Turin Ferroviaire et M. François Lépine, vice-président délégué du Comité pour la Transalpine, qui nous présenteront, j'imagine, des arguments favorables à la construction du tunnel Lyon-Turin. Je suppose que l'opinion de M. Daniel Ibanez, qui représente la Coordination des opposants au projet Lyon-Turin, sera plus circonspecte. Ensuite viendra le temps des questions et réponses.

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