Intervention de Dominique Dord

Réunion du 22 octobre 2013 à 17h15
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Dord :

Le projet de ligne ferroviaire entre Lyon et Turin est venu devant l'Assemblée nationale une première fois en 2002 à l'occasion de l'examen du projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre la France et l'Italie. À l'époque, on nous a dit : « Il faut le faire car le trafic de marchandises dans les Alpes françaises va tripler ; le projet coûtera 12 milliards d'euros ; l'objectif est de reporter 300 000 camions de la route vers le rail ; le projet sera mené à bien lorsque la ligne existante sera saturée ».

Le dossier revient devant nous maintenant. Or, en 2013, le trafic n'a pas augmenté dans les Alpes françaises ; le coût du projet est passé de 12 à 26 milliards d'euros ; le Premier ministre a réduit l'ambition de report modal à 500 000 camions sur les quatre autoroutes ferroviaires de l'ensemble du territoire – c'est dire que l'on est assez loin de l'ambition de 300 000 camions sur le seul tronçon Lyon-Turin – et l'on a oublié de parler de la saturation des lignes existantes.

Ce projet coûtera au bas mot 15 milliards d'euros à la France, et davantage si l'on intègre le coût du contournement de Lyon. Ayant lu le rapport de la Cour des comptes, je m'interroge sur l'utilité même de cette réalisation puisque la réalité contredit les hypothèses formulées dans les années 1980. Le monde a changé, les marchandises sont importées de Chine et, à supposer qu'elles l'aient jamais fait, elles n'empruntent plus le corridor Est-Ouest. Ayant été débarquées à Gênes, pourquoi transiteraient-elles par Turin puis par Lyon ? On nous dit que le fret pourrait aussi venir de la péninsule ibérique mais, en région Provence-Alpes-Côte d'Azur, on fait la promotion des autoroutes de la mer, qui sont des outils au moins aussi écologiques que la ligne ferroviaire Lyon-Turin.

La France va s'engager à hauteur de 15 milliards d'euros ; comment trouver cet argent ? Mme Anne Houtman a évoqué de nouveaux instruments financiers ; il pourrait s'agir de projects bonds, mais il faudrait pour cela que le projet soit rentable et M. Christian Descheemaeker a rappelé que sa rentabilité n'est pas assurée. C'est donc la garantie des États qui apportera cette rentabilité – une nouvelle dépense publique, à une période où cela ne semble pas possible. Enfin, l'incertitude demeure sur le financement européen du projet, et plus précisément sur l'assiette des 40 % de subvention communautaire annoncés. Si le coût du tunnel n'est finalement pas de 8,5 milliards d'euros mais de 10 milliards, l'Union européenne financera-t-elle ce surplus à hauteur de 40 % ? D'autre part, le co-financement porte-t-il sur le seul tunnel ou sur l'ensemble de la section dite internationale ? Il me semblait que la doctrine communautaire était de s'arrêter aux noeuds transeuropéens de transport, c'est-à-dire, pour ce qui concerne la France, à Saint-Jean-de-Maurienne, ce qui exclut donc les tunnels de Belledonne et du Glandon. Qu'en est-il ?

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