Intervention de Claudine Schmid

Réunion du 29 octobre 2013 à 17h15
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaudine Schmid, rapporteure pour avis :

Il n'y a pas de partage des 100 millions d'euros du programme 411 entre le ministère de l'éducation nationale et celui des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative : seul le second pilotera l'utilisation de ce montant. Mais, dans sa brochure de présentation du budget, le ministère de l'éducation exerce une amicale pression en suggérant que cet argent pourrait être utilisé intelligemment en partenariat entre les deux départements. Il conviendra donc que notre commission suive attentivement l'emploi de ces sommes.

Ce programme m'inquiète surtout par sa complexité. Après avoir écouté les réponses que l'on nous a faites dans les deux commissions élargies, je ne saisis toujours pas quelle est la nature des projets qui pourraient bénéficier de ces 100 millions d'euros de soutien. J'ai redemandé au ministère des éclaircissements, dans le dessein d'aider les élus et les réseaux associatifs à monter les projets.

Par ailleurs, si la ministre a sanctuarisé les postes de cadres techniques et sportifs dans le budget pour 2014, je veux alerter la commission à propos du discours tenu par certaines fédérations, qui estiment que ces cadres ne correspondent plus à leurs besoins en matière d'encadrement et d'entraînement, et qui préfèrent faire appel à des entraîneurs évoluant dans le privé. Il conviendra peut-être de revisiter les fonctions des cadres techniques pour maintenir l'excellence qui était la leur jusqu'à présent.

S'agissant de la lutte contre le dopage, les crédits sont maintenus. Je crois toutefois que l'action de l'Agence mondiale antidopage perd un peu en intensité. Selon moi, le financement doit essentiellement servir à aider la recherche. Si nous voulons gagner la course-poursuite à laquelle nous contraint l'apparition constante de nouveaux produits dopants, il faut que nos laboratoires – au premier rang desquels l'excellent laboratoire national de détection du dopage de Châtenay-Malabry, qui a découvert notamment comment détecter l'EPO – dispose des financements nécessaires.

Je n'ai rien contre le service civique, monsieur Le Mèner. Le problème, c'est de se donner les moyens d'atteindre l'objectif de 100 000 jeunes volontaires en 2017. Soit nous suivons les voies envisagées par le président de l'Agence du service civique, M. Martin Hirsch, notamment pour réduire la durée ou l'indemnité de certains services – mais il me semble problématique de créer plusieurs services civiques de nature et de valeur différentes –, soit nous accordons les crédits nécessaires au financement du dispositif, ce qui nécessite une augmentation de la ligne « Actions en faveur de la jeunesse et de l'éducation populaire », car il est exclu que cette montée en puissance se fasse au détriment des associations évoluant dans ces domaines.

S'agissant du budget de la jeunesse, des sports et de la vie associative, le réquisitoire porte sur les décennies passées. Lors de son examen, c'est le même « choeur des pleureuses » qui se fait entendre tous les ans, sur tous les bancs de l'Assemblée nationale. Or on ne peut demander à ce petit budget d'être à la fois un facteur de cohésion sociale, un instrument de lutte contre l'exclusion et de résolution des problèmes des quartiers difficiles, un élément de promotion de la mixité, et ainsi de suite, si l'on en reste à ces montants et si l'on prive le ministère de son personnel. Comment voulez-vous qu'une ministre fasse passer ses objectifs si elle ne dispose pas d'une administration qui s'y consacre pleinement ?

Je n'appelle pas à critiquer tel ou tel. Des promesses, tout le monde en a fait ! M. Sarkozy s'était même engagé devant le CNOSF à allouer à la jeunesse et aux sports 3 % du budget de l'État. Aussi notre commission doit-elle insister auprès du Gouvernement pour qu'il revisite ce budget dans les prochaines années afin de redonner au ministère sa capacité d'initiative. C'est parce que celui-ci est privé de marges de manoeuvre qu'il fait du ciblage à tout prix, essayant de tirer quelques subsides de la politique de la ville pour soutenir les associations de proximité au détriment des grands réseaux, ou pour aménager un terrain de proximité au détriment du club local, ce qui aboutit à enfermer les jeunes et les associations dans leurs quartiers alors que la politique dont nous avons besoin doit se développer au niveau du territoire.

Ce matin même, d'ailleurs, j'ai entendu le ministre délégué chargé de la ville demander qu'on arrête le ciblage excessif et que l'on mène la politique de la ville au niveau du territoire de la commune. Cela devrait inciter le ministère des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative à élargir l'aide au financement des associations. L'« hyper-ciblage » est source de problèmes : si l'on dit, par exemple, que la question des femmes est prioritaire, toute association ou tout club sportif ayant besoin de moyens saura monter un projet dirigé vers les femmes. Quant à la réalité de la mise en oeuvre de ces projets, mieux vaudrait y regarder de plus près !

Il me paraît plus efficace, sur le long terme, de faire confiance aux associations et aux clubs en leur assurant un budget de fonctionnement, quitte à discuter ensuite, lors des conventionnements, de la réalité de leur action.

Je pense aussi que ce ministère peut être une source d'emploi dans la mesure où il comprend différents métiers en son sein et propose des formations à ces métiers. Après l'expérience des emplois jeunes, il se place de façon satisfaisante sur les emplois d'avenir, précisément parce qu'il a encore la capacité de former ces jeunes et de les accueillir dans les associations. Si nous remettons en cause les moyens de formation du ministère et si nous diminuons encore les subventions aux associations, celles-ci ne pourront plus accueillir ces emplois.

Je précise que toutes les associations nous ont dit qu'elles avaient besoin d'emplois qualifiés, tant pour leur fonctionnement que pour l'accueil des emplois d'avenir. On ne peut résoudre la question de l'emploi dans le milieu associatif par les seuls emplois aidés. Il faut aussi des emplois qualifiés, et c'est là le rôle du FONJEP.

Concernant l'accès de tous aux retransmissions sportives à la télévision, Monsieur Hetzel, on peut, bien sûr, élargir par décret la liste des événements d'importance majeure. Mme Fourneyron y travaille avec la ministre de la culture et de la communication. Mais la question principale est celle de la régulation. Si, comme c'est le cas aujourd'hui, certaines fédérations – en nombre limité, il est vrai – essaient d'asseoir leur budget presque exclusivement sur les droits télévisuels, elles créent un cercle vicieux en faisant monter des enchères que la télévision publique ne peut suivre. Le budget des droits de retransmissions sportives de France Télévisions diminuera de 10 millions d'euros en 2014. Ce sont donc des chaînes comme BeIN Sport qui, à la suite de Canal Plus qui s'affronte maintenant à plus gros que lui, achètent les droits.

La régulation des droits télévisuels est un sujet important. Comment les cinq ou six fédérations en cause pourraient-elles construire leur budget pour réguler le montant de ces droits ?

S'agissant de la taxe « Buffet », j'attends les propositions que feront les deux ministres concernées. Pour les droits signés à l'étranger mais qui concernent des événements se déroulant en France, on se dirige vers un règlement de la taxe par les seuls télédiffuseurs, ce qui entraîne de vives protestations de leur part. Je souhaite, pour ma part, que l'on s'en tienne à l'esprit de cette taxe, qui vise à ce que le sport professionnel contribue au financement du sport amateur.

Pour ce qui est des licences, monsieur Apparu, on ne résoudra le problème de la circulation de l'argent dans les fédérations que si l'on franchit le pas démocratique que j'évoquais en introduction.

Aujourd'hui, la vie d'une fédération est réglée par des élections et des cooptations. Le licencié et le bénévole n'ont guère leur mot à dire sur les grandes orientations fédérales, notamment en matière de financement. Tant que l'on n'aura pas donné davantage la parole aux acteurs du mouvement sportif, je ne vois pas comment on pourra faire bouger la répartition des coûts et de l'argent dans les fédérations.

Vous avez raison, monsieur Huet : la Ligue 1 ne se résume pas au Paris-Saint-Germain, à Monaco et à Marseille. Nous l'avons d'ailleurs constaté en préparant, avec vous-même, M. Braillard et M. Deguilhem, notre rapport d'information sur le fair-play financier. Certains clubs sont en grande difficulté. Nous avons vu ce qui s'est passé au Mans et nous connaissons la grande fragilité d'un club comme celui de Lille. Mais ce n'est pas la taxe à 75 % qui les a plongés dans ces difficultés : c'est le poids de la masse salariale dans leur budget. Tant que l'on n'aura pas établi une régulation des salaires, en fixant notamment un salaire plafond, tant que l'on n'aura pas limité les transferts à une seule période par année et non à deux, tant que les agents sportifs ne seront pas rétribués par les seuls joueurs, nos clubs continueront à éprouver ces difficultés.

À moins que l'on n'espère que tous soient rachetés par des fonds, à l'instar du PSG ou de l'AS Monaco ! Lors de leur audition, nous avons demandé aux équipes dirigeantes de ces deux clubs si elles avaient une garantie sur la pérennité de l'engagement de leurs investisseurs qataris ou russes. Elles n'en ont aucune. Tout peut s'écrouler demain.

C'est bien pourquoi il faut reconstruire les budgets des clubs de football professionnel sur des bases différentes. J'espère que les préconisations adoptées sur ce sujet à l'unanimité par notre commission seront suivies d'effets, notamment dans le projet de loi de programmation et d'orientation du sport.

Enfin, je pense que l'organisation de grandes compétitions internationales dans notre pays est indispensable au développement de l'envie de sport chez les enfants et les jeunes. Chaque fois que nous accueillons un grand événement sportif, la pratique sportive de tous y gagne. Il n'y a nullement opposition entre ces deux aspects. Mais il faudra un jour oser interroger les fédérations internationales sur les conditions qu'elles exigent des pays pour qu'ils puissent accueillir une compétition internationale. Le nombre de pays candidats à l'organisation de certains événements diminue, car cela leur devient inaccessible. Lors des Jeux olympiques d'Athènes, le Comité international olympique avait réfléchi aux moyens de mettre les Jeux à la portée d'un plus grand nombre de pays. Cette réflexion a volé en éclats et la course au gigantisme a repris. Je souhaite néanmoins que la France se batte pour obtenir des compétitions.

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