Je remercie MM. les rapporteurs d'avoir souligné que, pour limité qu'il soit, le budget de la mission « Politique des territoires » a un fort effet de levier sur les territoires. C'est d'ailleurs dans cet état d'esprit que j'ai proposé de maintenir en 2014 le dispositif de la prime à l'aménagement du territoire (PAT), qui a vocation à soutenir des initiatives privées et à maintenir l'emploi dans les entreprises. S'agissant d'une aide directe, cette prime constitue un outil fort utile en période de crise puisqu'il permet à la DATAR qui instruit les dossiers d'être très réactive. En lien étroit avec le ministère du redressement productif, le ministère de l'égalité des territoires s'efforce d'affermir la vocation territoriale de la PAT, d'en faire un outil de structuration des territoires et de renforcement du tissu en ciblant en priorité les PME. Ce ciblage renforcé est l'évolution la plus significative que je souhaite imprimer à ce dispositif, en cohérence avec l'évolution du zonage AFR, dont les modalités d'application seront modifiées en 2014.
Le Commissariat général à l'égalité des territoires, dont je salue le préfigurateur M. Éric Delzant, permettra de mettre en cohérence les interventions de l'État sur les territoires, trente ans après le début de la décentralisation. Les outils que l'État avait conservés avaient certes une utilité mais, au lieu d'être utilisés à des fins de co-élaboration et de soutien aux dynamiques territoriales, ils étaient concentrés sur certains territoires ou certaines problématiques. Le CGET aura pour mission d'oeuvrer à la réduction des inégalités territoriales et des inégalités infrarégionales qui se sont accrues ces dernières années. Cette mission, il la remplira en appuyant certains projets, en travaillant sur la nouvelle génération des contrats de plan État-régions qui sera caractérisée par deux éléments importants : les volets territoriaux, dont une partie est dédiée aux territoires meurtris ou plus fragiles vis-à-vis desquels la solidarité nationale doit s'exercer ; la transition énergétique et écologique des territoires, pour laquelle l'association de l'État et des différentes collectivités sera décisive.
S'agissant du zonage ZRR, le bug de cet été était la conséquence d'une concertation sur les critères avec l'ensemble des associations d'élus, dont l'impact direct et l'effet de masse potentiel sur certains territoires n'avaient pas été mesurés. La concertation se poursuivra sous l'égide de la DATAR et de mon ministère, et une mission inter-inspections va être lancée pour éviter que de telles révisions de zonage n'aboutissent à malmener des territoires. Devrait également être soumise à réflexion la possibilité d'une sortie progressive du système que la loi ne prévoit pas. Une phase intermédiaire pourrait se révéler opportune pour des territoires qui, ayant bénéficié du dispositif, sont en train de s'inscrire dans une dynamique autonome. Or une telle phase est impossible aujourd'hui : nous avons choisi de maintenir le dispositif dans son intégralité pour l'année 2014, afin de ne pas risquer de voir basculer des territoires qui avaient utilement bénéficié du dispositif pendant ces années. Nous devons avoir cette réflexion sur la nécessaire évolution du dispositif et sur la question de la sortie progressive, et nous souhaitons qu'un consensus se dégage, même s'il est toujours compliqué à obtenir.
Le rapprochement entre l'AFII et Ubifrance ne met pas en péril la mission d'attractivité des territoires. L'AFII a été chargée de rechercher des entreprises internationales dans des domaines en rapport avec les territoires ruraux à des fins de développement. C'est ainsi que le vaste travail engagé par le Gouvernement autour de la filière bois peut trouver des prolongements dans des partenariats à l'international. Le démarchage des entreprises en lien avec les activités des territoires ruraux n'était certes pas inscrit au patrimoine culturel commun des deux agences, mais c'est un aspect sur lequel travaillons. Nous nous attachons également à leur faire intégrer que la mission d'attractivité concerne tous les territoires, quelles que soient leurs spécificités. Il est inimaginable que l'attractivité de nos seules métropoles puisse être un facteur de développement durable et soutenable pour l'ensemble de notre pays. Si une attention particulière doit effectivement être portée aux métropoles, nous devons également être très conscients de la complémentarité et des potentialités autonomes de développement de territoires qui peuvent apparaître aujourd'hui comme délaissés. Nous ne pouvons pas considérer que les territoires ruraux ou hyper-ruraux, voire les villes moyennes n'aient qu'un statut récréatif ou de seconde zone. Il est essentiel que chaque territoire ait les moyens et les capacités de son développement, et nous y travaillons.
Je m'étais d'ailleurs engagée devant vous, l'année dernière, à travailler sur la problématique spécifique des bourgs ruraux. Le travail arrive à son terme et il fera l'objet d'une communication du Premier ministre. De même que, à une échelle différente bien sûr, l'ANRU intervient sur les quartiers relevant de la politique de la ville, nous devons agir contre la nécrose et la déprise des bourgs ruraux, qui placent certains territoires dans des situations malaisées et leurs élus dans une très grande solitude. Cela implique de traiter les questions d'ingénierie globale, y compris en matière d'habitat, et l'appui à ces territoires.
S'agissant des pôles territoriaux de coopération économique, les deux rapporteurs ont souligné les limites de l'appel à projet. Celui-ci n'est pas au coeur de la mission « Égalité des territoires, logement et ville », nous lui avons préféré des dispositifs très ouverts. Néanmoins, nous l'avons choisi comme une première étape. Ces pôles territoriaux de coopération vont permettre d'appuyer des dynamiques naissantes sur les territoires – à condition, effectivement, que ces dynamiques existent. Si nous constatons que le dispositif peut aller plus loin, nous le ferons. Les PTCE sont d'ailleurs inscrits dans le projet de loi relatif à l'économie sociale et solidaire comme un nouveau mode d'irrigation du territoire, en complémentarité avec les pôles de compétitivité. C'est une autre logique qui fonctionne, qui donne des résultats, et qui permet aux PME de tisser beaucoup de relations sur le territoire.
La présence des services publics est un élément primordial dans l'amélioration de la qualité de vie quotidienne des populations, qui figure parmi les objectifs majeurs que je me suis fixés. Le Gouvernement a poursuivi le travail autour du dispositif « Plus de services au public », qui a fait l'objet d'une évaluation positive. Après la phase d'expérimentation, nous devons passer à la généralisation d'un maillage de services publics sur l'ensemble du territoire, en intervenant selon deux modalités. Il faut d'abord se fonder sur le deuxième projet de loi porté par Marylise Lebranchu, qui introduit un schéma de services publics départementaux et s'appuie sur une vision territoriale, et non plus en silos – opérateur par opérateur, service public par service public –, à l'origine de bien des dégâts. Après avoir travaillé sur une carte et un maillage à l'échelle du territoire, nous inviterons les collectivités qui le souhaiteront à participer à l'établissement des schémas départementaux avant que la loi ne les y oblige. C'est une nouvelle méthode de travail législatif que nous expérimentons déjà dans le cadre de la loi ALUR s'agissant de la garantie universelle des loyers. Le travail ainsi mené avec les départements volontaires viendra nourrir utilement la discussion parlementaire qui suivra. Outre les conseils généraux, nous discutons également avec l'ensemble des opérateurs que je réunirai lundi 4 novembre avec, à l'ordre du jour, la généralisation des maisons de services au public et l'établissement d'un calendrier de travail pour la création et l'alimentation du fonds consacré à la mise en oeuvre de ces maisons. J'échangerai également avec eux sur les limites et les bénéfices de la mutualisation.
L'idéal serait d'avoir une maison de services au public au moins dans chaque chef-lieu de canton, de manière à instaurer une véritable proximité. Celle-ci serait assurée par une présence humaine et par l'accès au haut débit ou au très haut débit et aux nouveaux usages du numérique. Tout le sens des schémas départementaux d'accès aux services publics est de reposer non pas sur la carte électorale ou sur une quelconque carte existante, mais sur un maillage pertinent qui permet de répondre aux difficultés géographiques et d'accès rencontrées par les usagers. C'est aussi de basculer d'une logique opérateur par opérateur à une logique de lien entre habitants et services publics en mixant présence humaine et généralisation des guichets vidéonumériques qui permettent d'avoir accès directement à un interlocuteur de l'opérateur demandé de bon niveau, sans avoir besoin de parcourir des kilomètres.
Si nous nous engageons avec succès dans cette démarche, nous répondrons à un enjeu majeur : celui du retour des services publics. Il s'agit non pas de revenir à un modèle antérieur, mais de construire l'avenir, en tirant le meilleur parti du maillage à très haut débit, d'une part, et en rapprochant physiquement les services publics des citoyens, d'autre part. Nous avons cru, à tort, que l'accès individuel aux services publics depuis le domicile de chacun grâce au très haut débit constituerait une solution. Or, un rapport du Conseil économique, social et environnemental l'a montré : le contact humain est indispensable. Nous devons développer les maisons de services au public qui permettent d'insuffler une nouvelle vie dans les territoires où elles s'installent, notamment dans les bourgs ruraux. La simple présence, au coeur d'un bourg, d'un bâtiment sur lequel figurent les logos de plusieurs services publics, fait toute la différence.
S'agissant de l'action « Dynamisation de la filière bois en Auvergne-Limousin-Bourgogne », elle sera inscrite au PITE non pas en 2014, mais en 2015.
Les grandes orientations en matière de déploiement du très haut débit ont été annoncées par le Président de la République le 20 février dernier. L'objectif est de couvrir l'ensemble du territoire le plus rapidement possible et, au plus tard, d'ici à dix ans. Le total des investissements publics et privés s'élèvera à 20 milliards d'euros. Un tiers de ce montant sera consacré aux zones denses, où le déploiement sera financé exclusivement par les opérateurs privés. L'État veillera à ce que les opérateurs respectent les engagements qu'ils ont déjà pris à cet égard. Un autre tiers concernera les zones moins denses, où le déploiement sera cofinancé par les opérateurs, les collectivités territoriales et l'État. Le derniers tiers sera dédié aux zones les moins denses, en particulier aux territoires hyper-ruraux, où le déploiement sera pris en charge par l'État et les collectivités territoriales.
Dans les zones peu denses, la participation de l'État sera modulée selon un mécanisme de péréquation très favorable aux territoires ruraux : elle représentera 33 à 62 % du financement public en fonction des départements – la moyenne s'établissant à 50 %. En outre, une bonification permettra de prendre en compte les contraintes spécifiques des outre-mer. Un bonus sera également accordé aux projets pluridépartementaux. Au total, d'ici à 2017, 4,3 milliards d'euros de financements publics seront mobilisés pour le déploiement du très haut débit.
Par ailleurs, Claudy Lebreton, président de l'Assemblée des départements de France, m'a remis un rapport sur les usages du numérique. Il me paraît essentiel que les collectivités territoriales puissent anticiper ces usages.