Intervention de Yves Charpenel

Réunion du 30 octobre 2013 à 16h00
Commission spéciale pour l'examen de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel

Yves Charpenel, président de la fondation Scelles :

La prostitution en échange de drogues remonte à plus de vingt ans. Ayant été procureur en région parisienne et directeur des affaires criminelles, je sais que, quand on n'a plus que soi à vendre pour se procurer de la drogue, on se vend. Il faut d'ailleurs être conscient que les trafiquants sont les principaux chatters pour repérer les victimes potentielles et nous nous inquiétons de voir apparaître des dossiers franco-français. Il s'agit de dealers de banlieue qui montent en grade dans la criminalité organisée : après la drogue, les armes et la traite d'êtres humains qui sont souvent liées. Ils créent ainsi des réseaux avec le premier « produit » qu'ils ont sous la main, les malheureuses jeunes femmes victimes de violences sexuelles et déjà toxicomanes. Les rapports parlementaires sur le sujet l'ont souligné. L'usage de stupéfiants est généralisé parmi les prostituées parce que leur condition est insupportable. Ils leur permettent de tenir autrement qu'avec un couteau sous la gorge.

S'agissant d'une loi, nous avons déjà plus de 12 000 lois en matière pénale. C'est beaucoup, mais rajouter dans le code de procédure pénale la traite des êtres humains à fin de proxénétisme parmi les infractions éligibles aux moyens spéciaux d'enquête ne serait pas un bouleversement. Le plus important est de donner ensuite les directives de politique pénale pour expliquer les stratégies procédurales à suivre quand on a identifié la victime potentielle d'un trafic. En la matière, la dernière instruction donnée aux procureurs remonte à 2005. Depuis, les choses ont évolué. Les Roumains utilisent déjà l'infiltration, sachant qu'il leur est plus facile d'y recourir que pour nous qui avons affaire à des réseaux étrangers, mais un cybergendarme ou un cyberpolicier peut le faire. Le coût législatif serait modeste pour une avancée importante, pour peu qu'elle soit mise en oeuvre ensuite.

De même, pour le recouvrement des biens, des modifications très mineures suffiraient pour donner des armes plus affûtées et mieux adaptées à cette forme de criminalité.

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