Monsieur Tout-le-monde… Je travaille en milieu carcéral : les détenus sont tous des Monsieur Tout-le-Monde, et sans doute aurais-je fui bien souvent si j'avais su ce que tel ou tel avait fait. Il n'y a guère qu'à la télévision que les méchants ont toujours une sale tête…
En ce qui concerne le rapport entre viol et prostitution, je rejoins Rozenn. Le violeur cherche le viol. S'il va voir une prostituée, il ne s'agit plus d'un viol. Or ce qui le fait fantasmer, ce qui lui donne du plaisir, c'est bien d'agresser. Étant en prise avec le terrain, je me dois tout de même de préciser – sans parler de pardon – que les agresseurs sont tous d'anciennes victimes.
Parlons maintenant de ce « besoin irrépressible ». Il y a des hommes très bien, et beaucoup – comme mon mari, par exemple, qui me respecte. Comment se fait-il que certains hommes aient un « besoin irrépressible », et pas d'autres ?
Ce « besoin irrépressible » est d'ailleurs un leurre. Car comment font les femmes, ou les hommes qui ne vont pas voir des prostituées, lorsqu'ils ne peuvent avoir de rapports sexuels ? Ils recourent à la masturbation.
Troisième facteur : la prostitution est ancrée dans la mémoire culturelle et trans-générationnelle. Un peu comme comme le fils qui a toujours entendu son père dire qu'il fallait se méfier des Noirs a tendance à se comporter de la même manière, celui qui entend parler de « besoin irrépressible » ne considère pas la prostitution comme un problème. Et cela dure depuis des siècles ! N'oublions pas que les guerres, les invasions, se sont toujours accompagnées de viols : c'était un droit du vainqueur. Nous portons aujourd'hui les stigmates de ce passé – l'homme, ce pauvre chéri, et son « besoin irrépressible »...
Il s'agit donc d'un phénomène culturel. Certains hommes sont élevés ainsi de génération en génération. Je les invite à devenir comme ceux qui respectent la femme – et les enfants, puisque certains se prostituent aussi.