Intervention de Dominique Orliac

Séance en hémicycle du 8 novembre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Administration générale et territoriale de l'État

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Orliac, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, c’est en tant que rapporteur pour avis sur les crédits du programme 177 « Prévention de l’exclusion et insertion des personnes vulnérables » que j’exprimerai tout d’abord ma satisfaction. En effet, les crédits du programme 177 atteindront en 2014 un niveau réaliste dès la loi de finances initiale. Il s’agit ici d’une véritable rupture avec les années précédentes, marquées par l’insécurité budgétaire chronique de ce programme. Comme vous l’avez dit, madame la ministre, nous nous trouvons dans une situation budgétaire contrainte. Le programme 177 voit cependant ses crédits progresser de 9 % à périmètre constant, soit 108 millions d’euros, ce qui traduit une politique volontariste en matière d’insertion des personnes sans-abri ou mal logées.

Je me félicite des mesures annoncées en janvier dernier dans le plan quinquennal de lutte contre la pauvreté, déjà mises en oeuvre pour la plupart et reconduites en 2014 : création ou pérennisation de places en centres d’hébergement et en logement adapté, renforcement des services intégrés d’accueil et d’orientation, revalorisation de l’aide à la gestion locative sociale versée aux résidences sociales. Toutefois, certains arbitrages gouvernementaux ne me semblent pas favoriser une meilleure prévention de l’exclusion. Ainsi, l’article 64 du projet de loi de finances pour 2014 gèle le barème des aides personnelles au logement, ce qui fragilisera nécessairement les personnes les plus démunies. Une avancée en la matière serait vraiment la bienvenue.

Les crédits alloués aux centres sociaux dans le cadre du fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire seront maintenus à leur niveau de 2013. Ils avaient été drastiquement réduits, de près de 60 %, par l’ancienne majorité, au détriment de l’action quotidienne de très grande qualité menée par les centres sociaux en matière de prévention de l’exclusion. Pour faire face à l’urgence sociale, le nombre de places d’hébergement a fortement progressé depuis 2008. La tendance a été confirmée par l’actuel gouvernement dans le cadre du plan de lutte contre la pauvreté, qui prévoit la création ou la pérennisation de 5 000 places d’hébergement. Je déplore cependant que les places d’hébergement créées ou pérennisées relèvent uniquement de l’urgence, c’est-à-dire la mise à l’abri immédiate des personnes, au détriment des places d’insertion qui pourtant offrent un meilleur service et surtout obtiennent de meilleurs résultats.

Il faut impérativement freiner la croissance exponentielle des dépenses de nuitées hôtelières, dont le nombre a doublé entre 2008 et 2012, et augmenter les places d’insertion. Au sein des structures d’insertion, les centres d’hébergement et de réinsertion sociale, auxquels j’ai choisi de m’intéresser plus précisément cette année, sont dans une situation paradoxale. Ils disposent de plus de 39 000 places, ce qui en fait les premiers hébergeurs du pays, et assurent un service de qualité qui s’avère performant en termes d’insertion. Toutefois, leur poids régresse au profit des centres d’hébergement d’urgence et des hôtels, en raison de la stagnation du nombre de places d’insertion financées par l’État. Pourtant, les structures d’insertion existantes sont largement saturées. À titre d’exemple, le SIAO-insertion de Paris n’a pu répondre favorablement qu’à une demande d’hébergement sur dix en 2012.

Si la création de places d’urgence est tout à fait souhaitable afin de ne pas laisser des personnes à la rue sans autre solution, elle ne doit pas se faire au détriment des places d’insertion. La fragilisation des CHRS est accentuée par la diminution continue des dotations globales de fonctionnement qui leur sont allouées, sur la base d’une convergence tarifaire tirant l’ensemble des structures vers le bas et ne tenant aucun compte du service rendu ni des performances sociales des établissements. Il convient de renforcer les CHRS, qui garantissent statutairement un droit à un accompagnement social de qualité faisant souvent défaut dans les structures d’urgence. Le modèle du CHRS devrait servir de base à l’émergence d’un statut unique des centres d’hébergement, que la plupart des opérateurs appellent de leurs voeux, afin de dépasser la traditionnelle distinction entre urgence et insertion et offrir à tous les usagers un accompagnement social dès leur prise en charge.

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