Intervention de Najat Vallaud-Belkacem

Réunion du 6 novembre 2013 à 16h30
Commission spéciale pour l'examen de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel

Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes2 :

Il y a une distinction d'ordre philosophique entre le délit de racolage passif et la nouvelle contravention qui frapperait les clients des prostituées. Si nous adoptons une nouvelle politique publique visant à faire reculer la prostitution, c'est que nous la considérons comme une violence notamment faite aux femmes. Il est donc inacceptable de punir celles qui en sont les victimes : c'est pourquoi l'abrogation du délit de racolage nous paraît indispensable.

Certains s'inquiètent, en effet, qu'en sanctionnant les clients, on ne conduise à éloigner la prostitution des centres-villes Mais si les prostituées ne sont plus passibles de poursuites, elles se sentiront plus en sécurité en centre-ville, ce qui ne sera pas le cas des clients, et c'est bien ce que nous recherchons : qu'ils se sentent en insécurité, et donc qu'ils soient moins nombreux. L'important est que les prostituées se sentent en sécurité et légitimes en ville. C'est le pari que nous faisons. Si la mesure a des effets problématiques à court terme, les mesures d'accompagnement permises par la création du fonds permettront d'intervenir davantage auprès des prostituées. Ce que nous voulons, c'est qu'à moyen et long termes, les moyens de cette politique publique fassent reculer la prostitution.

Vous prévoyez que les ressources du fonds dédié soient constituées pour partie des recettes provenant de la confiscation des biens et produits issus du proxénétisme. Je soutiendrai cette disposition, qui va dans le bon sens et qui sera d'ailleurs l'un des éléments importants du futur plan gouvernemental de lutte contre la traite des êtres humains.

Les crédits de l'État spécifiquement orientés vers l'insertion des personnes prostituées sont quasi-inexistants. En dépit de la réaffirmation régulière par notre pays de sa politique abolitionniste, ces crédits n'ont cessé d'être réduits et l'augmentation des moyens que j'ai décidée ne suffit pas à combler tous les besoins : on estime que le soutien public aux personnes prostituées correspond à 120 euros par an et par personne… soit un centième du coût annuel moyen d'une place en hébergement d'urgence. La faiblesse des ressources actuellement à notre disposition nous pousse à prendre nos responsabilités et à juger nécessaire la création d'un fonds dédié.

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