Il est vrai que ceux des clients de personnes prostituées dont les ressources financières sont suffisantes pourront aller les chercher au-delà de nos frontières. Oui, c'est un risque que nous courons.La réponse à cette stratégie d'évitement, c'est le renforcement de la coopération européenne. La position qu'adoptera le Parlement français est attendue avec beaucoup d'intérêt à l'étranger ; si la proposition de loi est adoptée, il faudra ensuite que la mesure s'étende. Sur ce point, je ne suis pas pessimiste : déjà, de nombreux maires allemands et néerlandais jugent que la dépénalisation des clients et la réouverture des maisons closes dans leur pays respectif ont été de graves erreurs. Par ailleurs, j'ai été agréablement surprise de constater qu'une vingtaine de ministres des États parties au protocole de Palerme – qui vise à prévenir et réprimer l'exploitation de la prostitution d'autrui – avaient tenu à nous rejoindre, ma collègue belge et moi-même, comme je l'ai déjà dit, pour réaffirmer leur engagement en faveur de l'application de ce texte et d'un renforcement de la coopération internationale à cet effet. Notre ambition doit être, si la proposition est adoptée, que notre position de principe s'étende dans d'autres États. Je rappelle enfin que des dispositions méconnues des directives européennes visant à réprimer les violences faites aux femmes incitent les États à adopter des mécanismes de responsabilisation des clients. C'est la meilleure réponse que l'on puisse apporter à votre inquiétude légitime.
Oui, je vous rejoins, des hommes aussi sont victimes de la prostitution. C'est pourquoi la proposition de loi porte sur les droits fondamentaux de tous les êtres humains –, même si la réalité historique est celle de l'asservissement d'un sexe par un autre. La prostitution a cela de problématique qu'elle semble légitimer les inégalités entre les hommes et les femmes, faisant de toutes les femmes des prostituées potentielles, pardon de le dire ainsi. C'est contre cette vision des relations entre hommes et femmes qu'il faut lutter, notamment auprès des plus jeunes.
Enfin, lier la lutte contre la prostitution et la situation des personnes handicapées me met mal à l'aise. On ne peut évoquer les seuls besoins sexuels des personnes handicapées et faire ainsi l'impasse sur leurs besoins affectifs ; ce sujet particulier doit être dissocié de débat qui nous réunit aujourd'hui.