Le discours sur les clubs de la Jonquera et sur la prostitution est terriblement banalisé. À tel point que les animatrices du Planning familial ont relevé qu'en matière de sexualité, les jeunes des autres départements posent des questions sur d'autres sujets, comme la contraception ou les risques d'IST, tandis que dans les Pyrénées-Orientales, le sujet de la prostitution revient systématiquement. Or, les femmes ont accès aux discours des jeunes et des hommes.
L'étudiante qui a travaillé avec nous sur cette étude parle dans son mémoire de la « souffrance de l'être femme » qui est celle des femmes qui entendent régulièrement les hommes tenir des propos comme « c'était génial », « les filles ressemblent aux filles de la télévision et des films pornographiques », « des filles comme on n'en voit pas tous les jours », sous-entendu comme elles. Elles ressentent naturellement une souffrance, parfois une sorte de fascination pour ces femmes dont les garçons parlent tant.
Certaines femmes ont évoqué leur peur de voir leur compagnon se rendre à la Jonquera et leur sentiment d'impuissance. Ce sentiment, les animatrices du Planning familial l'ont également rencontré dans les groupes de parole composés de femmes plus âgées qui leur ont confié leur peur des infections sexuellement transmissibles.
Les jeunes femmes s'inquiètent de la facilité avec laquelle les jeunes parlent de la prostitution ainsi que de la facilité d'accès des clubs, qui sont très proches et peu chers. Quelques-unes des femmes interrogées vont jusqu'à devancer ce passage à l'acte en mettant tout en oeuvre pour que leur compagnon n'y aille pas. Deux jeunes femmes ont évoqué le chantage que leur compagnon exerçait à leur égard en leur disant : « Si tu ne me fais pas ça, j'irai à la Jonquera ».