Intervention de François Cornut-Gentille

Réunion du 12 novembre 2013 à 14h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Cornut-Gentille :

Jusqu'à quel degré de financement conservons-nous notre crédibilité ? Cette question n'est pas polémique – je rappelle à ce propos qu'un ancien chef d'état-major des armées déclarait voilà déjà dix ans qu'en matière de défense, la France avait pour usage de voyager en première classe avec un billet de seconde.

Le budget de la France dans ce domaine ne diffère plus guère de celui de l'Allemagne, mais cette dernière ne mène presque pas d'OPEX et n'entretient pas d'arme nucléaire. Nous sommes donc parvenus à un seuil où il ne suffit plus de discuter de masses financières : il nous faut poser des questions de fond pour définir collectivement ce que nous voulons faire.

Le ministre a présenté une budgétisation prudente des OPEX comme une bonne nouvelle pour le ministère de la Défense, du fait du refinancement de ces opérations à partir des crédits gelés dans les autres ministères, mais cette procédure, présentée comme un « usage », n'est pas définitivement acquise pour Bercy et un risque pèse donc chaque année sur les OPEX, en fonction de la situation des finances publiques. L'argument selon lequel la solidarité paie les OPEX fragilise, en réalité, la loi de programmation militaire.

Jean Launay a bien souligné par ailleurs les fragilités qui menacent les recettes exceptionnelles. La première tient au fait que, si les recettes escomptées des cessions de fréquences sont connues, on sait aussi que leur perception sera différée : comment passera-t-on ce délai ?

Une autre fragilité, qui n'est pas encore bien perçue, est de nature budgétaire : le nucléaire doit recevoir l'an prochain des financements au titre des investissements d'avenir, c'est-à-dire de nature extrabudgétaire, et selon des procédures qui ne relèvent pas pleinement de l'orthodoxie budgétaire. La Cour des comptes ou Bercy pourraient y trouver à redire.

Enfin, le ministre de la Défense a clairement souligné, en défendant cette loi de programmation militaire, qu'elle constituait le minimum minimorum et qu'il était indispensable que, contrairement aux précédentes, elle soit intégralement exécutée – ce à quoi il s'est du reste engagé.

Quant au fait que le ministère de la Défense reçoive 90 millions d'euros de crédits supplémentaires, il ne s'agit pas vraiment d'une bonne nouvelle, car cela pourrait signifier que la loi de programmation commencera d'être exécutée avec un handicap dépassant 500 millions d'euros.

De même, alors qu'elle est présentée comme une bonne chose, la clause de revoyure fixée en 2015 pourrait, si la croissance n'est pas au rendez-vous à cette date, aboutir à une nouvelle dégradation des comptes de la défense.

Ce texte comporte donc des fragilités internes, auxquelles s'ajoute encore une pression économique qui rendra très difficile son exécution. Il importe donc que notre Commission et celle de la Défense réfléchissent à ce que nous voulons pour notre défense et pour notre pays.

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