Monsieur le président, monsieur le ministre du redressement productif, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, dans son discours du 27 août dernier devant la conférence des ambassadeurs, le Président de la République a souhaité ériger le tourisme en « grande cause nationale » afin de faire en sorte que la France demeure la première destination touristique mondiale, ce qu’elle est effectivement en nombre de visiteurs étrangers, même si elle ne se situe qu’en troisième position pour ce qui concerne les recettes ainsi générées. Dans cette même perspective, le Premier ministre vient par ailleurs d’annoncer, la semaine dernière, le lancement des « Assises du tourisme ».
Au-delà de toutes les bonnes intentions ainsi proclamées, avons-nous vraiment les moyens de notre ambition ? Sur le plan budgétaire, la situation de nos comptes publics réduit indiscutablement les marges de manoeuvre et le secteur du tourisme, qui résiste globalement mieux que d’autres à la crise, en supportera encore les conséquences en 2014, puisque ses crédits directs baisseront de plus de 20 % en autorisations d’engagement et de près de 4 % en crédits de paiement.
Cette baisse substantielle se justifie, pour partie, par des motifs structurels, par exemple l’absence de volet tourisme dans le cycle 2014-2020 des contrats de projet État-régions, mais je ne souhaite pas faire aveuglément grief au Gouvernement de cet état de fait. En effet, le tourisme français a surtout besoin de moyens ciblés et mobilisés à bon escient sur des actions mieux coordonnées entre les différents échelons d’intervention, du local à l’international.
Arrêtons-nous un instant sur la situation de l’opérateur Atout France dont le législateur a précisément fait, en 2009, le « bras armé » de l’État pour la mise en oeuvre de la politique touristique, en partenariat avec l’ensemble des acteurs publics et privés s’agissant de la promotion, mais également de l’observation des marchés, de l’assistance au développement, de l’ingénierie, ou encore de l’amélioration de la qualité. Sa subvention, comme l’a évoqué mon collègue Éric Woerth, décroît d’année en année et ne s’élèvera plus qu’à 31 millions d’euros l’an prochain.
Lors de la commission élargie, la semaine dernière, Mme la ministre a tenu à couper court aux griefs formulés à l’encontre de l’agence. Mais là n’est pas la question : si tout le monde s’accorde en effet à reconnaître que l’agence joue un rôle clé avec des moyens relativement faibles, il n’en est pas moins certain que ces moyens ne pourront pas indéfiniment baisser. Ou alors, il faudra envisager de recentrer son action ou, le cas échéant, lui trouver de nouvelles sources de financement.
Dans le cadre de la réforme territoriale en cours de discussion, c’est le statu quo qui semble malheureusement prévaloir. Les Assises du tourisme ne pourront pas ne pas aborder ce point et tous ceux qui lui sont connexes, à savoir la refonte de la taxe de séjour, le choix en matière d’intercommunalité, la réglementation des offices de tourisme, le classement des communes touristiques, par exemple.
Cela étant, j’espère aussi que des premiers enseignements pourront être tirés des contrats de destination touristique qui viennent d’être conclus, je pense notamment à celui sur le tourisme d’affaires en Alsace. Nous signerons demain matin à Lille avec Mme la ministre du tourisme le contrat de destination Grande Guerre. La mobilisation autour de projets communs est assurément le meilleur moyen d’apprendre à tous ces acteurs à travailler ensemble efficacement.
Dans l’avis budgétaire que j’ai présenté au nom de la commission des affaires économiques, j’ai également souhaité aborder les nouveaux enjeux liés à la montée en puissance des technologies numériques, et notamment leur impact sur le modèle économique de l’hébergement touristique.
L’hôtellerie traditionnelle, en particulier, est aujourd’hui à un tournant. Elle est de plus en plus tributaire des centrales de réservation hôtelière sur internet, les fameuses OTA, les online travel agencies, qui prélèvent parfois de fortes commissions alors qu’elles échappent pour partie à l’impôt et imposent à leurs clients des clauses contractuelles très discutables. La régulation de telles pratiques suppose sans aucun doute une coordination au niveau européen et il serait bon que la France, en tant que leader en matière touristique, prenne des initiatives concrètes dans ce domaine.
Je souhaite aussi attirer votre attention sur la situation générale de l’hôtellerie française, qui doit affronter le poids des normes, les difficultés de recrutement, la concurrence d’offres alternatives et la difficile transmission des entreprises. Voilà encore un sujet de réflexion qui figurera, je l’espère, au programme des Assises du tourisme, qui devraient déboucher sur des propositions de modifications législatives.