Intervention de Damien Abad

Séance en hémicycle du 13 novembre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Économie

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDamien Abad, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les crédits consacrés à la concurrence et à la consommation au sein du programme 134 présentent des évolutions encore plus contrastées cette année que l’an dernier. En effet, si les moyens en personnel affectés à la DGCCRF via les actions 16, « Régulation concurrentielle des marchés », 17, « Protection économique du consommateur », et 18, « Sécurité du consommateur », sont en augmentation de quinze équivalents temps plein, ce qui permet de recréer un peu de cohérence avec l’augmentation continue de son périmètre d’action, il n’en va pas de même pour ce qui concerne les crédits de l’action 15 relative à la mise en oeuvre du droit de la concurrence par l’Autorité de la concurrence.

Celle-ci connaît en effet une nouvelle diminution de ses effectifs, d’un ETP, et de ses crédits de fonctionnement, de 4,5 %. Cette mesure paraît particulièrement malvenue, s’agissant d’une autorité unanimement saluée pour la qualité et l’efficacité de son travail. Elle a notamment permis cette année d’obtenir des baisses de frais substantielles sur les cartes de crédit, et elle est seule compétente pour se pencher sur les sujets d’envergure nationale, avec l’indépendance nécessaire.

J’ajoute que l’Autorité est en quelque sorte victime de son succès puisque la loi sur la régulation économique outre-mer lui a confié de nouvelles missions, dont un pouvoir d’injonction structurelle en matière de grande distribution, sans pour autant lui donner les moyens de mener ces expertises outre-mer. Il est paradoxal que l’organisme chargé de la concurrence dans sa globalité soit proportionnellement moins bien doté que les régulateurs sectoriels.

Selon les informations que j’ai pu recueillir, l’enveloppe budgétaire consacrée aux subventions pour les associations de consommateurs diminue de nouveau cette année, de 5 % pour les associations bénéficiant de la reconnaissance spécifique et de 7 % pour les autres. Je m’interroge donc sur la capacité de ces associations réellement consuméristes à exercer l’ensemble de leurs missions de conseil et de service auprès des consommateurs – d’autant que leurs compétences vont être renforcées avec l’action de groupe inscrite dans le projet de loi « Consommation » –, tout en devant faire face à une diminution de leurs moyens. J’ajoute que je n’ai pu obtenir que les informations relatives au montant global de la subvention pour 2014, ainsi que la répartition des financements alloués pour 2012 !

Ma question sur les crédits relatifs à la consommation du programme 134 est la suivante. L’organisation de la DGCCRF a été considérablement modifiée par la réforme de l’administration territoriale de l’État. Il semble que l’éparpillement de ses agents entre les directions régionales et départementales ait abouti à une perte d’efficacité, notamment dans le recueil des indices des pratiques anticoncurrentielles. Quelles sont donc les mesures qu’envisage de prendre le Gouvernement dans le cadre du comité interministériel pour la modernisation de l’action publique ?

Dans mon rapport, j’ai également souhaité approfondir le sujet de la protection du consommateur dans le cadre des jeux d’argent et de hasard en ligne. Nous en avons d’ailleurs discuté en commission élargie. Les jeux en ligne sont des activités présentant des risques particuliers, aussi bien pour les joueurs eux-mêmes, comme l’addiction et l’endettement, que pour l’ordre public – la corruption, le blanchiment d’argent et l’atteinte à l’intégrité des compétitions sportives.

La loi du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux en ligne a mis en place un ensemble de garde-fous qui a véritablement permis de lutter contre l’offre illégale. J’ajoute que l’action efficace de l’Autorité de régulation des jeux en ligne a permis la mise en oeuvre rapide de la régulation de ce secteur. En outre, la coopération entre les autorités de régulation des jeux en lignes sur le plan européen a permis la mise en place de bonnes pratiques afin de rendre attractive l’offre légale et d’harmoniser la lutte contre l’offre illégale.

Le marché des jeux en ligne n’est pas un marché comme les autres, notamment en raison de sa nature par essence transfrontalière. En France, le montant des mises sur l’ensemble de l’offre régulée en ligne s’est élevé à près de 9,5 milliards d’euros en 2012. En outre, afin d’assurer la sincérité des compétitions sportives, la loi de 2010 a instauré un « droit au pari », une sorte de contrat entre l’organisateur d’événement et l’opérateur.

Comme vous le savez, dix articles concernant les jeux en lignes figurent dans le projet de loi sur la consommation que nous examinerons prochainement en deuxième lecture. Si certaines mesures vont dans le bon sens, je souhaite néanmoins évoquer plusieurs sujets qui ne figurent pas dans le texte. En ce qui concerne, tout d’abord, la détection des addictions, ne faut-il pas davantage responsabiliser les opérateurs par un nouveau cadre, qui serait fixé par l’ARJEL ?

Ensuite, les jeux d’adresse seront désormais interdits, mais l’offre illégale ne disparaîtra pas pour autant. En effet, une interdiction n’empêche pas l’offre illégale de prospérer. Aussi, ne vaudrait-il pas mieux intégrer une partie de ces jeux dans l’offre régulée ?

Le sujet de l’attractivité de l’offre régulée est bien sûr fondamental pour faire diminuer les jeux illégaux. Le cas du poker est particulièrement d’actualité puisqu’il semble que le manque de grands joueurs et de liquidités sur les tables conduise au départ des joueurs les plus importants. Peut-on envisager, comme le préconise l’ARJEL, en s’entourant des précautions nécessaires pour lutter contre le blanchiment, d’ouvrir ces tables aux joueurs espagnols, italiens et danois, qui ont le même cadre législatif que le nôtre ?

Se pose également la question du renouvellement de l’agrément. L’échéance des licences arrive à son terme en 2015. Les dossiers d’agrément sont très lourds à constituer. Ne faut-il pas simplifier la procédure de renouvellement pour les opérateurs déjà connus pour leurs bonnes pratiques ?

Enfin, il semblerait intéressant d’ouvrir le débat sur la possible fusion de l’ARJEL et de l’Agence française de lutte contre le dopage, pour améliorer encore l’intégrité du sport et garantir l’équilibre du marché des jeux en ligne.

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