En vue de la finalisation de cet accord d'association, deux documents préparatoires en date du 23 mai 2013 ont été transmis par la Commission européenne au Conseil :
– une proposition de décision du Conseil relative à la signature et à l'application provisoire de l'accord d'association ;
– une proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord d'association.
En clair, la création de la zone de libre-échange complet et approfondi, pierre angulaire du processus d'intégration économique, pourrait ainsi voir le jour avant la ratification de l'accord d'association par les États membres, processus susceptible de durer plusieurs mois.
Rappelons que si notre Commission des affaires européennes a donné son approbation de principe à ces deux textes le 19 juin 2013, c'était en l'état des informations dont elle disposait alors et également sous réserve du respect des trois conditions fixées en décembre 2012. C'est pourquoi il nous a semblé important qu'elle continue à suivre avec attention les évolutions en Ukraine.
Ceci m'amène à évoquer ces évolutions récentes.
Début avril 2013, le Président ukrainien a accordé la grâce présidentielle à deux anciens ministres et alliés de l'ex-Première ministre Ioulia Tymochenko. L'ancien ministre de l'Intérieur Loutsenko et l'ancien ministre de l'environnement Filiptchouk, qui comme Mme Tymochenko purgeaient des peines pour « abus de pouvoir », ont donc été libérés. Cette grâce a été perçue comme un geste visant à réduire les tensions avec l'opposition et à désamorcer un risque de crise avec l'Union européenne, dans la perspective de la signature de l'accord d'association.
Néanmoins, et malgré l'arrêt de la CEDH du 30 avril 2013 jugeant sa détention illégale, Ioulia Tymochenko n'est, elle, toujours pas libérée. La France a, immédiatement après cet arrêt, demandé à l'Ukraine de la libérer. Dans un entretien tenu le 5 juin 2013 avec son homologue ukrainien M. Leonid Kojara, M. Laurent Fabius a de nouveau évoqué le cas de Mme Tymochenko. Par ailleurs, l'Allemagne a, en juin 2013 également, réitéré sa proposition de l'accueillir, en vue de lui prodiguer les soins nécessités par son état de santé problématique.
Dans un rapport de la Commission du 20 mars 2013, il apparaît qu'au cours de l'année 2012, les relations Union européenne-Ukraine avaient marqué une certaine régression, contrastant dans une certaine mesure avec les progrès réalisés avec la Moldavie, la Géorgie et l'Arménie.
Ces évolutions apparaissent d'autant plus étonnantes que jusqu'alors l'Ukraine pouvait sembler la « favorite » ou le « bon élève » du processus de rapprochement avec l'Union européenne. Ce recul est bien entendu lié aux failles du processus électoral d'octobre 2012, mais pas seulement. L'Ukraine n'a pas pris, en 2012, de mesures à l'égard de la plupart des recommandations du rapport de l'année précédente sur la Politique européenne de voisinage.
C'est pourquoi, dans ses nouvelles recommandations du 20 mars 2013, la Commission invite l'Ukraine à y remédier rapidement.
Aucun nouveau rapport de suivi de la Commission n'est venu depuis cette date mesurer les progrès de l'Ukraine.
Si les paramètres à remplir par Kiev restent avant tout politiques, la Commission attend également des clarifications et des solutions sur plusieurs points de friction commerciale. Début octobre 2013, en visite à Kiev, le commissaire européen Karel De Gucht a ainsi rappelé aux autorités du pays certaines exigences européennes.
La Commission s'inquiète en particulier d'une taxe de recyclage des véhicules importés, adoptée par le Parlement ukrainien en juillet, signée par le Président ukrainien en août, et entrée en vigueur le 1er septembre 2013. M. De Gucht a donc le mois dernier exprimé l'espoir que l'Ukraine fera tout son possible pour retirer cette loi, similaire à celle introduite en 2011 par la Russie et qui fait l'objet d'une plainte à l'OMC.
M. De Gucht a aussi fait part de son inquiétude sur plusieurs autres dossiers, comme le contingent d'importation de charbon à coke instauré par l'Ukraine, une restriction quantitative qui a certes remplacé une interdiction, mais est néanmoins jugée préoccupante par Bruxelles.
Enfin, l'Union européenne reste inquiète devant la demande persistante de l'Ukraine de renégocier certaines de ses concessions tarifaires à l'OMC afin de revoir à la hausse ses droits d'importation pour un certain nombre de produits...
Le commissaire Karel De Gucht a prévenu que si l'accord d'association est signé, la mise en oeuvre provisoire de la zone de libre-échange dépendra du règlement de ces questions commerciales.
Quoi qu'il en soit, la mise en oeuvre des accords d'association constituera le principal défi de l'après-Vilnius. Il semble important, notamment au vu des considérations qui précèdent, que l'Union européenne continue, après le Sommet du Partenariat oriental, à accompagner le processus de réformes en Ukraine. La signature de l'accord d'association ne saurait être une fin en soi.