Intervention de Dominique Baert

Réunion du 13 novembre 2013 à 9h30
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Baert, rapporteur pour avis :

Élu urbain, je rêve d'une politique de la ville transcendant toutes les compétences ministérielles, tous les découpages budgétaires, afin de mobiliser des moyens à la mesure des grandes difficultés auxquelles sont confrontés certaines cités et certains quartiers. Il m'arrive en effet de penser que si elle était interministérielle, la politique de la ville pourrait réunir sous son autorité des lignes budgétaires qui relèvent aujourd'hui de l'éducation nationale, du logement, de la santé, de l'économie, entre autres, et se doter ainsi d'un budget consistant, d'une assise financière solide.

Hélas, malgré des décennies de politique de la ville, nous en sommes loin. Je le répète chaque année comme rapporteur spécial, le ministère chargé de cette politique est un nain budgétaire, qui s'appuie pour mener ses actions sur des opérateurs externes. L'ANRU, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, et l'ACSé, l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances, en sont les piliers. Les quartiers qui bénéficient des interventions financières de la politique de la ville sont très nombreux, peut-être trop, au point que l'on pourrait parler de saupoudrage : on compte 1 015 zones éligibles aux interventions de l'ANRU et 751 zones urbaines sensibles.

La contractualisation s'opère au niveau de la commune. Le programme ANRU 1 est en train de se terminer. La politique de la ville est donc à la croisée des chemins. Il est temps de tirer les conséquences de ses insuffisances et de chercher à la rendre plus efficace. Loin de se réduire à une politique « chapeau », qui viendrait compléter les autres, elle devrait fonder l'action publique dans les quartiers et y irriguer toutes les autres politiques. En somme, elle devrait être non pas un carnet de chèques dont les tirages apaisent les plaies, mais bien le pacte fondateur mobilisant toutes les actions publiques.

Nous n'en sommes bien sûr pas là. Mais le Gouvernement a compris qu'il fallait réorganiser les structures, les procédures, les modes de gouvernance et la géographie prioritaire. Aux yeux de votre rapporteur, cela va dans le bon sens. Le présent projet de loi crée donc un nouveau cadre, assez consensuel, me semble-t-il, afin de clarifier les objectifs et les moyens d'intervention de la politique de la ville.

À cette fin, il redéfinit les quartiers prioritaires en faisant disparaître des zonages aux sigles aussi abscons qu'inadaptés aux besoins sociaux réels, car trop anciens. Le contrat de ville, instrument privilégié, devient le contrat-phare, sinon le contrat unique, et repose désormais sur une assise non plus communale, mais intercommunale. S'agissant enfin des moyens engagés, le texte mobilise les crédits de droit commun, réorganise les structures administratives et affiche des fonds mobilisables pour un nouveau programme de rénovation urbaine dès la fin du programme actuel, conduit par l'ANRU. La ligne de force de ce nouveau cadre d'action est la mobilisation de toutes les énergies, et d'abord des premiers intéressés, les habitants des quartiers eux-mêmes, pour concevoir les projets et pour les évaluer.

Le projet de loi comprend par ailleurs nombre de dispositions financières majeures qui justifient que notre Commission s'en soit saisie. L'article 1er, qui définit l'objet de la politique de la ville, réaffirme en outre la nécessité de mobiliser les politiques de droit commun avant les crédits spécifiques. L'article 2 prolonge le programme national de rénovation urbaine, le PNRU, et lance un nouveau programme national de renouvellement urbain, le NPNRU. L'article 3 crée une dotation « politique de la ville » qui se substitue à la dotation de développement urbain. L'article 4 définit les nouveaux quartiers prioritaires de la politique de la ville. L'article 8 articule les dimensions intercommunale et communale. Enfin, l'article 9 étend la dotation de solidarité communautaire à tous les établissements publics de coopération intercommunale signataires de contrats de ville.

La mobilisation prioritaire des crédits de droit commun faisait déjà partie des annonces accompagnant le lancement de la dynamique « Espoir banlieues » par la précédente majorité. Mais sa mise en oeuvre, reconnaissons-le, fut plus timorée que ce qui avait été annoncé. Pour que la nouvelle politique réussisse, son organisation financière – qui détermine la portée et le périmètre du contrat de ville –, sa gouvernance aux échelons national et local et l'évaluation de sa mise en oeuvre sont essentielles. Tel est le sens de la rationalisation entreprise par ce projet de loi, qui crée un cadre de réflexion et d'action pour les années à venir. En effet, les nouveaux contrats de ville entreront en vigueur le 1er janvier 2015, sauf pour les sites expérimentaux, où ils seront appliqués dès le 1er janvier 2014.

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