Monsieur le rapporteur, deux points m'inquiètent. Au nom de la nécessité de restrictions budgétaires, que je puis comprendre, et de l'exigence de justice sociale, que j'admets bien volontiers, je crains que l'on ne condamne des quartiers entiers de villes qui auraient autant besoin de soutien que les autres. Voilà qui remet en cause l'article 6 de la loi de cohésion sociale de janvier 2005, article que j'avais fait modifier au bénéfice d'autres quartiers que ceux qui étaient identifiés comme susceptibles de se voir octroyer une zone ANRU. On était ainsi passé d'une politique de guichet à une politique de projet. N'est-ce pas le sens de la politique de la ville ?
J'en ai fait l'expérience dans la ville dont je suis maire, ce qui montre que le cumul des mandats peut être utile : quand on a les pieds dans la glaise, on mesure les problèmes de terrain, dont ce texte semble bien éloigné. Ainsi le projet de loi conduira à traiter bien différemment ma ville de Rueil et la ville communiste de Nanterre, avec laquelle nous sommes en intercommunalité et entretenons de très bonnes relations. Alors que 30 000 personnes vivent dans les cités de ma ville de 82 000 habitants, qui jouxtent les grandes cités de Nanterre, en tous points semblables, Nanterre fera partie des nouveaux quartiers prioritaires mais Rueil en sera exclue, et ce au nom de la justice et de l'égalité ! Cela me paraît bien incohérent.
Ensuite, mon expérience personnelle me montre également que la politique de la ville suppose la proximité, c'est-à-dire le terrain immédiat : la ville. Au sein de notre agglomération, Nanterre n'est pas du tout traitée comme Rueil ni comme Suresnes, pour différentes raisons. La gestion de la politique de la ville au niveau de l'agglomération ne fera qu'ajouter à des difficultés fonctionnelles déjà importantes.
Enfin, cette politique de guichet reposera sur un décret en Conseil d'État dressant la liste des quartiers prioritaires. Quand ce décret sera-t-il publié ? L'étude d'impact devrait porter sur lui aussi afin que nous puissions en discuter en même temps que du texte dont il permettra la mise en oeuvre. C'est essentiel, car c'est le décret qui déterminera l'application de la justice sociale.