Mes chers collègues, ce projet a été adressé début octobre pour avis aux assemblées en application de la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État. Compte tenu du délai dont nous disposions pour nous prononcer, c'est-à-dire six semaines à compter du dépôt du document et compte tenu de la période budgétaire traditionnellement chargée que nous traversons, je vous ai proposé, le 29 octobre dernier, de prendre moi-même en charge ce rapport d'information, que je vais vous présenter.
J'observe que cet avis n'a rien d'obligatoire. De son côté, la Commission des affaires étrangères, qui est également concernée par ce texte, se réunit aujourd'hui même à 17 heures, pour auditionner le directeur général de Campus France, M. Antoine Grassin. Nos deux commissions manifestent ainsi tout l'attachement qu'elles portent à Campus France.
Mes chers collègues, le présent contrat d'objectif et de moyens (COM), qui couvre le triennum 2013-2015, est le premier signé entre l'EPIC Campus France, créé par la loi du 27 juillet 2010 relative à l'action extérieure de l'État, et ses deux tutelles, le ministère des affaires étrangères et le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Il parachève la mise en place du nouvel opérateur chargé de la promotion de l'enseignement supérieur, de l'accueil et de la mobilité internationale, dont la création s'est effectuée par étapes de janvier à septembre 2012, et non sans difficulté, principalement parce que Campus France résulte de la fusion de trois institutions inscrites dans le paysage de la coopération depuis de nombreuses années et dotées chacune d'une identité très marquée : l'association Égide, qui assurait l'accueil d'étudiants et de chercheurs étrangers boursiers pour le compte du ministère des affaires étrangères ; le Groupement d'intérêt public (GIP) Campus France, qui était chargé de promouvoir l'enseignement supérieur français à l'étranger et de contribuer à la mobilité internationale des étudiants et des chercheurs étrangers ; le service des activités internationales du Centre national des oeuvres universitaires (Cnous), qui gérait une partie des bourses du gouvernement français (BGF) et des bourses des gouvernements étrangers (BGE).
Ce COM est important non seulement parce qu'il permet de traduire les missions assignées à l'établissement public à travers quatre objectifs assortis de nombreux indicateurs, mais aussi parce qu'il a été élaboré parallèlement aux travaux préparatoires à la loi 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche ; de ce fait, il intègre l'action de l'opérateur dans la politique de sites que les établissements d'enseignement supérieur et les acteurs locaux entendent développer.
S'agissant de la valorisation et de la promotion des établissements et du système d'enseignement supérieur à l'étranger, qui est le premier objectif, le COM privilégie l'offre de formation des universités. L'opérateur et ses tutelles estiment en effet à juste titre qu'étant un établissement public utilisant des crédits publics, Campus France doit répondre en priorité aux attentes des établissements publics que sont les universités, d'autant que la plupart d'entre elles n'ont pas de visibilité internationale alors qu'elles accueillent l'essentiel des flux d'étudiants étrangers.
Le COM traduit, par ailleurs, le souhait des tutelles d'une plus grande participation des établissements d'enseignement supérieur au Forum Campus France, chargé de faire des propositions sur la promotion à l'international de l'enseignement supérieur.
Enfin, une attention particulière est portée au développement de l'e-enseignement, qui est l'une des missions fixées à Campus France par la loi du 27 juillet 2010 et une priorité de la loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche.
En matière d'accueil et d'accompagnement des étudiants et des chercheurs étrangers, qui constituent le deuxième objectif, le COM s'efforce de traduire les attentes des différentes parties concernant le rôle et la place de l'EPIC dans la chaîne de l'accueil : tout d'abord une collaboration plus étroite et efficace avec le Cnous en matière de logement des étudiants boursiers, avec l'installation d'un système d'information partagé qui permettra de gérer les réservations de façon à la fois plus fluide et plus fiable à partir de la rentrée 2014 ; ensuite, un rôle d'expertise et d'appui au sein de guichets uniques d'accueil que les établissements mettent en place dans le cadre de leur politique de site – dans ce cadre, la collaboration de Campus France avec Euraxess, site de promotion de la mobilité des chercheurs en Europe et dans le monde, est à l'étude, le but étant d'assurer une cohérence entre les niveaux territoriaux, nationaux et européen ; et enfin, un accompagnement plus concret des étudiants boursiers, avec des prestations comme l'accueil physique aux aéroports ou l'information et l'assistance en continu, qui sont définies contractuellement avec les gouvernements étrangers.
Le suivi d'un réseau des anciens élèves (« alumni ») constitue l'une des missions fixées à Campus France par la loi du 27 juillet 2010 et le troisième objectif du COM. Les anciens élèves sont en effet des ambassadeurs non seulement de notre culture, mais aussi de nos entreprises.
En concertation avec ses tutelles, Campus France conçoit actuellement un dispositif reposant sur une plate-forme interactive accessible par internet, qui permettra de maintenir le lien entre les anciens élèves et la France, de constituer des réseaux interactifs avec les établissements d'enseignement supérieur, les entreprises et les autres acteurs impliqués dans la mobilité étudiante, et d'offrir des informations, une animation et des services attractifs non seulement aux alumni, mais aussi à l'ensemble des partenaires. En raison du volume des contacts potentiels, le déploiement de l'outil sera progressif avec, dans un premier temps, l'installation d'un site central animé par Campus France et de sites expérimentateurs dans une dizaine d'ambassades ; l'outil sera ensuite proposé à l'ensemble des ambassades.
Parallèlement, le ministère des affaires étrangères travaille avec l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) à la constitution d'un réseau des anciens élèves, le but étant d'articuler les réseaux des lycéens et des étudiants afin de réduire les « pertes en ligne » entre nos établissements d'enseignement secondaire à l'étranger et nos établissements d'enseignement supérieur en France.
L'amélioration de l'efficience dans la gestion des programmes de mobilité et d'attractivité est le dernier objectif du COM, et sans doute le plus problématique pour l'opérateur.
L'effort de rationalisation et de productivité concerne principalement la gestion des bourses du gouvernement français, qui comportent, comme vous le savez, deux volets : d'une part, les bourses allouées par les postes diplomatiques (48 millions d'euros pour 2014), dont la gestion est assurée par Campus France ; d'autre part, les programmes de bourses sur crédits de l'administration centrale (20 millions d'euros) gérés par le ministère des affaires étrangères.
Campus France est fortement incité à réduire les frais de gestion des bourses, qui ont régulièrement augmenté au détriment du nombre de bourses allouées. Mais dans le même temps, il est encouragé à développer ses ressources propres, qui précisément, proviennent en grande partie de ces frais de gestion. Je pointe là une contradiction qu'il faudra sans doute lever.
Une augmentation de la subvention versée par le ministère des affaires étrangères permettrait d'accroître le volume des bourses et donc celui des frais de gestion, mais cette hypothèse est irréaliste, compte tenu des contraintes budgétaires. Si le COM indique l'évolution prévue des subventions pour charge de service public allouées à l'opérateur par ses ministères de tutelle, soit 4,2 millions d'euros en 2013, 4,06 millions d'euros en 2014 et 3,99 millions d'euros en 2015 pour le ministère des affaires étrangères, il ne comporte pas d'indicateur fixant la progression des bourses du gouvernement français.
Pour accroître ses fonds propres, l'opérateur doit donc développer les conventions de bourses avec les gouvernements étrangers, bourses qui génèrent également des frais de gestion. Cette piste est incertaine, en raison des répercussions de la crise sur les économies des États étrangers, mais elle constitue néanmoins un des axes d'évolution de l'EPIC.
Ainsi, les principales difficultés que soulève le contrat d'objectifs et de moyens résident dans l'étroitesse des marges de manoeuvre de Campus France et dans le peu de visibilité dont dispose l'opérateur sur ses ressources à venir. Il serait donc souhaitable que le Gouvernement s'engage de façon plus précise sur la durée du COM.
Malgré ses imperfections, le contrat d'objectifs et de moyens a pour principal mérite de jeter les bases d'une réflexion sur les objectifs, la stratégie et les évolutions possibles de Campus France, et d'offrir à ce dernier la possibilité de se projeter à plus long terme. Voilà pourquoi, de mon point de vue, il doit être approuvé sans réserve.