Mes chers collègues, à travers vos interventions, qui furent très pertinentes, vous avez repris certains éléments du débat qui s'était engagé au printemps dernier autour de la loi relative à l'enseignement supérieur et à la recherche. Nous avions alors constaté que notre système d'enseignement supérieur n'avait pas une attractivité suffisante à l'international, alors même que la compétition est évidente et que l'enseignement supérieur est devenu un marché comme un autre. L'Australie, que l'on cite souvent, a beaucoup investi en ce domaine et en a tiré grand profit au niveau économique.
Voilà pourquoi nous aimerions renouer avec cette diplomatie d'influence dont l'enseignement supérieur constitue l'un des vecteurs. Nous devons nous souvenir que pendant longtemps la France a fait partie, avec les États-Unis d'Amérique et la Grande-Bretagne, du « trio gagnant » en matière d'accueil des étudiants étrangers. Et nous retirons une certaine fierté quand un dirigeant étranger, politique ou économique, fait référence aux études qu'il a pu effectuer en France, que ce soit dans une université ou dans une grande école – que M. Hetzel se rassure : je ne limite pas le système d'enseignement supérieur aux universités ! Or le nombre des dirigeants qui pourraient être amenés à évoquer leurs études en France risque bien de décroître dans les années à venir. Nous essayons donc de réagir et d'améliorer la visibilité de notre offre d'enseignement supérieur.
J'observe par ailleurs que nous ne profitons pas de l'attractivité de notre système d'enseignement secondaire à l'étranger, auquel la France continue de consacrer des efforts financiers conséquents. Malgré cet investissement, des « pertes en ligne » se produisent : 30 à 40 % des élèves étrangers ayant suivi des études secondaires dans nos établissements répondent à l'offre d'enseignement supérieur d'autres pays que le nôtre.
J'ai évoqué les débats autour de la loi de 2013, mais je me dois de rappeler, en particulier à MM. Hetzel et Apparu qui soutenaient la majorité de l'époque, que nous déclinons une loi de 2010, qui a été mise en oeuvre par un décret d'application de la fin de 2011. Ce COM vient donc clore un processus déjà engagé, qui visait à faire fusionner trois structures de cultures différentes.
L'une de vous a rappelé la démission, en novembre 2012, du précédent président du Conseil d'administration de Campus France. Mais je voudrais rendre hommage à son successeur, Mme Béjean, que j'ai auditionnée en votre nom. Je pense que le fait qu'elle soit également présidente du Conseil d'administration du Cnous contribuera grandement à ce que la fusion ait lieu dans de bonnes conditions.
Vous avez comparé les tarifs et l'accueil de Campus France à ceux du Cnous. Vous l'avez fait à juste titre. Il faut évidemment prendre le meilleur des deux institutions et ne pas oublier les avantages que le Cnous pouvait présenter.
Il faut également garder en tête l'idée de la « chaîne de l'accueil ». En effet, l'accueil en France des étudiants étrangers ne se limite pas à la délivrance d'un visa ou d'une bourse. Je précise d'ailleurs que ces étudiants n'ont pas tous le même statut, que nous n'attribuons de bourse qu'à un certain nombre d'entre eux et qu'ils peuvent également recevoir des bourses de leur pays d'origine.
L'accueil des étudiants étrangers passe aussi par le logement. Quel serait l'intérêt de venir étudier en France si l'on ne peut pas s'y loger ? En ce domaine, l'apport du Cnous est évidemment déterminant. Il passe aussi par un accompagnement plus concret. Beaucoup d'entre vous ont parlé d'un accueil physique aux aéroports, d'une information, d'une assistance en continu dans la mesure où un étudiant étranger peut se trouver un peu perdu quand il arrive en France.
Cela me renvoie aux débats du projet de loi relatif à l'enseignement supérieur et à la recherche. En effet, les membres de la commission mixte paritaire qui s'est tenue à cette occasion ont eu raison d'adopter un article qui a permis de traiter le problème de l'entrée et du séjour des étudiants étrangers. À l'époque, on nous avait expliqué qu'on pouvait attendre un projet de loi plus global, prévu pour cet automne. Or nous savons aujourd'hui qu'un tel projet ne sera examiné – au mieux – qu'au printemps 2014. Ainsi, en matière d'entrée et de séjour des étudiants étrangers, la situation juridique est aujourd'hui stabilisée. Et je ne reviendrai pas sur les propos pertinents qu'a tenus Mme Dessus sur l'abrogation de la circulaire Guéant.
Ce contrat d'objectifs et de moyens, qui est le premier, est ambitieux. Mais nous ne devons pas oublier que nous partons d'une situation insatisfaisante. Vous avez d'ailleurs été nombreux à pointer les insuffisances, soit de Campus France ancienne formule, soit d'Égide, et à dire qu'il conviendrait de se garder des mêmes dérives ou des mêmes erreurs de gestion.
La diplomatie d'influence avec laquelle nous entendons renouer passe également par la gestion des alumni, ces anciens élèves. Le paradoxe est que nous vivons dans un monde où la formation initiale ne garde sa valeur que si l'on continue à se former – on parle de « formation tout au long de la vie ». Cela est valable aussi – et surtout – pour ceux qui possèdent un diplôme d'enseignement supérieur. Or on nous a fait le reproche de ne plus nous préoccuper des anciens élèves de l'enseignement supérieur, une fois leur formation initiale achevée. Lorsqu'ils rentrent dans la vie active, ils s'adressent à d'autres systèmes de « formation tout au long de la vie ». Nous devons donc répondre à ce besoin.
M. Bréhier a insisté sur l'e-enseignement, qui constitue un enjeu majeur. Madame Fioraso en a parfaitement conscience, puisqu'elle a lancé France Université Numérique. Reste qu'en ce domaine, nous avons du retard à rattraper. Dans le contrat d'objectifs et de moyens, le développement de l'e-enseignement n'est présenté que comme un projet. Je pense malgré tout que notre commission devra travailler sur ce sujet, dans la mesure où nous devons assurer un suivi, et où l'attractivité de notre enseignement supérieur passera par le numérique.
Monsieur Hetzel, je suis déjà revenu sur certains des points que vous avez évoqués. Je vous rappelle qu'en France, beaucoup d'étudiants bénéficient d'une bourse de leur pays d'origine.
Vous avez raison de pointer qu'un contrat d'objectifs et de moyens doit traiter des objectifs… mais aussi des moyens. Je vous rejoins sur le fait qu'il faut essayer de dépasser certaines contradictions qui pourraient amener, pour des raisons de bonne gestion et parce que l'argent public est rare, à réduire les tarifs de gestion des bourses. On peut bien sûr penser qu'en réduisant le tarif de gestion des bourses, on aurait les moyens d'en attribuer davantage. Mais cela aboutirait à réduire les recettes propres de Campus France, à limiter ses marges de manoeuvre et à l'empêcher d'atteindre tous les objectifs qui lui ont été fixés.
De la même façon, je rejoins M. Braillard sur le fait qu'il faut développer une bonne synergie entre nos établissements d'enseignement supérieur, les collectivités territoriales – notamment les régions – et les pays étrangers. Il sera également nécessaire de passer un certain nombre de conventions.
J'ai déjà répondu à certaines des observations formulées par Mme Attard. Certes, ce COM est un pari. À nous d'en surveiller l'application pendant trois ans – de 2013 à 2015. Je suis à votre disposition pour organiser l'année prochaine, si vous le souhaitez, l'audition de Mme Béjean. Celle-ci pourrait nous faire, avec son directeur général, M. Grassin, le bilan d'une première année d'exécution du COM. Ce serait l'occasion de voir si la situation a évolué dans un sens favorable.
Je pense avoir déjà répondu à M. Apparu sur l'enjeu d'une stratégie française visant à augmenter l'attractivité de notre enseignement supérieur. Il ne me revient pas, à la faveur d'un rapport sur un COM, de me substituer à ceux qui en ont la responsabilité. Mais incontestablement, la mission de Campus France est de s'inscrire dans cette stratégie.
Je retiens la très bonne idée de Mme Dessus sur les parrainages. Ce serait un moyen d'assurer le suivi des étudiants étrangers pour qu'ils ne se sentent pas perdus. Quoi qu'il en soit, les guichets uniques vont incontestablement contribuer à une meilleure prise en charge de ces étudiants.
M. Léautey a tenu des propos très pertinents sur ce qu'il ne faut plus faire. L'enjeu de ce COM est, d'une certaine façon, d'ouvrir une nouvelle ère.
Je remercie M. Féron d'avoir rappelé que l'argent public, et donc les impôts des Français, servent effectivement à offrir un certain nombre de bourses à des étudiants étrangers. Mais encore une fois, nous n'assurons pas le financement des études de tous les étudiants étrangers accueillis en France.
Je terminerai sur la question de M. Dumas sur les partenariats. J'ai eu l'occasion d'évoquer l'AEFE. Cette structure doit inévitablement travailler avec Campus France si l'on veut assurer un lien entre l'enseignement secondaire et l'enseignement supérieur. Mais entre éducation et culture, il y a un lien évident. L'Institut français, ou d'autres structures, pourraient donc participer à cette démarche globale qui vise à renforcer notre diplomatie d'influence.