Intervention de Sandrine Mazetier

Séance en hémicycle du 15 novembre 2013 à 15h00
Loi de finances pour 2014 — Après l'article 60

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSandrine Mazetier :

Je veux commencer par remercier M. Cherki, cosignataire de notre amendement, de l’avoir défendu ardemment, avant de le retirer d’une manière qui n’était pas moins constructive. Au-delà du sujet de l’optimisation fiscale – voire de l’entreprise internationale d’escamotage de la base fiscale –, que nous n’avons pas encore épuisé dans le cadre de ce débat, notre amendement témoigne aussi de la volonté d’engager une réflexion sur la fiscalité numérique. Les pratiques dénoncées – je pense notamment au « double irlandais » – sont, certes, mises en oeuvre avec un indéniable talent par certaines entreprises du secteur du numérique, mais des entreprises d’autres secteurs y ont également recours.

Une autre question importante se pose, celle de la fiscalité sur les données exportées et exploitées en dehors du territoire européen par ces entreprises, et de la servitude volontaire du consommateur européen, qui confie ses données en vue de leur exploitation et de leur commercialisation par des entreprises qui vendent leurs services toujours plus cher et, ce faisant, exploitent de nombreux salariés.

Or, le scandale des écoutes de la NSA a démontré que le numérique et l’immatériel ont des concrétisations très tangibles : je veux parler des tuyaux, des noeuds de communication, où sont parfois « pluggés » des systèmes de contrôle, qui sont tout sauf européens. Cela ne relève pas du domaine fiscal mais démontre que l’on peut mesurer des sorties de données et qu’il serait ainsi possible d’exercer une forme de droit de timbre européen sur des données qui ont une valeur marchande énorme et sur lesquelles l’Europe ne perçoit rien. Ce sont pourtant les consommateurs européens dont la richesse est exploitée, du fait de leur pouvoir d’achat et de leur comportement. La valeur ajoutée de ces données est donc exportée et commercialisée à l’extérieur de l’Europe. De surcroît, les entreprises qui exploitent et tirent beaucoup de valeur de ces données personnelles ne font l’objet d’aucune rentrée fiscale, sur quelque territoire européen que ce soit.

Au-delà de la dénonciation des pratiques d’optimisation fiscale portées au pinacle par ces entreprises, cet amendement avait surtout une fonction d’appel, afin que l’on réfléchisse à une fiscalité du numérique et à un intégrateur européen, qui pourrait être financé dans le cadre des trente-deux chantiers d’avenir annoncés par le Président de la République. L’émergence d’un tel intégrateur aurait des conséquences importantes pour les start-up françaises, qui sont nombreuses à rencontrer du succès.

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