Cet amendement, que la commission des finances a adopté, ne change dans le livre des procédures fiscales qu’un mot, mais un mot important.
Une des difficultés que rencontre l’administration fiscale, lorsqu’elle procède à des redressements sur le fondement de l’abus de droit, est de démontrer que la réorganisation ou la délocalisation mise en oeuvre par l’entreprise a pour unique motif d’échapper à l’impôt. Pour une entreprise qui délocalise dans un paradis fiscal, ou dans un pays étape vers un paradis fiscal, il est assez aisé de prouver l’existence d’un autre élément, et de faire ainsi obstacle à l’application de l’abus de droit.
Nous proposons donc de remplacer le motif exclusif par le motif principal. Un amendement comparable avait été adopté au Sénat : M. le ministre avait alors déclaré qu’il était important de se donner le temps de réfléchir à ce dispositif, et surtout, à sa mise en oeuvre. Nous le faisons, en prévoyant un délai de deux ans.
Cet amendement reprend la proposition no 1 du rapport sur l’optimisation fiscale des entreprises dans un contexte international, adopté à l’unanimité par la commission des finances. Les entreprises font souvent valoir qu’elles respectent la lettre des législations. Certes, mais elles en contournent l’esprit. Que de grandes entreprises multinationales parviennent à ne payer aucun impôt dans pratiquement aucun pays est contraire à l’esprit des législations nationales mais aussi aux principes fondamentaux, notamment à l’article 13 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen aux termes duquel chacun est imposé en fonction de ses facultés.
Le résultat de cette optimisation fiscale agressive est que ce qui est imposé est ce qui n’est pas mobile : il s’agit, pour l’essentiel, du travail, ce qui n’est pas efficace d’un point de vue économique. De surcroît, ce sont les entreprises plus petites, qui ont bien autre chose à faire que de l’optimisation fiscale, qui acquittent l’impôt sur les sociétés, tandis que les grandes y échappent.
Ce sujet est fondamental et je pense que notre assemblée votera cet amendement sans hésiter, quitte à l’affiner ultérieurement. Les choses doivent changer dans ce domaine, et c’est à nous, parlementaires, de le dire.