Le système économique dans lequel nous vivons a parfois des effets extrêmement pervers et même dévastateurs et, en tant que citoyen, j'en combats une partie, mais je me garderai de tout manichéisme. Certains groupes, notamment américains, sont certes engagés dans une logique de très forte rentabilité mais il se produit aussi qu'ils soient dépassés par les événements. Quand un groupe rate une opération de reprise, comme ce fut le cas pour Goodyear avec Sumitomo, et qu'il doit faire face à une compétition féroce sans pouvoir investir faute de moyens si bien qu'il ne peut suivre dans la course à la compétitivité, il est contraint à des choix. Ensuite, il faut être clair : étant donné l'état du dialogue social à Amiens, les dirigeants de Goodyear, appréciant la question dans l'ensemble de ses aspects économiques et sociaux, se sont peut-être dit qu'ils ne feraient pas porter sur ce site les efforts les plus démesurés. Cela ne les a pas empêchés de programmer des investissements non négligeables, mais les négociations n'ont pas abouti. Replaçons-nous dans la stratégie du groupe : le passage au rythme en 4x8, la constitution d'un complexe industriel, le recentrage sur les pneumatiques « tourisme » à forte valeur ajoutée et le désengagement du pneumatique agricole devaient, ensemble, permettre de redresser la situation. Mais, ne parvenant pas à mettre en oeuvre une stratégie déterminée – même s'il y a eu, un temps, une hésitation sur les pneumatiques agricoles – confrontés à une contradiction permanente dans le dialogue social et à des actions en justice systématiques, peut-être les dirigeants se sont-ils dit à un moment donné qu'ils arrêtaient les frais.