Les pays et territoires d'Outre-mer (PTOM) sont des territoires insulaires de quatre États membres -Danemark, Pays Bas, Royaume Uni et France-. Pour la France, entrent dans cette catégorie la Polynésie française, les Terres australes et antarctiques, la Nouvelle Calédonie, Wallis et Futuna, Saint Barthélémy et Saint Pierre et Miquelon. Ces territoires sont associés à l'Union européenne depuis le Traité de Rome mais ils ne font pas partie de son territoire douanier et la législation européenne ne leur est pas applicable. Leur régime est largement inspiré de celui liant l'Union européenne avec les pays ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique). L'association entre l'Union européenne et les PTOM repose sur une décision d'association outre-mer (DAO) qui date de 2001 et expirera au 31 décembre 2013. Notre commission des affaires européennes avait, en 2010, établi un rapport d'information qui insistait sur la nécessité de prendre en compte les changements du contexte régional et international auxquels les PTOM doivent s'adapter - globalisation des échanges et défis environnementaux- et de substituer à la logique d'aide au développement qui a prévalu jusqu'à présent une logique de partenariat, afin de mieux refléter l'appartenance des PTOM à l'Union et de mieux prendre en compte les enjeux liés au développement de ces territoires en travaillant particulièrement sur leurs difficultés et vulnérabilités liées à l'insularité.
La proposition de nouvelle DAO consacre le changement de cap que nous souhaitions et pose quatre objectifs prioritaires : l'accroissement de la compétitivité des PTOM ; la coopération en faveur d'un développement durable et d'une gestion énergétique et environnementale visant à l'amélioration du bienêtre des populations ; les échanges commerciaux avec le maintien de relations privilégiées (absence de droits de douane et définition plus souple des règles d'origine des produits) ; une intégration plus poussée des PTOM dans leur environnement géographique, afin de leur permettre de rester des têtes de pont de l'Union européenne.
Une fois posés ces objectifs, quels sont les moyens mis en oeuvre ? La proposition initiale a été très sensiblement améliorée et le rôle primordial joué par le Parlement européen et tout particulièrement des parlementaires français dans l'élaboration de la nouvelle DAO doit être souligné. Par rapport à ce que proposait la Commission européenne, les apports sont les suivants. D'abord, les domaines de coopération entre l'Union et les PTOM ont été enrichis. Ont ainsi été inclus l'agriculture, les infrastructures avec notamment les infrastructures maritimes qui jouent un rôle primordial dans ces territoires insulaires, la formation professionnelle, le tourisme ainsi que la notion de patrimoine immatériel incluse dans l'héritage culturel et patrimonial. Par ailleurs, les PTOM seront éligibles à l'ensemble des programmes horizontaux de l'Union dont les plus importants pour la mise en oeuvre des priorités de la DAO seront LIFE pour la protection de l'environnement, Erasmus plus, Horizon 2020 qui est un programme axé sur l'excellence scientifique et sur les technologies futures, COSME orienté vers la compétitivité des entreprises qui devra être particulièrement mis en oeuvre dans des territoires souffrant d'un manque de compétitivité, Europe créative qui est un programme dédié au secteur de la culture. S'agissant des aides accordées à ces territoires dont il faut rappeler qu'ils ne sont pas éligibles aux fonds structurels de la politique régionale européenne, elles continueront à transiter par le Fonds européen de développement (FED). C'est par le FED, qui ne fait pas partie du budget de l'Union et qui est financé par les contributions des États membres, qu'est également assurée l'aide financière aux pays ACP. Nous nous étions interrogés avec Hervé Gaymard dans notre rapport de 2010 sur la pertinence de cet instrument financier et son maintien comme vecteur de coopération de l'Union européenne avec les PTOM. S'ajoute à cette interrogation de principe, les problèmes liés à la complexité et la lourdeur des procédures du FED qui ont des conséquences notamment sur la consommation de ces crédits dans des collectivités qui n'ont bien souvent pas les moyens logistiques et d'ingénierie pour les mettre en oeuvre. La formule du FED est conservée dans la nouvelle DAO. L'enveloppe financière prévue initialement par la Commission européenne à hauteur de 321 millions d'euros a toutefois été rehaussée à hauteur de 364,5 millions d'euros. Pour rappel, l'enveloppe globale pour les PTOM dans le FED pour la période 2008-2013 était de 286 millions d'euros. La Commission a inséré la nécessité de prendre en compte les moyens limités des PTOM dans la définition des modalités de programmation du FED et de la mise en oeuvre de ces programmes. En revanche, alors que c'était un point important pour la France, la Commission n'a pas accédé à la demande de simplifier drastiquement les procédures du FED. La Commission européenne a seulement revu les règles de programmation a minima afin d'avoir une plus grande souplesse dans l'élaboration des lignes directrices. Les mesures de simplification seront prises à l'occasion de l'élaboration de ces lignes et concerneront principalement l'appui budgétaire et l'instruction des dossiers. On ne peut qu'insister sur la nécessité pour la DéGéOM d'être étroitement associée à l'élaboration de ces lignes directrices afin de permettre que les crédits du FED soient plus et mieux mobilisés.
Il faut souligner enfin l'importance des questions commerciales pour des territoires dont la dépendance aux marchés européens est grande. La mondialisation et la libéralisation des échanges a en effet érodé les préférences commerciales dont bénéficient les PTOM. En effet, les produits originaires des PTOM importés dans l'Union européenne ne sont pas soumis aux droits de douane. Cet avantage accordé aux produits originaires des PTOM explique l'importance qui s'attache à la définition des règles d'origine, c'est-à-dire les conditions pour qu'un produit soit considéré comme originaire d'un PTOM, en particulier quand il est obtenu à partir, totalement ou partiellement, de produits non originaires des PTOM. Il faut noter que les pays ACP se voient souvent accorder un traitement plus favorable s'agissant des exonérations aux règles d'origine qui sont reconduites automatiquement, ce qui n'est pas toujours le cas des PTOM. Dans ce contexte, la signature par l'Union européenne d'accords de libre-échange peut avoir des conséquences très négatives pour les PTOM qui ne font pas partie du territoire douanier de l'Union et ne sont donc pas compris dans le champ d'application de ces accords. Ainsi, le projet d'accord avec le Canada ruine les espoirs de développement de filières travaillant sur des produits venant du Canada et qui étaient transformés à Saint Pierre et Miquelon avant d'accéder au territoire européen en franchise de droits de douane. La libéralisation complète des échanges entre le Canada et l'Europe érode grandement l'intérêt pour le transit par Saint Pierre et Miquelon. Un accord de libre-échange avec les États-Unis touchera par le même processus la Polynésie française ou Saint Martin.
Sous ces réserves, et compte tenu des avancées obtenues par le Parlement européen sur la nouvelle décision d'association, je vous propose d'adopter la présente proposition d'acte communautaire.