Intervention de Christian Caleca

Réunion du 6 novembre 2013 à 16h30
Commission d'enquête relative aux causes du projet de fermeture de l'usine goodyear d'amiens-nord, et à ses conséquences économiques, sociales et environnementales et aux enseignements liés au caractère représentatif qu'on peut tirer de ce cas

Christian Caleca, délégué général du Syndicat national du caoutchouc et des polymères :

En France, le secteur du caoutchouc regroupe environ 250 entreprises, dont deux leaders mondiaux – Michelin dans le domaine du pneumatique ; Hutchinson dans celui du caoutchouc industriel – et de très nombreuses PME. En 2012, ces entreprises employaient 52 000 salariés au total et ont réalisé un chiffre d'affaires de 12,4 milliards d'euros. Cette même année, la balance commerciale du secteur est demeurée positive.

L'industrie française du caoutchouc reste solide à l'échelle internationale : elle est la deuxième en Europe après celle de l'Allemagne et se classe parmi les cinq ou six premières mondiales. Le caoutchouc est un matériau aux propriétés extraordinaires qui conserve un potentiel de développement très important. Ses applications sont multiples, notamment dans des secteurs sensibles.

Le premier enjeu pour le SNCP est d'améliorer le dialogue social. Nous essayons de faire vivre, avec les organisations syndicales, la convention collective spécifique à la branche. En outre, nous nous appliquons à développer, grâce à la formation professionnelle, les compétences dont nos entreprises auront besoin demain. D'une manière générale, nous cherchons à conclure des accords gagnant-gagnant avec les organisations syndicales.

Le deuxième enjeu de la profession est de respecter l'environnement tout en préservant la compétitivité des entreprises. Dans ce domaine, nous sommes confrontés à une inflation de textes réglementaires d'origine européenne ou nationale. Nous aidons les PME, qui éprouvent souvent des difficultés à assimiler cette réglementation. En outre, il conviendrait de mieux contrôler les produits importés aux frontières de l'Union européenne : beaucoup d'entre eux ne sont pas conformes à la réglementation européenne, ce qui pénalise nos PME. C'est d'ailleurs un sujet de réflexion pour la représentation nationale.

D'autre part, nous nous efforçons de développer une filière verte. L'industrie du caoutchouc est née de l'exploitation d'un végétal renouvelable, l'hévéa. Les caoutchoucs de synthèse dérivés du pétrole ont été développés dans les années d'après-guerre. Aujourd'hui, nous opérons une véritable révolution : nous essayons de faire entrer le maximum d'ingrédients renouvelables dans la composition de nos produits. C'est un enjeu à la fois scientifique et économique. Nous réalisons également des efforts importants en matière de recyclage. La filière du pneumatique est exemplaire à cet égard : 99 % des pneumatiques usagés sont récupérés et réutilisés ; nous cherchons à les valoriser au mieux.

Le SNCP cherche à répondre à une troisième série d'enjeux, de nature économique. Nous souhaitons créer un environnement propice à l'entrepreneuriat. Cela implique d'améliorer les relations interentreprises, en particulier au sein de la filière automobile, qui représente à elle seule 65 à 70 % des débouchés de l'industrie du caoutchouc à l'échelle mondiale. Nous nous efforçons de rééquilibrer les relations entre les PME et les grands donneurs d'ordre. De plus, nos entreprises doivent restaurer leurs marges pour réaliser des investissements de productivité, financer leur R&D et mettre en oeuvre la transition énergétique. Nous devons également favoriser les exportations de la filière et son développement à l'international. Enfin, nous veillons à rendre nos métiers plus attractifs auprès des jeunes, afin de satisfaire nos besoins de recrutement.

Une quatrième série d'enjeux se présente à nous en matière d'innovation. Grâce à son positionnement unique, le CFCP est en mesure de favoriser la recherche tant individuelle que collective. En outre, comme cela a été dit, nous nous mobilisons pour participer à l'élaboration des normes qui régissent notre secteur d'activité. Il est essentiel que des Français soient présents dans les organismes de normalisation – la représentation nationale est bien placée pour le savoir. C'est pourquoi le SNCP consacre près de 25 % de son budget à ce travail d'influence. D'autre part, comme nous l'avons déjà mentionné, nous essayons de généraliser l'utilisation de matières premières biosourcées ou issues du recyclage. Enfin, nous recherchons des applications nouvelles pour le caoutchouc dans des secteurs de pointe tels que l'industrie spatiale, l'aéronautique, l'énergie ou les transports.

J'en viens au dialogue social. Il existe deux instances patronales dans la branche du caoutchouc. La commission sociale, composée de directeurs des ressources humaines et de dirigeants d'entreprises de la branche, se réunit au moins deux fois par an pour définir les thèmes sur lesquels devrait porter le dialogue social de son point de vue. Quant à la délégation patronale, elle est l'interlocuteur des organisations syndicales. Elle est constituée par les deux organisations patronales de notre secteur d'activité : le SNCP – porte-parole officiel de la branche – et l'union des syndicats des PME du caoutchouc et de la plasturgie (UCAPLAST).

Le dialogue social est mené au sein de trois instances paritaires. La commission paritaire de concertation se réunit au début de chaque année pour fixer une méthode et un calendrier prévisionnel de négociation. Ensuite, la commission paritaire plénière traite cet ordre du jour au cours des six à dix séances qu'elle tient dans l'année. Elle peut néanmoins se saisir de toute autre question. Récemment, elle a travaillé sur des sujets tels que les salaires minima de branche, l'actualisation de la convention collective, la formation professionnelle, la pénibilité.

Enfin, la commission paritaire nationale de l'emploi (CPNE) étudie l'évolution de l'emploi dans la profession et établit chaque année un bilan social sur la base d'enquêtes renseignées par les entreprises. La CPNE suit également les travaux de l'organisme paritaire collecteur agréé (OPCA) de la branche, qui l'informe sur toutes les actions menées dans le domaine de la formation professionnelle et sur la réalisation des plans de formation par les entreprises. Sur cette base, la CPNE définit les orientations en matière de formation professionnelle.

Lors de la réunion de la CPNE du 18 septembre 2013, la société Goodyear Dunlop Tires France a informé la commission de son projet de fermeture de l'usine d'Amiens-Nord et des mesures de reclassement qu'elle comptait prendre dans ce cadre. Elle a proposé de communiquer le profil des salariés à reclasser et de créer un site Internet dédié. Elle a suggéré que cette information soit relayée sur les sites du SNCP et de l'UCAPLAST.

Depuis 2009, les partenaires sociaux ont signé une dizaine d'accords sur des sujets variés, ce qui atteste de la pertinence du dialogue social dans la branche du caoutchouc.

Je terminerai en évoquant les efforts de la branche en matière de formation professionnelle. En 2012, 9,3 millions d'euros ont été collectés à cette fin auprès des entreprises du secteur. Ce budget a permis de financer des plans de formation, dont les bénéficiaires ont été, pour les deux tiers, des ouvriers, des employés, pour un tiers, des cadres. Cette répartition est conforme à la structure des emplois dans la branche.

En outre, notre branche a été l'une des premières à introduire les certificats de qualification professionnelle (CQP) dans le cadre de la validation des acquis de l'expérience (VAE). Ces certificats constituent une véritable reconnaissance professionnelle pour les salariés qui travaillent dans les unités de production. Nous avons notamment délivré des CQP « opérateur de fabrication caoutchouc », « conducteur d'équipements industriels » et « animateur d'équipe ». En raison du ralentissement de l'activité en 2012 et 2013, le système des CQP se met en place lentement, mais il est appelé à prendre de l'ampleur dans les années qui viennent.

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