Intervention de Manuel Valls

Réunion du 14 novembre 2013 à 10h00
Commission spéciale pour l'examen de la proposition de loi renforçant la lutte contre le système prostitutionnel

Manuel Valls, ministre de l'intérieur :

Madame Ameline, au moment même où nous parlons, Mme Vallaud-Belkacem intervient à Lyon dans le cadre de la deuxième conférence mondiale d'Interpol consacrée au trafic d'êtres humains. C'est à ce niveau international et européen que nous devons agir en effet.

Madame Mazetier, dans tous les domaines - domaines qui se confondent d'ailleurs, trafic de drogues et trafic d'êtres humains – les criminels ont un temps d'avance sur nous. Ils disposent de moyens considérables – moyens de déplacement, moyens financiers issus de la traite d'êtres humains et qui leur permettent de corrompre des administrations, dans certains pays européens. Heureusement qu'il ne vous est pas facile d'obtenir un visa ! – mais c'est parce que vous respectez la loi. Une très grande vigilance s'impose, car les réseaux criminels, très organisés, ont les moyens d'obtenir les documents qui leur permettent d'agir sur notre territoire.

Je regarderai de près ce qui se passe au Bois de Vincennes et ailleurs. Ce qui intéresse les policiers, c'est de démanteler des réseaux. Les nuisances observées à Vincennes, à Boulogne, sur les boulevards des Maréchaux ou à Grenoble, que j'évoquais, – sur l'avenue même qui part de la gare – sont une réalité insupportable, la nuit et parfois même le jour. Un travail de police se fait auprès des prostituées, qui peuvent fournir certains renseignements. Nous ne sommes pas dans un monde idéal où tout serait parfait, la réalité est complexe. Je reparlerai de cette question au préfet de police.

Certaines des personnes que vous avez auditionnées ont déclaré que l'arsenal juridique destiné à lutter contre l'exploitation de la prostitution sur Internet était globalement satisfaisant. Les freins limitant son efficacité résident dans la difficulté de mettre en oeuvre une coopération internationale efficace, notamment pour le démantèlement des réseaux utilisant des sites d'escorts et d'annonces spécialisées, systématiquement hébergés dans les pays d'origine des prostituées – en Russie, en Biélorussie, en Ukraine et dans le pays baltes, avec lesquels nous travaillons, mais également en Suisse ou aux États-Unis. Les difficultés de mise en oeuvre s'expliquent par la disparité des législations nationales ou par l'absence de volonté des autorités des pays concernés, notamment en raison de la corruption.

Enfin, il est actuellement impossible de quantifier la prostitution par le vecteur d'Internet. Elle doit cependant être mise en relation avec la recrudescence des agressions, des vols et des viols commis à l'encontre des prostituées effectuant leurs prestations dans des chambres d'hôtels ou des appartements, en région parisienne comme dans les villes des régions.

Notre travail doit s'inscrire dans le dispositif législatif français consacré à la répression du proxénétisme et de la traite des êtres humains, ainsi que dans les dispositions spécifiques relatives à la lutte contre la criminalité organisée, qui permettent l'enquête sous pseudonyme, les perquisitions informatiques, la captation des données informatiques, la réquisition et la saisie de données informatiques – je pense à la conservation, pour une durée ne pouvant excéder un an, du contenu des données consultées par les personnes utilisatrices des services – et le décryptage. L'infiltration peut également être étendue à d'autres infractions. Le groupe de travail que j'ai évoqué étudie cela. Il est évident que l'Internet est pour nous une priorité.

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