Intervention de Philippe Gosselin

Réunion du 13 novembre 2013 à 10h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Gosselin :

Je voudrais exprimer mes profonds regrets devant la méthode employée. Les propositions du rapport que Philippe Doucet et moi-même avions présenté au mois de juin étaient parvenues à rassembler toute la représentation nationale. Nous nous étions accordés pour rappeler la nécessité d'un statut de l'élu local – non pour créer des privilèges, mais pour assumer le coût de la démocratie – et reconnaître les droits et les devoirs de ceux qui ont fait le choix de se consacrer à l'intérêt général au sein des collectivités locales. Un statut de l'élu qui permette d'en finir avec ce « serpent de mer » est attendu depuis des dizaines d'années ; les associations d'élus – l'Association des maires ruraux de France, l'Association des petites villes de France, la Fédération des maires des villes moyennes, l'Association des maires de France (AMF) et les autres – appellent de leurs voeux cette réforme qui aurait dû nous réunir aujourd'hui.

Je regrette que, en dépit du bon sens, le calendrier ait été bousculé. La proposition de loi a été déposée depuis des longs mois par nos collègues sénateurs Gourault et Sueur, mais le Gouvernement s'est abstenu de l'inscrire à l'ordre du jour. L'AMF a sollicité le ministre de l'Intérieur à plusieurs reprises, sans résultat. Cette accélération du calendrier, marquée par l'absence de concertation, met tout le monde en difficulté, entache le consensus qui entourait les travaux de notre mission et en gâche les fruits. Perdant pied face aux pouvoirs locaux dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires, le Gouvernement cherche sans doute à éviter les sifflets au Premier ministre, si celui-ci se rend au congrès des maires. Cette instrumentalisation des élus locaux est d'autant plus dommageable que la nécessité de la réforme faisait l'objet d'un véritable consensus. Il faut rendre hommage aux réalisations de nos concitoyens qui s'engagent dans la vie locale – élus des communes, intercommunalités, conseils généraux ou régionaux –, sécuriser l'entrée, l'exercice et la sortie du mandat, assurer aux élus les moyens d'exercer dignement leur mission et rappeler leurs droits et devoirs.

À ce stade, le groupe UMP ne saurait se rapprocher de la majorité. Le Gouvernement – je regrette l'absence, à cette réunion, du ministre de l'Intérieur et de la ministre en charge de la décentralisation – doit nous expliquer cette accélération du calendrier.

Sur le fond, les amendements que j'ai déposés traitent plusieurs difficultés. La majorité a voté, dans la précipitation, une série de réformes dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013. Son article 18, notamment, vise à parfaire la couverture des risques assurés par la sécurité sociale pour les élus. Si nous ne pouvons que saluer cette volonté, la version retenue – conçue sans concertation – a entraîné d'importants dysfonctionnements. Le seuil au-dessus duquel les indemnités sont assujetties aux cotisations sociales n'a ainsi été fixé que par un décret d'avril 2013 – et une circulaire ultérieure –, conférant aux dispositions adoptées un caractère rétroactif. Les élus ont ainsi découvert au mois de juin 2013 que leurs indemnités étaient ponctionnées, parfois de façon très importante puisque la fraction représentative des frais d'emploi a été incluse dans l'assiette. Les élus paient donc des cotisations sociales sur un revenu dont ils ne disposent pas ! C'est en vain que les associations d'élus – dont l'AMF – se sont émues de cette situation, alors même que les URSSAF et les caisses primaires d'assurance maladie ont été, pendant des mois, incapables de mettre en application cet article – problème que nous n'avions pas pu pointer dans notre rapport du mois de juin.

Autre problème : certains élus locaux se sont retrouvés sans couverture sociale, radiés par les caisses qu'ils ont informées du changement de leur situation. Les ministères de la Santé et de l'Intérieur sont incapables de nous donner des chiffres précis mais confirment que le fait de percevoir une indemnité de fonction a privé certains élus du versement de leur retraite. Le système de cumul entre l'emploi et la retraite a été mis à mal. Alors que l'AMF le souligne depuis des mois, il a fallu attendre la réforme des retraites pour qu'un amendement à l'article 12, voté le 15 octobre à l'Assemblée nationale, tente de modifier cet état de fait. Cependant, les mesures proposées par le Gouvernement ne prendraient effet qu'au 1er janvier 2015 ; le problème – qui concerne plusieurs centaines d'élus locaux – reste donc entier pour les années 2013 et 2014.

Il faut résoudre toutes ces questions avant d'aborder en séance ce texte qui aurait pu nous réunir si, en vue du congrès des maires qui s'annonce difficile, le Gouvernement n'avait pas fait le choix de la précipitation. À ce stade, et dans l'attente de réponses claires et précises de la part du Gouvernement, c'est avec regret que le groupe UMP ne pourra pas le voter.

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