Intervention de Thérèse Guilbert

Réunion du 19 novembre 2013 à 21h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThérèse Guilbert :

Le Sénat a souhaité introduire à l'article 5 une disposition obligeant les opérateurs de télécommunications à recueillir le consentement préalable de chacun de leurs abonnés à la transmission de leurs données personnelles à des professionnels à des fins de prospection commerciale. Ce dispositif dit d'opt-in me semble inapproprié.

Appliquer en matière de démarchage téléphonique un système d'opt-in pourrait durablement pénaliser un secteur économique créateur d'emplois – cette filière représente aujourd'hui près de 273 000 emplois en France et a généré plus de 20 000 créations d'emplois depuis 2009. Certaines projections avancent que la mise en oeuvre d'une mesure de ce type mettrait en danger 54 000 PME et ferait même courir un risque de faillite à 19 000 d'entre elles. Un tel dispositif ne toucherait pas que les centres d'appels. Nombreuse d'entreprises, surtout PME, n'externalisent pas leurs opérations de prospection commerciale, mais les réalisent elles-mêmes, cette recherche de nouveaux clients étant essentielle au maintien de leur activité.

De plus, la proposition de règlement sur la protection des données personnelles actuellement en négociation à Bruxelles retient la solution d'un opt-out pour lutter contre le démarchage téléphonique abusif : il s'agit de reconnaître au consommateur le droit de s'opposer, à tout moment, à l'utilisation, à des fins de prospection commerciale, de ces données personnelles. C'est une solution similaire au renforcement de la liste PACITEL que proposait la version du projet de loi adoptée par l'Assemblée nationale. À l'inverse, la solution de l'opt-in n'est pas conforme à la proposition de texte communautaire et son inscription dans la loi ferait courir à la France le risque d'un contentieux communautaire.

Surtout, il n'est pas sûr que ce dispositif de « liste positive » soit efficace pour protéger les consommateurs contre le démarchage téléphonique abusif. En effet, sa mise en oeuvre repose exclusivement sur les opérateurs de télécommunications, qui auraient la charge de recueillir le consentement préalable de leurs abonnés à être démarchés par téléphone. Or, aujourd'hui, le marché de la prospection commerciale par téléphone ne dépend plus exclusivement des opérateurs de télécommunications, beaucoup d'entreprises échangeant entre elles leurs fichiers de prospection. Le fait pour un consommateur d'indiquer à son fournisseur de services téléphoniques son refus d'être démarché n'empêchera pas certaines entreprises de s'échanger directement les coordonnées dudit consommateur, sans passer par un quelconque opérateur de télécommunications. Ces mêmes entreprises pourront continuer à démarcher le consommateur en toute impunité.

La solution « liste positive » insérée dans le projet de loi à l'issue de la première lecture est donc en porte-à-faux avec la réalité du marché de la prospection commerciale par téléphone, à la différence de la liste que le Gouvernement proposait dans la version initiale du texte, opposable à l'ensemble des entreprises se livrant à du démarchage par téléphone. C'est pourquoi le présent amendement propose de supprimer la disposition introduite dans le texte par le Sénat et de rétablir la mesure qui proposait de créer une liste d'opposition au démarchage téléphonique, sur le modèle de la liste PACITEL existante.

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