Intervention de Laurent Attar-Bayrou

Réunion du 17 octobre 2012 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Laurent Attar-Bayrou, président national de la Fédération nationale des anciens des missions extérieures et OPEX, FNAME :

Je tiens à m'associer aux revendications de mes grands anciens dans le monde combattant, dont fait intégralement partie la jeune génération. J'adresse une pensée à nos camarades qui se sont levés aujourd'hui en opérations – ils seront anciens combattants des opérations extérieures. J'y associe les 300 000 militaires qui ont déjà participé à des OPEX.

Notre génération est à cheval sur le monde des armées, le monde combattant et le monde patriotique. Nos compagnons partis en OPEX rencontrent, à leur retour, de nombreuses difficultés pour se reconvertir. Conformément aux engagements des gouvernements successifs, l'armée doit assurer la reconversion de 15 000 personnes, dont un grand nombre est revenu des opérations extérieures meurtri dans la chair et l'esprit. À cet égard, le sas de décompression, installé sur l'île de Chypre, est nécessaire. On peut seulement regretter que le séjour soit un peu court.

Une fois réintégrés dans leurs unités, les militaires ne bénéficient plus d'un suivi psychologique et physique de longue durée. Il en résulte qu'un grand nombre d'entre eux qui ont bénéficié grâce à l'armée d'une formation résilie leur contrat. L'accompagnement est insuffisant, ce qui explique un taux de réengagement faible.

Avant d'être des militaires, ce sont des citoyens, dont il convient d'assurer les droits, ce qui passe par une bonne réinsertion dans la vie civile. Celle-ci emprunte notamment la voie des écoles de reconversion de l'ONAC. Malheureusement, par manque de volonté politique, seuls cinquante militaires sur un potentiel de 15 000 passent par ces écoles ! Comment pourraient-elles être bénéficiaires ? Il vous appartient, mesdames et messieurs les députés, d'avoir la volonté politique de promouvoir le développement des écoles de l'ONAC.

Quant aux officiers supérieurs qui ont assuré un commandement opérationnel en OPEX, ils rencontrent des difficultés spécifiques à leur retour du fait que, dans leurs unités, ils sont dépossédés d'une partie de leur autorité, en raison de la création, prévue dans le Livre blanc, des groupements de soutien de base de défense – GSBdD.

Je tiens aussi à vous alerter sur la création, à l'occasion du désengagement de la France d'Afghanistan, de deux catégories de personnels envoyés en OPEX : les combattants et les non-combattants. L'Afghanistan aurait-elle vocation à devenir un terrain de manoeuvre de l'OTAN ? Les militaires se donnent entièrement à leur mission : de grâce, ne les divisez pas ! En Afghanistan, ils sont et seront tous combattants, jusqu'au terme du retrait fixé par l'État français.

On nous répète à l'envi que le ministère de la défense doit faire des économies. Il ne faudrait oublier ni le Livre blanc qui, depuis 2008, a déjà permis de réaliser de substantielles économies, ni la RGPP qui a conduit à l'éviction de quelque 75 000 personnes. La RGPP a également conduit à la dissolution de la Direction des statuts, des pensions et de la réinsertion sociale – DSPRS – et à l'éclatement de ses missions, faisant le ministère de la défense juge et partie dans le traitement de la direction des ressources humaines – DRH-MD – et des pensions militaires d'invalidité – PMI.

Nous demandons en outre l'attribution aux anciens des missions extérieures du fonds de solidarité, au même titre qu'aux anciens combattants d'AFN, l'attribution de la croix du combattant volontaire pour tous ceux qui ont servi en OPEX – ils sont tous volontaires –, la création d'une médaille commémorative spécifique pour les militaires ayant participé à la guerre du Golfe et l'attribution de la carte du combattant au groupement logistique – chacun se rappelle qu'il était alors la gloire de l'armée française – : or ses membres n'y ont pas droit !

Le toilettage du code des PMI est assurément nécessaire compte tenu de la réforme subie par le monde combattant. Toutefois, nous n'en connaissons aujourd'hui que la jaquette, à savoir les têtes de chapitre, ignorant toujours les dispositions qui seront retranchées ou ajoutées.

Je tiens également à remercier le député Philippe Meunier, ici présent, qui a été l'initiateur d'une proposition de loi sur l'inscription obligatoire sur les monuments aux morts des morts pour la France. Je vous remercie, monsieur le député, en mon nom et au nom de leurs familles, d'avoir permis la réhabilitation des militaires tombés en OPEX.

Si, par ailleurs, nous sommes très heureux que, désormais, tous les morts pour la France soient commémorés le 11 novembre, nous demandons toutefois la création d'une journée commémorative des opérations extérieures. Nous sommes en effet la seule génération de combattant à ne pas avoir de journée spécifique de commémoration.

Enfin, le monument dédié aux OPEX, qui répond à la volonté de ministres successifs de la défense, a fait l'objet d'un rapport, dirigé par le général Thorette, qui a dû dans un premier temps, en l'absence d'un service dédié au ministère de la défense, retrouvé la trace des 601 morts en opérations extérieures. Nous sommes d'accord avec les conclusions du rapport, s'agissant notamment de l'installation du monument à Paris. En revanche, nous nous insurgeons contre l'éventualité de faire des économies en se contentant de déplacer un monument existant. Va-t-on un jour inventer le monument aux morts itinérant ? Cette question a déjà été débattue dans le cadre du rapport Thorette. Que dire aux familles ? Mesdames et messieurs les députés, fait-on des économies avec le sang versé ?

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