Souffrez, madame la garde des Sceaux, qu'un membre de l'opposition s'exprime en usant – et non en abusant – de son droit d'opposition sans déclencher votre colère et votre indignation.
En matière pénale, votre ligne directrice est à l'évidence de défaire tout ce qu'ont fait vos prédécesseurs. À cet égard, votre circulaire pénale du 19 septembre dernier fera date. J'y vois la confirmation de ce que vous nous avez dit lors de votre première audition : la sécurité n'est pas la mission de votre ministère.
Sous un certain angle, toutefois, ce budget s'inscrit dans la continuité de ceux de vos prédécesseurs puisque jamais les crédits de la justice n'ont autant augmenté que ces dix dernières années, où cet effort, conjugué à d'autres, s'est traduit pas une baisse de la délinquance sans précédent.
Comme l'a montré Sébastien Huyghe, la politique pénitentiaire n'est pas, loin s'en faut, votre priorité, étant donné que vous ne considérez plus la prison comme la sanction de référence. La construction des places prévues se poursuit, certes, mais les 20 000 places supplémentaires que nous proposions ne seront pas réalisées. Les détenus en pâtiront les premiers puisque nombre d'établissements vétustes ne seront pas abandonnés.
Par ailleurs, votre politique repose sur le principe qu'il y a trop de condamnés à des peines de prison. Nous considérons pour notre part que l'on ne peut abandonner ainsi, par simple idéologie, la détention.
Bien que la décision de la sanction appartienne aux seuls juges, vous vous prononcez par exemple contre les courtes peines. Vous savez pourtant que 82 000 peines de prison ferme restent inexécutées en France, ce qui nous amène à considérer que notre pays ne souffre pas d'un excès d'emprisonnement mais d'un manque de places de prison. Il faudrait porter le parc carcéral à 80 000 places, tout en privilégiant la construction de structures allégées, moins coûteuses, pour les détenus qui ne nécessitent pas un niveau maximal de sécurité, et tout en permettant les peines alternatives à la prison – qui du reste n'ont jamais été prononcées en aussi grand nombre qu'aujourd'hui. Peut-on inférer de l'insuffisance du budget consacré à la construction que vous êtes favorable au numerus clausus en matière de peines de prison ?
Par ailleurs, comment améliorer la lutte contre l'islamisme radical dans les établissements pénitentiaires ? Vous comptez augmenter le nombre des imams, ce qui est une bonne chose, mais cela ne peut être la seule mesure. Bien que des dispositions aient déjà été prises par le passé, il reste certainement à faire !
En matière d'exécution des peines, la loi d'orientation et de programmation pour la justice de 2002 visait à développer la capacité de sanction – objectif que nous partageons tous, quelle que soit la sanction infligée – par la création de bureaux d'exécution des peines, dont les premiers ont été mis en oeuvre il y a quelques années. Quand atteindra-t-on la généralisation de ces structures, si tout au moins vous en avez l'intention ?
Pourriez-vous également nous apporter des précisions sur les unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA). Le taux d'occupation de celle de Lyon dépasse les 80 %. Deux autres unités sont en service et il est prévu d'en ouvrir neuf d'ici à 2014, dont une de 440 lits à Villejuif. Quel est l'état d'avancement de ce programme. Quand l'UHSA de Villejuif verra-t-elle le jour ? La capacité de 440 lits sera-t-elle respectée ?
Où en est-on dans le transfert des escortes de prisonniers à l'administration pénitentiaire ?
Quel est le calendrier des travaux prévus à la prison de la Santé ? Quelle sera la date de livraison ? Confirmez-vous qu'un établissement d'environ 350 places en région parisienne permettra de reconstituer la capacité initiale de 1 300 places de l'établissement, sachant que les places rénovées ne seront plus que 1 000 ?
Prévoit-on de créer un nouveau centre éducatif fermé en région parisienne ?
Enfin, vous n'avez pas parlé du nouveau tribunal de grande instance de Paris. Vous êtes, je crois, hostile aux partenariats public-privé. Quel est dès lors l'avenir de ce projet ?