J'ai trois motifs de satisfaction et trois sujets d'inquiétude.
Premier motif de satisfaction : la réflexion sur le sens de la peine, qui se traduit par la création de la conférence de consensus et qui limitera le recours à l'emprisonnement. Le recentrement de la peine de prison est une des réponses à la délinquance, sachant que ces réponses doivent être immédiates. La généralisation des bureaux d'exécution des peines constitue également un signe encourageant à cet égard. La limitation du parc pénitentiaire à 63 500 places en 2015 nous placera dans la moyenne européenne et mettra fin à la fuite en avant du « tout carcéral ».
Deuxième motif de satisfaction : l'attention que vous portez, madame la garde des Sceaux, à la justice civile, qui est la justice du quotidien.
Troisième motif de satisfaction : dans cet ensemble de mesures, la place des victimes est sauvegardée, avec notamment la réorientation du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD).
J'en viens aux sujets d'inquiétude. Nous héritons d'une situation difficile. La politique néfaste menée pendant dix ans en est la cause, mais pas seulement. La sous-administration et la sous-dotation de la Justice sont anciennes. Il en résulte trois urgences.
D'abord, la surpopulation pénale, mesurée à 132 % dans les maisons d'arrêt. La conférence de consensus doit aboutir au plus vite à des solutions où la prison ne sera plus l'élément central.
Ensuite, la résorption des délais de traitement des dossiers. Votre rapport nous apprend qu'il s'écoule un peu plus de 12 mois entre la commission d'une infraction et son jugement par le tribunal correctionnel, et 16,3 mois entre la commission d'une infraction par un mineur et la décision rendue par la justice des mineurs. Nous devons donc simplifier le plus possible la tâche des tribunaux. En particulier, je crois nécessaire de revenir sur la création des tribunaux correctionnels pour mineurs, qui n'aura été qu'un effet d'annonce : sur les 33 000 mineurs poursuivis, seuls 630 sont concernés et la procédure qui leur est appliquée complique la tâche des tribunaux pour enfants. Il faut aussi revenir sur les peines plancher, qui ne sont prononcées que dans 10 000 cas sur les 600 000 dossiers jugés chaque année par les tribunaux correctionnels mais qui compliquent et ralentissent les procédures.
Enfin, la frustration des personnels. Jean-Yves Le Bouillonnec a souligné à juste titre que les agents de l'administration et les greffiers attendent une reconnaissance, alors que la gestion par les primes engendre des rivalités d'un corps à l'autre. Les personnels judiciaires reprochent aux pénitentiaires d'être mieux payés, tandis que les pénitentiaires font valoir leurs sujétions particulières. On gagnerait en sérénité en mettant à plat le système et en consentant un effort budgétaire important en direction de ces catégories.