C'est en effet au niveau des accords de branche que cela se passe. Mais ce n'est pas simple, dans la mesure où les classifications de branche sont le résultat d'un compromis social. Parfois même, l'objectif est de ne rien changer !
Les grilles de classifications hiérarchisent les emplois et déterminent, ensuite, la hiérarchie des salaires. Si l'on touche aux grilles de classification, on remet en question la hiérarchie des emplois en disant, par exemple, que tel emploi a davantage de valeur. C'est extrêmement délicat.
Aujourd'hui, les partenaires sociaux salariés commencent à s'ouvrir à la question. Rachel Silvera et moi-même présentons régulièrement ce travail auprès de la CGT, de FO et de la CFDT – et même de syndicats masculins « très ouvriers ». Mais il existe déjà des moyens d'action.
D'abord, il y a la plainte individuelle. Mais il faut que les juges, au sein des prud'hommes, soient formés à la question. Or il y a encore aujourd'hui des juges qui disent ne pas pouvoir comparer des emplois parce qu'ils sont différents.
Ensuite, il y a le niveau collectif. Je pense, par exemple, que le rapport de situation comparée pourrait intégrer un critère permettant de mettre en lumière ces inégalités de salaire. Aujourd'hui, celles-ci ne sont même pas mesurées. C'est d'ailleurs à partir de là que Rachel Silvera et moi-même avons commencé notre recherche, dont le sujet était : comment mesurer les inégalités de salaires ? Nous nous sommes alors aperçues que l'on s'appuyait sur le principe « à travail égal, salaire égal », et pas sur le principe juridique de l'égalité salariale, pourtant consacré par la loi.