Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, les orientations de cette loi de programmation militaire prolongent pour l’essentiel les politiques libérales et atlantistes menées depuis 2007-2008, quand la France a décidé un changement stratégique majeur dans sa défense nationale en se ralliant à l’OTAN. Depuis cette date et l’intégration de notre pays à cette organisation, 48 000 emplois ont été détruits dans l’armée et dans les entreprises d’État rattachées au ministère de la défense. Non seulement ce projet de LPM ne prend pas le contre-pied des logiques à l’oeuvre sous la précédente législature, mais il prévoit de nouvelles réductions drastiques de moyens pour respecter les contraintes budgétaires imposées de Bruxelles et pour inscrire notre défense nationale dans le moule atlantiste.
Les réductions de budgets auront notamment de graves conséquences pour les personnels d’État rattachés au ministère de la défense : 34 000 suppressions d’emplois sont programmées pour la période 2014-2019, auxquelles il faudrait ajouter les suppressions encore plus massives enregistrées depuis 2008. Au total, l’hémorragie avoisinera les 82 000 postes en 2019 ! Sans oublier les répercussions directes sur notre outil de défense et son autonomie, ces suppressions d’emplois sont aussi dévastatrices pour l’activité économique des territoires abritant des entreprises stratégiques d’État.
À l’opposé, les députés du Front de gauche considèrent que la défense nationale est un secteur stratégique de l’État qui ne peut être soumis à privatisation ou externalisation. Le modèle de défense que nous portons renvoie aux questions essentielles de la souveraineté et de l’indépendance de la nation. Voilà pourquoi nous réaffirmons avec détermination que la défense doit rester 100 % publique et ne plus être soumise aux diktats de l’OTAN.
Pour illustrer mon propos sur les impacts négatifs de ces orientations au niveau des territoires, je citerai la situation de l’AIA – Atelier Industriel de l’Aéronautique – de Clermont-Ferrand. Ses 1 250 salariés subissent chaque jour les non-remplacements de postes, ce qui entraîne une pression sans cesse accrue. Cette entreprise occupe pourtant une position stratégique et possède un savoir-faire unique. Les suppressions d’emplois annoncées et les baisses de commandes envisagées provoquent une inquiétude légitime parmi les salariés du site auvergnat, d’autant plus que, au regard du contenu de la LPM 2014-2019, nous nous acheminons vers la fermeture de nombreuses bases aériennes à travers le pays. La structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques de la défense, la SIMMAD, a passé dernièrement deux contrats d’externalisation partielle de la maintenance du PUMA portant sur les 113 appareils que comporte cette flotte ; par cette externalisation, l’État ne laisse aujourd’hui qu’à peine 15 % de la maintenance aéronautique militaire au secteur étatique. C’est l’avenir des entreprises publiques comme l’AIA qui est en cause. Ainsi, les antennes de l’AIA à Toul et à Cuers sont clairement menacées par cette politique de liquidation. Les baisses de charge observées font très nettement apparaître le rôle majeur de la sous-traitance, ce qui nuit au service public et au travail de maintenance des appareils de l’armée de l’air. Quant à l’AIA de Clermont-Ferrand, la cinquantaine de départs en retraite annuels depuis 2008 ne sont que partiellement remplacés, et par des ouvriers contractuels. Cette précarisation et cette réduction de personnels s’accompagnent d’un accroissement de la productivité des salariés, avec comme conséquence une dégradation des conditions de travail et un mal-être grandissant.
Monsieur le ministre, les inquiétudes des salariés sont grandissantes et, au-delà, ce sont les populations et les élus locaux qui sont inquiets de l’avenir industriel de leurs territoires et de l’avenir même de notre défense nationale.
En conclusion, je citerai uniquement les conclusions du voeu voté à l’unanimité par la majorité de gauche du conseil régional d’Auvergne : « Le conseil régional souhaite réaffirmer le rôle stratégique de la défense nationale et sa nécessaire indépendance qui sont les éléments indispensables de la souveraineté nationale, dans l’état actuel des choses. Il demande au Gouvernement de veiller à préserver les intérêts des entreprises d’État rattachées au ministère de la défense, en particulier l’Atelier Industriel de l’Aéronautique d’Aulnat. Il souhaite parallèlement que le même intérêt soit manifesté par l’Assemblée nationale lors des débats sur l’évolution des entreprises d’État rattachées au ministère de la défense, afin d’assurer une maîtrise publique du secteur de la défense nationale. »