Je termine mon intervention en évoquant l’exemple d’une armée très chère au Toulonnais, que je suis : la marine. Ah qu’il est loin le temps où l’amiral Peytard – notre ami Hervé Morin était au ministère – me démontrait, exemple à l’appui, qu’il était imprudent de descendre au-dessous de vingt-trois frégates de premier rang. Aujourd’hui l’objectif famélique est fixé à quinze !
Qu’il est loin aussi le temps où l’on évoquait la construction pour 2020 du deuxième porte-avions !
À l’issue de cette LPM, huit frégates multimissions seront livrées dont deux antiaériennes. Le format réel sera donc en 2020 de sept frégates anti sous-marins, dont une âgée de plus de trente ans, donc de quatre mobilisables si on tient compte d’un taux de disponibilité situé entre 60 et 70 %.
Un seul Barracuda sera livré avant 2020. La marine disposera donc à cette date, sur six sous-marins nucléaires d’attaque, de cinq dont l’âge sera compris entre trente et trente-six ans !
Autre exemple : les avions de surveillance maritime Atlantique 2. La marine dispose actuellement de vingt-sept avions de ce type âgés de seize à vingt-quatre ans. Selon la LPM, quinze doivent être rénovés et dotés de radars, moyens d’écoute et système électro-optique de dernière génération, mais seulement quatre le seront avant 2020. La marine nationale ne sera donc capable de mettre en oeuvre de manière simultanée que trois avions modernes de lutte anti sous-marine en 2020.
Quant au programme AVSIMAR destiné à remplacer les cinq Gardians en service en outre-mer, âgés aujourd’hui de trente-deux ans et qui seront hors-service en 2015, il est repoussé aux calendes grecques. À moins, monsieur le ministre, que vous ayez une information à me donner ce soir à ce sujet.
Tout cela entraînera bien sûr des difficultés logistiques et opérationnelles, et des coûts élevés en termes de maintien en condition opérationnelle des matériels car, comme le dit avec élégance et diplomatie le chef d’état-major de la marine, l’amiral Rogel : ce renouvellement progressif de la flotte induira la coexistence de bâtiments de générations très différentes qui nécessiteront une gestion plus fine que jamais du point de vue de l’entretien et de la conduite.
Monsieur le ministre, aujourd’hui le monde se réarme alors qu’en Europe les budgets sont chaque année en recul.
Depuis 2008, dix-huit des trente et un États européens membre de l’Union européenne ou de l’OTAN ont baissé de 10 % leurs efforts de défense. L’Europe est dépassée depuis 2012 par l’Asie du sud-est. Les dépenses de la Chine ont augmenté de 7,8 % pour atteindre 166 milliards de dollars en 2012. Celles de la Russie ont progressé de 16 % pour atteindre 90,6 milliards de dollars.
Nous assistons à une inversion dans les dépenses militaires mondiales entre les pays riches occidentaux et les pays émergents.
En 2012, la part des États-Unis est descendue pour la première fois au-dessous des 40 % de la dépense militaire mondiale. Pendant ce temps, en Amérique latine les dépenses ont augmenté de 4,2 %, en Afrique du Nord de 7,8 %, au Moyen-Orient de 8,4 %, en Asie et en Océanie de 3,3 %.
Vous affirmiez cet après-midi, en réponse à ma question, monsieur le ministre, que nous aurons encore la première armée européenne en 2020.