Intervention de Arnaud Montebourg

Réunion du 19 novembre 2013 à 17h30
Commission d'enquête relative aux causes du projet de fermeture de l'usine goodyear d'amiens-nord, et à ses conséquences économiques, sociales et environnementales et aux enseignements liés au caractère représentatif qu'on peut tirer de ce cas

Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif :

Depuis cinq ans, l'Europe, qui a connu de nombreuses délocalisations, a vu son activité se ralentir. Son taux de croissance est faible, voire négatif. Même si l'on vante le modèle allemand, le vrai modèle – celui qui permet de relancer la croissance par une politique monétaire et budgétaire souple – est américain ou japonais. Comme le dit Enrico Letta, président du Conseil italien, on peut mourir d'austérité.

Les difficultés économiques prolongées, jointes à une certaine naïveté du système libéral, qui favorise la concurrence déloyale, ont intensifié la concurrence sur le sol européen. L'obsession libérale nous pousse à laisser entrer chez nous des produits exemptés des contraintes que nous infligeons à notre industrie. C'est précisément parce que celles-ci sont légitimes – il est normal de préserver les travailleurs ou la santé du consommateur – que nous devons nous protéger d'une concurrence qui les piétine.

Mme Bricq et moi-même avons demandé à la Commission européenne de prendre des mesures douanières. Aujourd'hui, 99,2 % du commerce européen sont exonérés de toute barrière douanière. En raison de la dissymétrie entre l'ouverture de nos marchés et la politique de nos partenaires mondiaux, nous sommes attaqués sur des productions que nos propres multinationales délocalisent vers d'autres continents. Même Mittal demande à la Commission d'imposer des règles de protection. Onze mesures douanières ont été prises sur les aciers spéciaux.

La Commission, qui exerce des pouvoirs propres sous le contrôle des États membres, gagnerait à mieux protéger le sol européen. Nous menons en ce sens un travail diplomatique à Bruxelles. Une enquête est en cours sur les matériels de télécommunication des fabricants chinois, qui ont, par le dumping, détruit l'industrie allemande, française, italienne et espagnole de panneaux photovoltaïques. Les groupes mondiaux préfèrent désormais produire en Chine et en Inde des pneus qu'ils exportent chez nous.

Michelin, numéro deux mondial, qui détient 15 % des parts de marché, doit se réorganiser sur notre territoire et augmenter la taille de ses usines. Il a fermé celle de Joué-lès-Tours pour doubler la taille de celle de La Roche-sur-Yon et la rendre capable d'affronter la concurrence du low cost. Ce groupe patriote, qui vient d'investir un milliard en France et d'augmenter de 200 millions ses investissements dans son centre de R&D, à Clermont-Ferrand, subit une concurrence de plus en plus dure, qui le conduit, bien qu'il fasse des bénéfices, à restructurer l'appareil industriel. On ne ferait que l'affaiblir en freinant sa politique.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion