Intervention de Jean Jouzel

Réunion du 27 novembre 2013 à 9h45
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Jean Jouzel, climatologue :

Il est important que les parlementaires accueillent la communauté scientifique. Nous y sommes très sensibles et vous remercions d'avoir organisé cette table ronde.

Je suis parmi vous au titre de mon implication au sein du groupement intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC) dont le président est M. Rajendra Kumar Pachauri et dont je suis membre du bureau : ce dernier est composé de trente personnes, et aucun pays, à l'exception de l'Inde, n'est représenté deux fois. Chacun des trois groupes de travail y est représenté – je suis vice-président du groupe I, consacré aux études scientifiques. La France est également représentée au sein du bureau par Nicolas Bériot, secrétaire général de l'ONERC.

Je voudrais dire quelques mots du processus qui a abouti au rapport du groupe scientifique qui a été adopté à Stockholm il y a plus d'un mois.

Le GIEG est né suite au cri d'alarme qu'ont lancé les scientifiques dans les années 1970-1980 devant la menace du réchauffement climatique. Il a été mis en place sous l'égide de l'Organisation météorologique mondiale et de la branche environnement des Nations Unies en 1988. Notre instance obéit donc aux règles onusiennes.

Le rapport du groupe II, relatif à l'impact, à la vulnérabilité et à l'adaptation aux changements climatiques, sera adopté à Yokohama à la fin du mois de mars, et le rapport du groupe III, sur les moyens d'atténuer le changement climatique, sera adopté en Allemagne début avril. Ces travaux seront complétés par un rapport de synthèse qui sera présenté en octobre prochain à Copenhague.

Les membres du bureau sont généralement élus pour la durée de l'établissement du rapport d'évaluation. Toutes les décisions sont prises par une assemblée plénière où sont représentés tous les pays.

Nous proposons l'organisation du contenu du rapport, et lorsque celle-ci est approuvée, nous sélectionnons les auteurs sur des critères scientifiques, géographiques et de genre. C'est un tel honneur d'être rédacteur d'un rapport du GIEC que nous recevons de nombreuses candidatures. Ainsi, 259 auteurs ont participé à la rédaction de ce 5ème rapport, pour laquelle nous avions reçu un millier de candidatures.

Chaque chapitre est rédigé sous l'égide d'une douzaine d'auteurs et de deux coresponsables, auxquels peuvent s'adjoindre des contributeurs.

Nous avons ensuite quatre rendez-vous, tous les six à huit mois, de la première rédaction, dite « draft zéro », aux rédactions suivantes auxquelles sont adjoints des commentaires. Nous avons ainsi recueilli plus de 55 000 commentaires qui seront pris en compte. Il s'agit d'un processus collectif et transparent.

Les coprésidents de notre groupe sont MM. Thomas Stocker (Suisse) et Qin Dahe (Chine). Sous la responsabilité des coachs et d'un sous-groupe de rédacteurs, un résumé technique à l'intention des décideurs est établi – il s'agit de passer d'un millier de pages à cinquante pages – et c'est ce document qui fera l'objet d'un processus d'adoption auquel personnellement je suis très attaché. Certains considèrent qu'il est politique, mais je ne le pense pas. D'ailleurs, ce résumé reste la propriété des scientifiques et les représentants des gouvernements ne peuvent en modifier le contenu.

Je précise que le rôle du GIEC est non pas de faire des recommandations, mais d'établir un diagnostic. En clair, nous nous devons d'être policy-relevant et non policy-prescriptive. En revanche, à l'issue de ce processus, les décideurs sont censés prendre des mesures – j'emploie à dessein le mot « censés » car nous considérons que ces mesures ne sont pas prises assez rapidement.

Le rapport du GIEC doit être le livre de chevet des négociateurs du climat et il semble que l'objectif soit atteint.

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