Nous savons dans quel climat de contraintes budgétaires nous nous trouvons et nous mesurons la difficulté d’assurer le financement de notre système de protection sociale à court terme et d’en garantir la pérennité pour permettre aux générations futures d’en disposer sur le long terme. Nous approuvons donc, comme nous l’avions fait l’année dernière, la volonté affichée du Gouvernement de maîtriser le déficit des comptes de la Sécurité sociale, en particulier celui de l’assurance maladie. Cet équilibre est indispensable si l’on veut mener une politique de santé publique ambitieuse.
Nous sommes, dans le même temps, et c’est là que réside la difficulté, devant l’impérieuse nécessité de construire le cadre d’une politique de santé qui repose sur un nouveau paradigme. Nous ne pouvons plus nous exonérer d’un réexamen ferme et collectif des causes de la dégradation des conditions sanitaires et de l’accès aux soins sur notre territoire ni repousser perpétuellement cette tâche : les maladies chroniques prolifèrent, la stabilité psychologique de nos concitoyens vacille, les inégalités se creusent, et tout cela au même moment. Des pans entiers de notre population ont également perdu confiance dans la capacité des gouvernants à garantir à la fois la justice sociale, la qualité de vie, la rigueur et l’indépendance des expertises sur les produits proposés à la consommation quotidienne, qu’il s’agisse de produits alimentaires, de produits de santé ou de l’air que nous respirons.
Comme le souligne le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, l’équilibre général de nos comptes ne sera possible que si de nouvelles recettes sont créées. Nous avons fait des propositions en la matière, parfois sans succès. Nos propositions de créer des taxes comportementales ou des taxes complémentaires sur les retraites chapeau, un privilège qui nous paraît anormal par les temps qui courent, n’ont pas été acceptées.
Nous avons néanmoins avancé pied à pied sur l’inclusion des populations les plus fragiles, guidés par la conviction que plus le taux de renoncement aux soins s’accroît, plus les dépenses à moyen et à long terme liées aux consultations et aux urgences se multiplient, ce qui creuse d’autant nos comptes publics. Nous avons été entendus quand il s’est agi de soulager les retraités les plus pauvres : ils bénéficieront enfin d’une double revalorisation de leur retraite de base sur l’année, en avril et en octobre, ce qui n’est que justice.
Nous saluons aussi l’effort consenti pour faciliter l’accès à une complémentaire : le coup de pouce de 50 euros porte à 550 euros l’aide à une complémentaire santé pour nos aînés de plus de soixante ans. Nous faisons le pari audacieux que ces aides à l’accès à la complémentaire santé, sous-utilisées à ce jour puisque seuls 30 % des personnes concernées en font la demande, deviennent un droit plein et entier. Cela suppose une information plus large et plus soutenue. Nous veillerons à ce que les contrats solidaires ne soient pas des contrats au rabais : il faudra qu’ils soient bien en phase avec les besoins des populations et qu’ils financent un panier de soin de qualité.
La simplification administrative tant attendue par nos concitoyens doit pouvoir se traduire par une réduction des démarches et du nombre de justificatifs à fournir. L’automaticité de l’accès à l’ACS, l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé, pour les personnes relevant de l’ASPA est un bon signe, mais nous aurions aimé qu’elle soit étendue aux bénéficiaires de la CMU. Nous sommes également satisfaits de 1’adoption d’une autre de nos propositions, celle qui visait à rendre obligatoire l’information des bénéficiaires de complémentaires de la date d’échéance de leur contrat, et ce au minimum un mois avant son extinction. Ce sont les petits pas qui font les longues marches.
Nous voulons aussi voir aboutir la pleine fin de la convergence tarifaire. Le développement des maisons de santé et l’extension du tiers payant sont aussi des pas qui vont dans le bon sens.
Nous regrettons cependant que le souhait exprimé par les malades atteints du VIH, qui sont confrontés à la dépendance et à de lourds traitements, et les associations qui les soutiennent d’accéder à des médicaments spécifiques et relevant d’une autorisation temporaire dans des délais courts n’ait pas été exaucé. La journée mondiale contre le sida instaurée par l’Organisation mondiale de la santé nous rappelle à nos engagements pour 2015 : l’objectif zéro contamination et zéro discrimination. Nous sommes encore loin de cet horizon puisque 6 000 contaminations sont détectées chaque année sur notre territoire et que les associations voient depuis deux ans leur budget fondre d’un tiers.
Par ailleurs, nous saluons le vote unanime de la proposition de loi de nos collègues de l’UDI, qui permettra à la France de rattraper son retard en matière d’expérimentation de maisons de naissance. Les sages-femmes à la recherche légitime d’une reconnaissance et d’une validation de leurs compétences doivent être entendues et associées pleinement à ce nouveau dispositif. Les maternités doivent être confortées et le choix d’un mode d’accouchement échappant à une surmédicalisation doit pleinement trouver sa place sur notre territoire.
À cet égard, les écologistes rappellent que la politique du tout médicament n’est pas une fin en soi. Le médicament n’est pas une marchandise comme les autres. Il serait temps de réexaminer les politiques tarifaires de remboursement. Ce n’est pas à l’industrie pharmaceutique, là encore, de dessiner les contours de notre politique de santé. Il faudra poursuivre le débat sans tabou : la bonne gestion et l’intérêt général ne peuvent s’accommoder ni du chantage à l’emploi ni du déni de l’expertise des citoyens usagers, qui ne sont pas des cobayes.
Je souhaite également dire un mot sur la santé environnementale, qui a été évacuée de la conférence environnementale cette année. Il faut le dire : le Gouvernement tarde à prendre la mesure de cette urgence sanitaire et à se donner les moyens d’une réelle politique de santé environnementale qui s’attache à développer la recherche sur les pollutions et l’intervention sur le terrain pour limiter l’exposition des citoyens à aux pollutions de l’air, de l’eau et des aliments. De manière générale, nous soutenons l’idée que c’est en investissant dans la prévention primaire que nous répondrons à un devoir de solidarité tout en maintenant l’équilibre des comptes publics.
En conclusion, le PLFSS pour 2014 répond à l’impératif de solidarité en améliorant l’accès au soin des plus démunis malgré un contexte lourd de contrainte budgétaire. Madame la ministre, nous espérons que la loi de santé publique annoncée pour le premier semestre 2014 comportera des avancées significatives en matière d’éducation à la santé et de politique de santé environnementale.
Dans l’immédiat, et en attendant, nous soutenons votre budget pour 2014.