Je dispose de peu de temps pour répondre, mais nous vous ferons parvenir, dès ce soir, un document qui comportera des réponses précises à vos nombreuses questions.
Pour nous, le terme de « compétitivité » n'est pas un gros mot. Il y a quelques années, nos compétiteurs étaient plutôt transatlantiques pour certains produits, océaniens pour les produits laitiers. Aujourd'hui, ils sont européens : les Pays-Bas, qui ont toujours été un grand pays agricole, l'Allemagne et les nouveaux entrants dans l'UE, en particulier la Pologne qui se montre extrêmement dynamique. Finalement, ces dix dernières années, le commerce agricole et agroalimentaire de l'Union européenne a peu évolué sur pays tiers, mais s'est modifié à l'intérieur des Vingt-Sept. Autrement dit, ce que nous avons perdu côté français a été capté par nos voisins ; c'est une sorte de jeu à somme nulle, malgré une demande mondiale en croissance continue.
Monsieur Hammadi, pour nous, la Méditerranée est un sujet à part entière pour deux raisons qui touchent à notre responsabilité. D'abord, les pays méditerranéens ont fortement besoin de consolider leur agriculture pour leurs propres besoins, d'où l'importance du codéveloppement, du partenariat actif, de ce qu'on appelle aujourd'hui la colocalisation des projets. Ensuite, dans la mesure où le déficit de ces pays restera malheureusement structurel pour des raisons de démographie et de potentiel agricole – je pense en particulier à l'accès à l'eau –, l'Europe et tout particulièrement la France ont un rôle à jouer dans le cadre d'une solidarité active qui, au-delà d'une simple relation commerciale, constitue à mes yeux un véritable atout qu'il faut essayer de valoriser.
Nous nous interrogeons sur le CICE pour deux raisons. D'abord, l'impact du CICE dans la sphère agricole est très relatif – il est beaucoup plus sensible dans les services. Ensuite, son impact dans la sphère agricole est plus important pour les grandes enseignes, dont 80 % de la masse salariale est ciblé par ce dispositif. Ainsi, on va redonner de la marge aux distributeurs qui nous déclarent vouloir utiliser celle-ci pour les consommateurs, mais pas pour les fournisseurs. Or parallèlement, la fiscalité indirecte, que ce soit l'écotaxe, la fiscalité écologique ou la taxe carbone, va peser essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, sur le secteur de la production. Tout cela reviendra à déséquilibrer à nouveau les rapports à l'intérieur de la filière, mais également au regard de nos compétiteurs européens, ce que nous ne pouvons pas accepter.
C'est pourquoi nous sommes favorables depuis des années – et je l'ai redit hier au Premier ministre – à un transfert d'une partie des cotisations sociales, notamment la part familiale, sur le taux de TVA. Une majoration de la TVA d'un point ou d'un point et demi signifierait que les importations porteraient une part de notre modèle social, ce qui redonnerait de la compétitivité à la production agricole. Par contre, la FNSEA est consciente depuis toujours qu'un point à un point et demi de TVA toucherait de plein fouet les ménages à faibles revenus. Elle souhaite donc une réponse proportionnée et c'est pourquoi nous défendons, avec l'économiste Christian Saint-Étienne, l'idée d'une compensation pour les bas salaires via la fiche de paie.