Intervention de Antoine Magnier

Réunion du 21 novembre 2013 à 9h15
Mission d'évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

Antoine Magnier, directeur de l'animation de la recherche, des études et des statistiques, DARES au ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

La principale conclusion des travaux de synthèse à laquelle nous procédons avec la direction générale du Trésor est que ce dispositif a eu un effet favorable important sur l'emploi. Toutefois, les différentes évaluations – certaines ex ante, d'autres ex post, ainsi que des microsimulations – conduisent à des résultats assez dispersés et portent surtout sur la première vague d'allégements de cotisations sociales patronales, entre 1993 et 1997. Il en ressort que cette première vague, mise en oeuvre sous le gouvernement Juppé en 1995 et 1996, pour 6,5 milliards d'euros, a permis de créer ou de sauvegarder entre 200 000 et 400 000 emplois.

Il est moins aisé d'évaluer les vagues d'exonérations suivantes. La deuxième a accompagné la réduction du temps de travail afin d'en atténuer ou d'en compenser l'effet sur les coûts salariaux unitaires pour les entreprises, parallèlement aux gains de productivité et à la modération salariale induite qui étaient attendus de la mesure. La troisième a été lancée dans le cadre de la réforme Fillon de 2003, pour tenir compte de la convergence vers le haut des minima salariaux multiples issus de la réduction du temps de travail. Les travaux portant sur cette troisième vague – nous en avons suscités – sont beaucoup moins nombreux et se heurtent à de plus grandes difficultés méthodologiques que ceux qui évaluaient les effets de la première.

Si l'on fait l'hypothèse favorable – sans doute trop favorable – que l'effet sur l'emploi des deuxième et troisième vagues, mises en oeuvre entre 1999 et 2005, est équivalent à celui de la première, l'on peut considérer que 600 000 à 1,1 million d'emplois ont bénéficié du dispositif pris dans son ensemble. Si l'on estime – selon une hypothèse plus modérée, étayée notamment par une étude empirique conduite à l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) il y a quelques années – que le rendement des deuxième et troisième vagues a été de moitié inférieur à celui de la première, l'effet global ne concerne plus que 400 000 à 800 000 emplois.

En ce qui concerne le financement de la protection sociale, ces études, comme la plupart des travaux universitaires menés en France et à l'étranger, appellent l'attention sur la progressivité des prélèvements et sur l'effet que pourrait avoir toute mesure de modification de ce financement sur le coin fiscalo-social pesant sur les plus bas salaires. Selon la plupart des travaux empiriques, la sensibilité de l'emploi à son coût est d'autant plus forte que les salaires sont faibles, surtout en France, où il existe un salaire minimum et où celui-ci peut être considéré comme relativement élevé par comparaison avec d'autres pays. Car si le salaire minimum fait obstacle à l'adéquation entre l'offre et la demande de main-d'oeuvre touchant certains publics peu qualifiés, la variation des prélèvements fiscaux et sociaux devrait avoir un effet non négligeable sur les possibilités d'emploi de ces publics. Mais ce phénomène s'observe même dans les pays où il n'existe pas de salaire minimum, ou dans lesquels il est jugé relativement bas.

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