Après les attaques portées contre la BD de Pénélope Bagieu qui a fait le tour du Net et apporté à notre pétition plus de 600 000 signatures, je tiens à confirmer que tout ce qui est dit dans cette BD est vrai et fondé sur de nombreuses publications. Or le secteur et le groupe Intermarché, très concerné par cette pêche, veulent faire passer Bloom pour une association qui exagère et avance des arguments qui n'ont aucun fondement scientifique.
Je me trouvais hier à Londres pour assister à une table ronde en présence de plusieurs dizaines d'universitaires anglais. Ils sont effarés devant la capacité qu'ont les Français à créer des controverses scientifiques là où il n'y en a pas. Les Anglais ont établi une liste de 32 publications scientifiques internationales affirmant que la pêche en eau profonde n'est pas durable.
On entend dire ici ou là que les impacts de la pêche profonde sur les écosystèmes seraient limités, notamment parce que les engins passent sur des fonds sableux ou sédimentaires. Un certain nombre de chercheurs de diverses universités d'Écosse et d'Angleterre insistent sur l'importance des fonds sableux et sédimentaires pour les habitats et la nourriture des poissons, notamment les grenadiers. Ils rappellent également que plus de 3 000 espèces de coraux vivent dans les grandes profondeurs mais qu'une seule de ces espèces construit des récifs coralliens. Nous avons déjà déploré dans le passé les nombreux abus commis par le secteur de la pêche qui, en l'absence de réglementation, a provoqué la destruction rapide et spectaculaire de nombreux récifs coralliens profonds. Certes, un encadrement a été mis en place, mais il ne permet pas de protéger les écosystèmes et les espèces vulnérables. Nous disons vouloir protéger les écosystèmes coralliens profonds, mais nous ne protégerons en réalité qu'une seule espèce de corail parmi les 3 000 qui existent.
Pas moins de 70 publications scientifiques internationales démontrent les impacts du chalutage. On parle d'une pêcherie bien encadrée et bien gérée, or ce n'est pas le cas. En effet, dans 50 % des cas, les captures dépassent les quotas qui eux-mêmes ont été fixés au-delà de ce que préconisaient les scientifiques.
Parmi les prises accessoires qui sont rejetées par-dessus bord, on entend dire que le rejet du mulet noir, Alepocephalus bairdii, ne pose aucun problème dans la mesure où nous ne savons pas la valoriser. Or un article de la revue internationale Nature a signalé que la population de mulets noirs était tombée à 6 % de son niveau normal en 2002, ce qui la rend éligible au titre d'espèce menacée d'extinction selon les critères de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
Parmi les espèces rejetées par les navires, nous trouvons des espèces déjà menacées d'extinction comme certains requins. La pêche en eaux profondes pose également des problèmes éthiques.
Je suis surprise par les chiffres qui ont été avancés. La Commission européenne a réalisé une étude d'impact pour déterminer, sur la base des données fournies par les Nations, le nombre de bateaux concernés par les captures d'espèces profondes. Cette étude montre que 771 bateaux capturent plus de 10 % d'espèces profondes durant au moins une journée par an, mais que 11 bateaux seulement, dont une dizaine sont des bateaux français, capturent des espèces profondes plus de trois journées par an.
Nous avons analysé les comptes de ces flottes. Ils sont totalement déficitaires. Les bateaux de la Scapêche, la société centrale des armements du groupe Intermarché, sont tous déficitaires, à l'exception d'Euronord, armement basé à Boulogne-sur-Mer, qui a amélioré sa performance et s'est beaucoup désengagé de la pêche des espèces profondes.
Je peux vous garantir que tous ces éléments sont véridiques car étant une toute petite ONG, nous ne pouvons-nous permettre d'avancer des informations sans les avoir vérifiées.